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Femmes du dimanche

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( texte proposé par Julie Desfois )
A la charnière des années 50-60, des hommes se travestissaient chaque week-end à la Casa Susanna, une villa près de New York. Un livre de photos anonymes retrace l'aventure clandestine de ces "girls" d'exception.

Par Gérard LEFORT (Liberation - juillet 2005)

C'est un vrai conte de fées. Au sens où les fées ont des grosses voix, chaussent du 45 et, bien que souvent lancées dans des divagations de fillettes, accusent un important tour de taille. L'action se situe à la charnière des années 50 et 60, aux environs de New York, dans une pimpante villa néogéorgienne où, tous les week-ends, sous les auspices d'une certaine Susanna, hôtesse accorte, une vingtaine d'hommes de tout poil se réunissent. Pas vraiment pour commenter les résultats du dernier match de base-ball, mais pour se travestir en femmes. Pendant environ dix ans, ces réunions intimes furent photographiées par quelques-uns des participants pour des albums souvenir à usage privé. Le temps passa, semblant refermer à jamais les portes de cet étrange paradis.

Nom de code

Quelques révolutions sexuelles plus tard, en 2000, le magazine new-yorkais Nest exhumait certaines de ces images, et aujourd'hui c'est une sélection plus large qui est devenue un livre publié aux Etats-Unis sous le titre Casa Susanna (1), qui apparemment était le nom de code de cette sidérante association. Mais le récit de cette résurrection n'est pas moins déconcertant. Robert Swope, préfacier du livre, prétend avec une conviction tout ce qu'il y a de flou que le stock de photos (à peu près quatre cents) fut découvert et acheté dans un marché aux puces de New York et qu'en gros il n'en sait pas plus. Même si on peut douter de cette version et présumer, par exemple, que le fonds Susanna a été transmis par un des participants survivants voulant toujours rester anonyme, voire par la mystérieuse Susanna elle-même, cette ambiguïté n'est en l'espèce qu'une pierre de plus dans le jardin du romanesque. Et, si un jour le cinéma s'emparait de l'affaire Susanna, il faudrait tout le talent d'un Todd Haynes (Velvet Goldmine, Loin du paradis) ou d'un Tim Burton (de la période Ed Wood) pour être à la hauteur de cette fiction et si possible la transcender. Car le moins qu'on puisse dire à scruter ces femmes différentes, c'est que, plus de quarante ans après, leurs chimères laissent rêveur et subjuguent le regard.
Page après page, année après année, été comme hiver, elles sont toutes les femmes américaines de l'après-guerre. Les étoiles éternelles du glamour (Marlène, Greta, Rita...), les vedettes d'actualité à l'heure où Jackie Kennedy allait imposer son chic Park Avenue à toute une génération, mais aussi bien les ordinaires, les banales aussi moyennes que la classe sociale dont majoritairement elles semblent issues. Donc plutôt tendance Jack Lemmon et Tony Curtis dans Certains l'aiment chaud que Jane Russel et Marilyn Monroe dans Les hommes préfèrent les blondes.

Distractions ménagères

C'est évidemment sur ce terrain des femmes "normales", qui plus est saisies dans la routine de leurs distractions ménagères (taper le carton, jouer au Scrabble, tricoter, prendre le thé), que l'humour ­ volontaire quand le fou rire est en train de gagner les visages au moment du déclic ou involontaire ­ fait l'effet d'un lance-flammes qui carbonise aussi bien les arcanes de la féminité officielle que l'identité masculine ou les lois de la famille. Témoin, cette carte de joyeux Noël où l'une pose en manteau rouge sang devant un sapin teint en bleu.
Au fil des pages, comme une machine à démonter le temps, on les voit vieillir, s'empâter, se rider. Embellir aussi. Il y a les débutantes, intimidées par l'objectif, les aguerries qui posent comme des pin-up, quelques beautés sublimes, d'autres créatures plus ingrates et pas moins bouleversantes pour autant. Ces girls, contraintes par la loi à la clandestinité, sont littéralement des femmes d'intérieur. Et cette intimité explose jusqu'à contester la hideur de la décoration concierge de la casa Susanna et se venger du reste, encore plus horrible : le monde extérieur, les autres jours, la vie de ces femmes redevenues des hommes et, probablement, des maris et des pères de famille. Si on songe aux images de Diane Arbus ou Nan Goldin, c'est que, à l'instar de ces deux photographes de l'Amérique monstre, c'est le hors-champ qu'on voit hurler, gémir et pleurer en cette époque où le pédé rasait les murs et où le travesti était considéré au mieux comme un monstre de foire. Bien que sûrement elles en auraient été les premières surprises, ces femmes sont des pétroleuses qui incendient toute forme de majorité, qu'elle soit sexuelle ou sociale. A ce titre, toutes ces dames d'exception, ladies Macbeth d'un "Queendom" ténébreux, sont ad aeternam d'actualité.

(1) Editions Power House books, 29, 95 $ (environ 25 €).

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