Jocelyne respire un grand coup et pénètre dans la cuisine. Olivier prends son chocolat et ses céréales, comme d'habitude. Mais ce matin là, il porte une petite jupe en lainage vert et un pull assez moulant mettant en valeur une bien jolie poitrine. Sa mère continue rapidement son inspection. Elle remarque qu'il porte aussi un collant et des bottines, son visage est maquillé discrètement mais joliment. Ses cheveux blonds sont retenus par un turban en velours noir.
- Bonjour, ma chérie, tu es bien jolie ce matin.
Buvant son chocolat, Olivier marque un court temps d'arrêt qui n'échappe pas à sa mère. Elle continue.
- Comme d'habitude, ton père ne peux m'accompagner pour les courses, alors, tu vas venir avec moi.
- Mais...
Là, Olivier accuse le coup. Jocelyne en profite.
- Ah non, ne me dit pas que tu as d'autres choses à faire, tu ne vas pas encore rester toute seule à la maison...
- Mais, maman... comme ça ?
Il s'est levé, mettant sa jupe en évidence.
- Ben oui, Olivia, tu es très bien comme ça. Tu ne vas pas encore mettre tes horribles jeans en forme de sac ! Tournes-toi, ta jupe est encore froissée, il faut faire attention en t'asseyant, combien de fois devrais-je te le dire ?
Olivier se frotte les yeux. Sa mère n'en semble pas démontée.
- Paul !!!
- Oui, chérie ?
- Ta fille a quelque chose à te demander...
Là, Olivier panique.
- Mais maman, je ne voulais...
- Quoi, tu ne veux plus lui demander ?
- Mais, maman, quoi...?
- Tu as déjà oublié, petite idiote ?
Paul entre dans la cuisine, le jeune garçon ne sait où se fourrer.
- Oui, ma petite, tu as quelque chose à me demander ?
- Je... je...
Exaspérée, Jocelyne réagit.
- Elle est trop timide ! Elle voudrait passer la nuit chez sa copine Louise...
Olivier fixe sa mère avec de grands yeux tout ronds.
- Eh bien, je ne vois pas où est le problème, sa mère est prévenue, j'espère ? Ta mère t'y déposera ce soir et ira te rechercher demain midi... ça te va ?
Partagé entre la frayeur, l'incompréhension et le bonheur, Olivier ne sait comment réagir. Puis, finalement, il sort un timide :
- Merci, papa.
Le moins qu'il puisse dire, c'est qu'il ne s'attendait pas à une telle réaction de ses parents ! C'est Louise, sa copine de toujours qui avait eue cette idée la semaine d'avant.
- Puisse que tu ne peux pas leur dire, autant le leur montrer carrément...
Tout d'abord, il avait rejeté cette idée bizarre et puis, il s'était dit, pourquoi pas ? Il avait marre de mentir à ses parents, de jouer la comédie de la virilité. Depuis longtemps déjà, il passait des journées entières en fille chez sa copine. Il avait trouvé en elle la complice idéale, celle qui l'aidait de façon pratique mais surtout qui le considérait totalement comme une fille. Elle a été pour lui une sorte de trait d'union qui l'a fait pénétrer dans un univers dans lequel il se sentait encore exclu. Mais Louise n'aurait jamais pensé à ce qu'il lui arrivait ce matin !
Olivier pousse le caddie derrière sa maman.
- Ma chérie, tu me feras penser à l'adoucisseur, je l'oublie toujours...
Olivier est tétanisé. Bien sûr, il vit quelque chose qu'il ne pouvait que rêver, mais... c'est si rapide, si violent ! Mais, sa hantise, c'est d'être reconnu dans ce supermarché de quartier... Mais le plaisir procuré par cette situation dépasse largement toutes ses angoisses. Il n'en revient pas, il est là, avec sa mère... Il porte une jolie jupe qui caresse ses cuisses, le talon de ses bottines frappent doucement le sol... Le plus extraordinaire, c'est le regard des autres et leur absence de réactions. Pour tout le monde, il est une jeune fille qui fait ses courses avec sa mère, tout simplement.
Jocelyne pousse le caddie vers la travée de l'hygiène.
- Où tu en es depuis ton changement de tampons ?
Olivier ressent comme un vertige...
- Ma chérie, profite de l'occasion, tu as vu ce lot de collants ?
Et puis :
- Dis donc, elles sont craquantes ses petites culottes, je t'en prends un lot de trois...
Olivier n'en peut plus, il ne parvient plus à contrôler sa respiration, ses émotions. Il s'éloigne rapidement du rayon lingerie et court vers la sortie. Parvenu à la voiture, il ne peut qu'attendre sa mère qui a les clés. Il attend dix minutes adossé à la voiture. Il commence à se faire remarquer par un vieux monsieur au volant de sa voiture. Gêné, il décide de revenir vers la galerie marchande, vers les boutiques...
Enfin libre ! Libre de pouvoir faire les vitrines sans gène, libre de toucher les robes, les jupes, libre de les porter à sa hauteur, libre de les essayer... Mais que faire sans argent ? Il décide donc de rentrer à la voiture.
- Qu'est-ce qui t'a pris comme ça ? Tu es devenue folle ?
Olivier pleure maintenant abondamment.
- Oui, folle, le mot est juste ! Pourquoi, cette comédie ?
Jocelyne caresse les cheveux de sa fille.
- Quelle comédie ? Tu vas te calmer, tiens, je t'ai acheter une nouvelle trousse de toilette pour ce soir chez Louise.
Jocelyne conduit maintenant depuis plus de dix minutes.
- Maman ! Mais où vas-tu ?
- Et bien, chez Louise ! Au fait, tu ne veux pas regarder ce que je t'ai acheté ?
Là, dans le sac... Et bien, oui, c'est une robe, elle t'ira bien, j'en suis sûre. Sinon, tu pourras l'échanger, j'ai le ticket de caisse.
- Mais, pourquoi tout ça... pourquoi Louise ?
- Tu pourras lui rendre sa jupe et son pull. Je sais qu'elles sont à elle. Et aussi ce que tu portes en dessous... j'y ai pensé aussi, c'est dans le petit sac.
- Mais, maman, pourquoi...?
- J'ai téléphoné tout à l'heure chez elle. Elle t'attend ainsi que Chantal, sa maman.
Olivier se tasse sur son siège, ses yeux rivés à ses genoux.
- Et... que lui as-tu dit ?...
- Que ma fille Olivia venait passer la journée et la nuit chez elle, sa copine. J'ai dit une bêtise ?
- Heu, non. Et qu'a-t-elle répondu ?...
- C'est bizarre, elle paraissait comme surprise... elle m'a même fait répéter deux fois. Et puis, ensuite, elle était bien plus détendue, elle m'a dit qu'elle serait très heureuse de te recevoir. Cela te convient ?
- Oui maman. Cela me convient tout à fait...
- Vous avez pris la bonne décision, Jocelyne. Olivia ne pourrait vivre autrement. J'ai bien tenté de vous le dire, mais ce n'est guère facile. Vous n'aviez rien remarqué ?
- Merci, Chantal pour tout ce que vous avez fait. A votre question, je répondrai... oui, bien sûr ! J'attendais juste une initiative de sa part, elle est venue. Et puis, disons que tout cela me satisfait assez, j'ai gagné le pari engagé avec mon mari !
Les deux femmes éclatent de rire alors que, derrière le buisson, leurs filles les écoutent attentivement.
FIN
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