Pourquoi nous et nos jupons ?

à la fin de ce récit, tu peux donner ton avis

( texte proposé par Lucie Sobek )

Ah ! il nous barbe, ce vieux barbon avec ses questions sans réponses, qui ne nous arrangent pas et ne résolvent rien ?
Je crois simplement que s’il n’y avait jamais eu de ces vieux ‘’barbons barbants’’, de ces casseurs de mythes et de croyances, notre terre serait toujours aussi mystérieuse et plate …

Je ne sais pas pourquoi j’ai toujours aimé les robes des filles, leurs jeux plus calmes et plus sensuels, les calins que leurs mères et leurs copines leurs donnent, les appréciations flatteuses qu’elles reçoivent dès qu’elles ont un joli nœud dans les cheveux qu’on leur permet de garder longs et bouclés … et pas moi ?
Qu’ai-je donc fait de si répréhensible (et à qui ?) pour être, parce que je suis un garçon condamné aux travaux pénibles, à la rigueur militaire, à ce dédain dévalorisant et moqueur quand il m’arrive d’enfiler une robe ou de mettre une si douce et si jolie petite culotte appartenant à ma grande sœur ou à ma mère ? Pourquoi suis traité de ‘’femmelette’’ ou d’autres noms de fleurs dévalorisantes quand j’ose m’habiller et me maquiller maladroitement ?
Pourquoi suis-je condamné au bagne dès ma naissance avec ballon de foot et pistolet, à porter ces horribles pyjamas de gros coton à rayures comme si j’étais déjà un condamné à perpétuité ? Parce que je vais devoir assumer le nom de mon père _ même si je le respecte_ et que je suis celui qui va assurer la descendance génétique (même si cette vision s’est révélée fausse) …
Oui pourquoi n’ai-je pas le droit aux jupons, aux dentelles et aux belles robes, moi, un garçon ?

Bien sûr il y a cette histoire (réelle) du bain hormonal du septième mois qui va orienter ou favoriser mon développement cérébral mais, en quoi serais-je responsable ?
Les réponses des copines sont dans cet ordre de choses plutôt fatalistes.
‘’ Ce n’est pas de ma faute ‘’ … comme si préférer des formes vestimentaires d’un genre ou d’un autre pouvaient être une faute ;
‘’J’ai toujours préféré jouer avec les filles et m’habiller comme elles, en robes de fées ou de princesses, jouer à la poupée ou à la dinette’’ …
‘’Danser, virevolter, valser dans une belle robe satinée m’a toujours fait rêver plutôt que de pratiquer les sports de combats, le foot ou le rugby‘’…
‘’J’aurais préféré être une femme plutôt qu’un homme’’ … (parce que les vêtements qu’elles portent sont plus jolis, variés, exubérants que mon triste costume trois pièce dont on m’affuble lors des cérémonies et que ces vêtements sont devenus une obsession) … mais sans parler de ce qu’elles disent de leur vie physique de femmes (les règles, en particulier, les grossesse et accouchements)
‘’Parce que l’envie grandit de me faire charcuter pour éliminer cet horrible chose qui me pend entre les jambes et dont j’ai pris en horreur’’ et faire changer mon ‘’état civil ‘’ pour ne plus avoir honte d’être ce que je suis …dans ma tête

Oui, dans notre société, le fait d’être garçon est un bagne … pour nous, garçons féminins mais pas pour tous les garçons (ni toutes les filles) …

Je me suis souvent posé la question de cette composition hormonale du 7ème mois .
Les biologistes ont compris la réaction du cerveau prénatal sur cette inondation qui nous oriente mentalement…
Une discussion lors d’une ancienne émission de ‘’la Grande Librairie’’ avec Boris Cyrulnik, m’a fait réfléchir. Il y parle de deux centres cerébraux réels (et observés matériellement par les neurobiologistes), un centre du plaisir et de la récompense et un centre de la punition. Il affirme que ces centres s’accroissent en activité et importance ou régressent en fonction de nos activités et phases de vie,
L’idée m’est alors venue que cette composition hormonale pourrait bien être le résultat de ce que nous, fœtus, ressentons dans le ventre de notre mère tout autant que du ressenti de la vie sociale qui nous entourait à cette époque. On peut raisonnablement imaginer qu’une vie calme, douce et harmonieuse, que les sensations et les désirs mentaux de notre mère puissent avoir un effet sur notre sensation de plaisir intra-utérin et de notre confort plus ou moins conscient. Il me semble bien possible qu’un contexte de violence et de dangers fasse que la maman puise plus souhaiter enfanter une fille qui sera moins exposée aux dangers spécifiques qu’un garçon … Bien sûr, la morphologie du bébé est déjà définie dès la fécondation mais pas son mental qui le sera beaucoup plus tard …
…
Mais cela ne change rien à notre nous intime. Ce que nous sommes physiologiquement est inchangeable et non modifiable, chirurgie ou pas. Notre mentalité masculine ou féminine, toujours partielle, elle peut l’être et orienter notre comportement toute notre vie et notre regard émotionnel vers ‘’l’autre versant de la vallée ‘’ qui est, comme chacun le sait beaucoup plus joli et agréable …

De cette réflexion ressort la question de notre responsabilité et de nos tendances ‘’de genre’’.
Si c’est le cas, pourquoi notre sensualité qui nous pousse vers l’élégance et la frivolité devrait-elle être brimée et nous priver d’un comportement normal et ordinaire et pour … QUOI ?