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« le garçon fleur 6 », une petite histoire imaginée par sabine

1 le garçon fleur 6 sabine tvq@femmes.net 27-10-2004, 16:03 par Sabine



Chapitre 13
La révélation

On est bien, tous autour de la table du bistrot. Je suis le seul à avoir pris une boisson alcoolisée. Oh, juste un demi, pas de quoi se biturer ! D'abord, c'est une boisson alcoolique, et non alcoolisée, puisqu'elle contient de l'alcool à l'état naturel ! Mais ce peu d'alcool, pour moi qui n'en boit jamais, me donne juste de quoi être bien et faire tomber quelques barrières.

Le cours a fini plus tôt, parce que plus intensif. On a tous mal aux cuisses, le grand écart n'étant pas un mouvement particulièrement facile. Mais la conversation ne tourne pas autour de la danse. Pas cette fois. Dominique et moi, on se jette parfois de ces regards qui nous excitent comme des mômes. On s'imagine en fille, et ça fait se trémousser nos imaginations. Il me suffit quant à moi de penser que le garçon, là, qui me sourit, s'habille en fille et qu'il sait que j'en fais autant pour me plonger dans des délices inattendues.

Toi, ô hypothétique lecteur égaré ici et incapable de comprendre ces délices si simples et si belles, ne te moque pas, ne critique pas, ne juge pas, surtout. Sois heureux d'être dans la norme, puis, simplement, change de lecture. Tu n'as rien à faire parmi nous. Pardon ? Tu dis ? Tu aimerais comprendre ? C'est louable, mais hélas impossible. Imagine-t-on un chat comprendre un chien ? Non, hein … Mais bon, ok, alors reste avec nous, tu es le bienvenu. Tu n'éprouveras jamais du plaisir à enfiler des bas ou une jupe, en aurais-tu même l'envie, mais reste avec nous. Tes mains ne trembleront jamais alors qu'elles tiendront le bâton de rouge ou la petite brosse pour se faire les cils. Talons et pointes de pieds resteront à jamais au même niveau dans tes souliers. Ton mâle visage jamais ne deviendra femelle, même juste un peu, mais ça ne fait rien, reste. Et tolère.

Encore là ? Oui ? Encore là … Je te donne une dernière chance, tiens. J'ai des cousins/cousines. Trois mecs et une nana. Un jour que lors d'une réunion de famille je discutais, avec l'un des cousins, de son frère disparu de la circulation depuis des années, il m'a dit d'une voix gênée que son frangin était homosexuel. Il s'est arrêté après ces mots, considérant avoir tout dit, tout expliqué, tout justifié. Comme je le regardais sans répondre, la tête pleine de pensées confuses, pensant à ce gentil cousin fuyant même sa famille, l'autre a insisté :

- T'as pas compris ? Je te dis qu'il est HOMO !

Si, si, j'avais parfaitement compris. Bien plus compris qu'il ne se l'imaginait, le cousin bien pensant. C'est pas du roman, ça, tu vois. C'est la vie, avec des cousins homos dont l'un ose et l'autre non et dont un troisième méprise le premier, son frère. Il aurait méprisé aussi le deuxième, mais le deuxième cache en parole et en actes sa tare aux autres, se consolant avec des écrits.

Allez, va-t-en, s'il te plaît, maintenant. Tu nous perturbes, nous les hors normes, d'être si normal. Non ? Tu restes, c'est sûr ? Pfff … J'espère que ça n'est pas par pitié, on ne le supporterait pas. Curiosité, peut-être, tout simplement ? Oui, hein, bien sûr que oui. Ca t'intrigue. Bon, ben reste …

Pardon, ô lecteur complice, mais des fois j'ai des tristesses qui me viennent, tu comprends ?

C'est fini.

Je ne retiens pas longtemps LA question qui me ronge. Faut que je sache, j'en peux plus !

- Tu sors en fille, avec Pascal ?

Je bénis cette complicité toute neuve qui me permet d'être aussi direct. Je me suis adressé à Dominique, évitant tout autre regard. Mais décidément je semble être le seul à me compliquer la vie !

- Ouais, souvent, répond-il sur le ton qu'il prendrait pour me dire qu'il fait beau.

Michel prend le relais :

- Pourquoi vous nous l'avez jamais dit ? Vous savez depuis le début qu'on est comme vous …

- Pas exactement, mec, corrige Pascal. - On sait que vous êtes homo, pas que Bruno est un travesti. Tous les homos ne sont pas travestis, loin de là !

Le mot me choque. Incroyable … Malgré moi, m'entendre qualifier de travesti me choque autant que la première fois que Michel m'a qualifié d'homo. Je ne le montre pas, je me contente de maudire ma timidité maladive, mon respect réflexe des normes et ma trouille de l'inconnu. Oh, je ne suis pas choqué longtemps, et bien vite, être qualifié de travesti devant les trois garçons me procure un net plaisir. N'empêche, hein, t'avoueras, c'est chié …

- Il est pas encore travesti ! précise Michel. Il n'est jamais sorti en fille.

- Pas travesti mon œil, rigole Dominique. Il l'est dans sa tête depuis toujours, tellement que même sa sœur le sait ! A l'entendre, hein, il a pas détesté qu'elle l'habille en fille ! Pas vrai mon Bruno ?

- Non, j'ai pas vraiment détesté …

Ce qui suit est d'un autre monde. Le tout était de commencer ! Il fait beau, on est dehors à la terrasse et personne ne peux nous entendre. On se connaît tous bien assez pour aborder ce genre de sujet ! J'explique à Dominique, à sa demande, comment Michou m'a habillé et maquillé. Je n'entre pas dans tous les détails, mais je ne lui cache rien du plaisir que j'ai ressenti. Il sourit, je souris, enfin à l'aise, et même franchement excité.

- C'est génial, hein, les bas ? T'as aimé ?

- Oui. Surtout enfilés par sa grande sœur ! Ca fait drôle de sentir la peau nue en haut des cuisses et les jarretelles qui frottent quand on marche.

- Tu devrais mettre un porte jarretelles, par contre, à la place de la gaine. C'est encore plus agréable, tu verras !

- J'ai pas trop eu le choix, tu sais !

- Oui, c'est vrai ! On arrangera ça. J'ai aussi des guêpières, je t'en prêterai, si tu veux.

Je crois que le sommet est atteint. Je suis ailleurs. Je plane dans mon plaisir. Un garçon me dit à moi, autre garçon, qu'il me prêtera un de ses porte jarretelles, une de ses guêpières, pour y accrocher mes bas … Et j'aime Michel, et Dominique aime Pascal, et tout le monde il est gentil …

Je tremble. Faut que je me calme, bon Dieu, qu'autrement je vais tomber dans les pommes ! Michel s'aperçoit de mon trouble et passe sa main à mon cou, me serre sur lui et me fait une tendre bise sur la joue, augmentant de manière significative une érection déjà vigoureuse.

- T'es heureux, on dirait ?

Bon, ça va mieux. Le câlin de mon ami me calme. Je regarde Dominique pour répondre à Michel.

- Non, je suis heureuse …

- Ca se voit ! constate Dominique. - C'est mes affaires de fille qui te mettent dans cet état ?

- Ben … oui.

- Tu te vois déjà avec, hein ma salope ?

Jamais terme aussi trivial n'a semblé aussi doux. Il perd son côté insulte pour devenir un qualificatif complice et excitant. Dominique se marre de mon air heureux. Du coup, il en rajoute.

- Moi, je te verrais bien en jupe courte, pas comme une minijupe, un peu au dessus des genoux. Et des bas résilles, noirs, avec un petit porte jarretelles rose, ou blanc, comme tu veux. Pour le haut, je te prêterai un soutien-gorge croquignolet, que Michel aura du mal à pas y fourrer les mains tellement il est mignon ! Et par dessus, tu mettras … voyons … Un petit pull très léger qui te moulera toute …

Je me demande comment je vais pouvoir repartir discrètement tellement je bande. A croire qu'il le fait exprès ! Il me donne le coup de grâce :

- … enfin si ton mec est d'accord !

La totale ! En fille, avec des vêtements de fille appartenant à un garçon, et sous réserve de l'accord de … mon mec ! Michel, c'est mon mec … Il y a comme ça des mots qui dans certaines conditions deviennent de véritables jouissances. Et dire qu'il y a encore une heure …

J'aurais voulu le cacher, mais avec tous ces regards braqués sur moi, je n'ai guère de chances. Oh, je résiste, pourtant ! Un peu … On ne résiste pas à un tel raz de marée. Finalement, je n'aurai pas de problème pour repartir en toute discrétion, car trop c'est trop, et je jouis avec une soudaineté invraisemblable. Je ferme les yeux, je me contracte, je serre les poings. La jouissance déferle, infiniment bonne, souillant mon slip mais m'emportant dans un plaisir sans mesure.

Je m'entend gémir doucement, et n'y peux rien. En spectateur, je me rend compte du silence soudain, je sais parfaitement que tous savent que je suis en train de jouir devant eux. Mais je m'en fous. Je suis trop heureux. Je me laisse aller … Ca dure quelques secondes d'éternité, puis ça diminue, diminue, disparaît lentement. Je piste le plaisir dans mon corps, en cherche les bribes qui s'y attardent, racle le fond de ma jouissance jusqu'à épuisement.

Puis j'ouvre les yeux, ahuri, hébété. Je mets un moment à vraiment reprendre pied dans la réalité, après l'avoir pris tout court, mon pied. Trois visages me sondent, trois visages me sourient et me comprennent. Ca fait chaud au cœur et à l'âme. Ils respectent mon silence, les garçons, attendent que moi aussi je leur sourie. Ils sont mes amis, mes copains de danse, mes confidents, et maintenant bien plus encore. Michel n'a pas lâché mon cou, ce que je constate maintenant seulement. Bon, allez, je leur fait un beau sourire.

- Hé ben ! s'exclame Pascal, tu pourras pas dire que t'es pas excité à l'idée d'être en fille !

- C'est mes jolies fringues qui l'ont excité comme ça, ajoute Dominique. Et encore, il a juste imaginé, il les as pas vues ! Ni portées ! Quand tu t'habilleras en fille, un conseil, met ta gaine de danse en dessous …

- Tu parles d'un rapide, s'étonne Pascal. - Ca va, Bruno ? T'es remis ?

- Ca va. Putain, je sais pas ce qui s'est passé … C'est dingue !

Michel me serre tout contre lui, m'embrasse, et me demande :

- Elle te plaira, si je comprend bien, la tenue de Dominique ?

- Si je dis le contraire, tu me croiras pas. Mais c'est pas seulement la tenue qui m'a … C'est tout, le reste, vous, les circonstances. C'est Dominique, là, avec sa façon de parler de toi comme de mon mec !

- Ben quoi, je suis pas ton mec ? Et toi, t'es pas ma nana ?

Luttant contre le vide qui suit toujours la jouissance, je souris.

- Oh si, Michel, t'es mon mec ! Et je t'adore, d'être mon mec ! Elle t'aime, ta nana !

Je regarde les garçons, me fixe sur Dominique, et lui dis de tout mon cœur :

- Je l'aime. C'est MON mec !

- Je sais, fait-il. Tu l'aimes autant que j'aime le mien. C'est simple, hein, de s'avouer ça entre filles ?

Chapitre 14
L'amour de ma tribu
Semaine suivante. Vendredi.

Le cours de danse, une fois encore, a été plus court. Cette fois, on a commencé les portés. Epuisant ! Ca pèse lourd, une fille ! Vive la mode des filles minces ! Oh, on a juste commencé. Avant qu'on ait l'équilibre, plus la force, plus la grâce, plus le sourire en faisant tout ça, t'auras changé cinquante fois de chapitre, ô lecteur dévorant !

Je te passe les attouchements des filles durant ce genre d'exercice … Sache simplement que quand on a les mains autour de leur taille et qu'on s'évertue à trouver la bonne position pour les décoller du sol sans s'abîmer une vertèbre, leurs mains à elle sont libres. Que je te raconte : Sylvie a même dû calmer Nathalie, mon bourreau personnel, qui a failli nous faire tomber en explorant mon entrejambe à un moment non propice.

- Continue comme ça, Nathalie, et tu dégages du cours ! qu'elle s'est fâchée tout rouge, la prof. - Je n'ai jamais interdit ce genre d'amusement, mais pas pendant les exercices. Là, tu vas trop loin !

Elle était tellement désolée, Nathalie, tellement triste et vexée, que je lui ai fais un sourire.

- Et toi, là, tu peux pas te défendre, non ? m'apostrophe Sylvie à la surprise générale.

Tous les regards me vrillent, et je me sens soudain tout con, tout faible, tout nu. Sylvie, on la connaît, on l'adore tous. Ses rares colères passent vite. N'empêche, cette réflexion sur ma passivité me renseigne sur ce qu'elle pense de moi. Elle et les autres, sûrement. Je regrette mon sourire rassurant à Nathalie. Pas longtemps, parce qu'elle déclare :

- Ah non, pas lui ! C'est moi qu'il faut engueuler, pas Bruno !

- Je l'engueule pas, se radoucit la prof, je lui dis qu'il est trop … gentil.

- Et trop tentant, aussi, sourit Nath. Pardon Sylvie, je ferai attention, c'est promis.

On verra bien … Sacré Nathalie ! T'y trompes pas, ô lecteur amusé, je suis fier d'inspirer des envies à cette fille, homo ou pas ! Cherche pas à comprendre, même moi je comprend rien ! J'en souris encore en me préparant mon petit verre de café au lait habituel.

- Comment tu peux avaler ça ? me demande pour la énième fois ma sœurette.

Le lait est mon aliment de base, quasiment. Michou ne le supporte pas, je ne sais plus quel truc manque à son système digestif. Il paraît que c'est assez courant. Ding ! fait le micro-onde. Je sors le verre, le pose sur la table.

- Bruno, demande ma mère, tu n'as rien à faire ? On peut parler ?

- Ben … oui ! m'étonné-je, amusé par deux questions ainsi groupées qui chacune attendent une réponse opposée pour un même résultat.

- T'as la frite, j'espère ? prévient Michou.

Allons bon … Qu'est-ce qui va encore me tomber dessus ? Leur sourire ne me rassure pas. Ca sent le traquenard, le coup monté. Je me fais l'effet du lapin hypnotisé par le vilain serpent affamé.

- Pourquoi ? Vous m'inquiétez, toutes les deux … C'est à quel sujet ?

- Le tien, déclare maman. - Tu dois bien deviner, non ?

J'avais deviné, oui, mais ne voulais pas le savoir. Tu parles d'un con, décidément ! Une fois de plus, les autres décident pour moi. Je limite les dégâts, me force à sourire.

- J'ai une grande sœur trop bavarde, c'est ça ?

- Ne le lui reproche pas, Bruno. Elle est obligée de parler pour deux.

Toc ! C'est gentiment dit, avec le sourire ... Je baisse les yeux sur mon café et entreprend d'y mélanger le sucre.

- Je sais, maman, je sais. Bon, qu'est-ce qu'elle t'a raconté ?

- Qu'elle te trouvait au moins aussi bien en fille qu'en garçon.

Je soupire. Ma main tremble, et je suis heureux qu'elle tourne le café, parce que ça se voit moins. Ca attaque fort ! Dans le jeu des questions/réponses, c'est mon tour. Je ne peux pas passer. A quoi ça servirait, hein ? Tout au fond de moi, je suis ravi de ce qui m'arrive, et on le sait tous.

- Bon, ben voilà. Qu'est-ce que tu veux que j'ajoute à ça ? Si elle le dit, c'est que c'est vrai.

- Regarde-moi, déjà, s'il te plaît Bruno. Pleure si t'as envie de pleurer, mais regarde-moi.

Elles me connaissent bien. Elle prennent les devants ! Je n'ai pas envie de pleurer, pas encore du moins. Je lève la tête, regarde maman, et la retrouve comme lors de mes grandes peines d'enfance, celles qui durent une éternité d'au moins deux heures. Rassurante, aimante, solide. Michou approche sa chaise de la mienne et me prend par le cou. Le lapin est fichu.

- Je ne sais pas quoi te dire, maman …

- Je me doute ! T'inquiète pas, je vais commencer. Tu es homo, mon Bruno. Je n'ai qu'un fils, et il est homo. Rien que pour ça, je t'aime encore plus. Un peu comme les parents d'enfants anormaux, tu comprends ?

Allô maman, bobo. L'image fait mal. Je me la prend en pleine face. Je quitte son regard pour ne pas le lui montrer. Même si je suis d'accord, c'est dur de m'identifier à l'enfant anormal. Je tente de me réfugier dans les mots, comme souvent quand je suis largué. Anormal, c'est ne pas être dans la norme. Depuis mon premier essayage de tunique mauve, je sais que je suis anormal. Ca n'a fait que croître. Mais qui peut affirmer que la norme a toujours le bon droit pour elle ? A cause du nombre ? Plus on est, moins on se trompe ? Quand des nations entières font la guerre, elles ne se trompent pas ? Ma mère reprend, identifiant définitivement à moi les enfants anormaux cités plus haut :

- On vous aimes plus que les autres, parce qu'on a envie de vous protéger. On fait tout pour vous rendre la vie agréable … Tu es anormal, mon Bruno, comme des millions d'autres homos dans le monde. Oh, c'est une bien petite anormalité, finalement, comparée aux enfants autistes ou mongoliens ! Toi, mon Bruno, t'es plutôt au dessus de la moyenne question intelligence, et plus encore question sensibilité !

Du coup, je relève la tête. Elle a une façon de m'amadouer qui me fait grand plaisir ! La flatterie est un puissant calmant.

- Mais il y a une chose que tu n'as sûrement pas comprise, mon chéri, poursuit-elle, contrairement à ta sœur. Elle, elle l'a devinée très vite, sans doute parce que c'est une fille, je suppose, et qu'un jour elle sera mère.

Elle laisse un silence, que je mets à profit pour prendre mon verre de café. Je n'aurais pas dû. Je tremble tellement qu'un quart du contenu passe par dessus bord, et je le repose vivement.

- Et merde ! je soupire en secouant puis léchant ma main échaudée. Michou se lève et apporte de quoi essuyer. Pendant ce temps, je n'ai rien dit, les yeux fixés sur le café renversé. Elle essuie, et ma mère reprend :

- Ta sœur, elle a su se mettre à ma place. Je ne te reproche pas de ne pas l'avoir fait, de même que je ne te reproche pas d'aimer les garçons au lieu des filles. En fait, il m'est impossible de te reprocher quoi que ce soit mon chéri. Tu sais pourquoi ?

Je ne sais pas pourquoi, mais je devine qu'on touche au but. Je lève le nez. Elle sourit, ma maman. Elle semble à l'aise, alors qu'elle me dit des trucs qui doivent la ronger depuis des années. Mon silence valant une réponse négative, elle me dit :

- Parce que si tu es comme ça, c'est ma faute. C'est moi qui t'ai fait comme ça.

- Qu'est-ce que tu racontes ? me décidé-je enfin. - T'as pas le droit de dire ça !

- Droit ou pas, tu sais mon chéri, ça change rien aux pensées et aux certitudes.

- Ouais, ben aux miennes non-plus, ça change rien. Et d'abord, quel rapport avec Michou ?

- Aucun, sinon qu'elle m'a comprise.

- Et quel rapport avec le fait qu'elle m'a habillé en fille ?

- Toi en fille et toi homo, mon chéri, c'est le même problème, non ? J'ai la même responsabilité.

- Je ne suis pas d'accord, maman ! D'abord, et papa ? Il a participé, non ? Tu m'as pas fait toute seule ?

- Non, sourit-elle, ton père partage la moitié de la responsabilité, c'est vrai ! Et comme il n'est plus là pour en parler, j'assume !

- Mais tu n'as rien à assumer ! Je ne suis toujours pas d'accord !

- T'énerve pas, p'tit frère, intervient Michou, me reprenant par le cou. - Bien sûr, que tu n'es pas d'accord. On est loin de la logique de tes ordinateurs, c'est sûr. Maman, elle ne te demande pas de comprendre, mais juste d'admettre. Soit gentil, admet … Tu es assez intelligent pour deviner ce que tu ne comprend pas.

- Bon, et même si j'admets, à quoi ça nous amène ?

- Oh, c'est simple, Bruno, continue maman. - Je t'aime assez fort pour être heureuse de te voir réaliser tes envies. Quelles qu'elles soient. Tu aimes Michel, lui il t'adore carrément, et ce que j'ai raté en toi du garçon ressort sous une forme de fille. En amour et en sentiments, tu es une fille, mon chéri. Si tu dois te réaliser dans un couple, ce sera comme une fille, et avec un garçon. Tu es comme ça parce que je t'ai fait comme ça, que tu sois d'accord ou pas. S'il te plaît, dit pas non, ergote pas. Pique une crise de larmes, si tu veux. Ca nous rassurerait plutôt !

Ces derniers mots ont l'effet inverse, et gomment mon envie de pleurer latente. Ma tension nerveuse s'estompe doucement.

- D'accord, maman. Je suis homo, Michel et moi on s'aime, et je suis mieux en fille qu'en garçon. Et tout ça, c'est ta faute, rien que ta faute. Et si je comprend bien, tu acceptes officiellement que je mette les affaires de Michou. Bon, bien, ok ! A part ce dernier point encore jamais abordé, explique moi ce que veux dire cette discussion ?

- Déjà, sur le dernier point, je ne suis pas d'accord, justement. Je préférerais que tu laisses les affaires à ta sœur tranquilles.

- Tu sais maman, avoué-je, je te comprend. Même si tu m'aimes beaucoup, me voir en fille, ça doit te décevoir trop, ça doit coincer quelque part. Papa, tu m'as raconté qu'il …

- Tu comprends rien du tout, Bruno. Si je veux que tu laisses les affaires à ta sœur, c'est que tu auras les tiennes, tout bêtement. J'aimerais que là aussi tu restes … indépendant. Et Michou également. Je veux que mes deux filles gardent leur personnalité.

- Maman … Tu va jusque là ? C'est vrai ? C'est vraiment vrai ?

- Oui mon chéri.

- Oh, maman !

Je me précipite vers elle et l'embrasse très fort. Je pleure un peu, comme prévu, mais pas la crise annoncée. Je ne sais plus quoi dire pour expliquer mon bonheur. Michou vient se mêler à l'embrassade, et en reçoit sa part.

Puis on se calme. Je suis heureux, follement heureux. Ma mère m'accepte en fille, comme sa fille ! Je deviens la vraie p'tite sœur de Michou ! C'est l'acceptation de ma mère, bien plus que ce qu'elle a accepté, qui me transporte de joie. Elle aussi semble heureuse. Elle m'explique :

- J'ai eue envie de te découvrir comme ma fille, et de t'aider comme j'ai aidé Michou. A partir du moment où j'ai admit ta féminité, ça a été immédiat !

Elle se marre, maman, elle est plus jeune de vingt ans. Elle m'ébouriffe les cheveux.

- Pis les autres, ben on s'en fout ! Je veux profiter de ma fille, de ma Sabine.

Je savais bien, qu'elle allait le dire. Sabine, dans la bouche de maman, ça devient merveilleux. Sabine, c'est moi, Sabine, la poupée à Michou …

- C'est Michou qui a choisi Sabine, maman. Ca te plaît, comme prénom ?

- Oui. Ca te va bien. Mais on n'a pas terminé, tout à l'heure, mon chéri. Même si je sais que je te fais plaisir, même si tu es très heureux en ce moment, moi j'ai besoin que tu me pardonnes.

- Te pardonner quoi ?

- D'être comme tu es. Comme je t'ai fait.

- Ah non, maman, remet pas ça, quoi ! Tu te rends compte de ce que tu me donnes en ce moment ? De ce que je te dois ?

- Tu me dois d'être homo, Bruno. Tu me dois d'être anormal et d'aimer t'habiller en fille. C'est ça que Michou a compris et pas toi. J'accepte tes remerciements, mais je te demande ton pardon en retour. Ta vie d'homo ne sera pas toujours aussi rose, tu sais. Ni ta vie de travesti. Un jour, peut-être, tu me maudiras de t'avoir fait ainsi.

- Te maudire … Je sais plus quoi dire, moi ! Tu te sens réellement responsable ?

- Oui mon Bruno. Réfléchi, et dis-moi si oui ou non tu …

- T'as pas vraiment besoin de mon pardon. Tu veux juste être sûre que j'ai compris ce que tu ressens.

- Ca ne me donne pas ta réponse.

- Tu la connais déjà. Je te pardonne, maman. Devant Michou, je te pardonne. Pour moi, tu n'es responsable de rien. Et même si tu l'étais, ce que tu fais là … Je t'adore, petite maman !

- Sincère sur ces deux points, mon chéri ? Vraiment sincère ?

- Tu le sais bien, maman. Je t'aime.

- Alors je suis heureuse. Et je ferai tout pour te rendre heureux. Enfin, heureuse, Sabine. Bon, il est à peine 17 heures, on va choisir ta tenue ?

J'éclate de rire. Elle a l'air si excitée ! Je peux finir mon café serein : ma main ne tremble plus.


Responsable du site : Lucie Sobek


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