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« Rencontres du type intermédiaire 1 », une petite histoire imaginée par micheleanne

1 Rencontres du type intermédiaire 1 jeanne tvq@femmes.net 29-10-2004, 15:31 Par Michèle Anne Roncières



A Isabelle, qui connaît bien les extra-terrestres...




Première Partie.

La jeune journaliste mit son magnétophone portatif en position d'enregistrement et se cala dans son fauteuil, la mine renfrognée. Cette interview d'une ancienne gloire du transformisme, depuis longtemps à la retraite, lui avait été imposée par son rédacteur en chef pour qu'elle se fasse les dents, elle qui ne rêvait que de recueillir les confidences des grands de ce monde et de connaître ainsi la gloire qui la conduirait peut-être un jour à la présentation d'un journal télévisé... Mais une stagiaire à Paris-Flash ne pouvait certainement pas placer trop haut la barre de ses prétentions...
-"Alors, " aboya-t'elle. "Comment êtes-vous devenu... Comment avez-vous commencé ?"
Elle éprouvait de la gêne, peut-être même une certaine répugnance, et en tout cas un mépris qu'elle avait peine à dissimuler, pour la personne qui se tenait en face d'elle, les cheveux gris, un peu courbée par l'âge, et qui sourit en appelant sa mémoire, sûre de son effet:
-"Eh bien... à la suite d'une aventure peu ordinaire, et qui avait commencé à la devanture d'un magasin.... Oui, cela avait été plus fort que moi, comme d'habitude: nous ne devrions jamais regarder les vitrines, nous autres, pour qui elles ne sont pas faites ! Mais il se trouvait là un si joli tailleur que j'en avais oublié toutes mes craintes, tous mes complexes: j'étais aussitôt entré dans la boutique, pour l'acheter comme en cadeau à la femme que j'aimais..."
Elle baissa la voix et ajouté, comme en confidence:
"Après tout, personne ne pouvait savoir que cette bien-aimée n'était autre que moi-même !"
La journaliste détourna la tête, pensant qu'il allait lui falloir endurer un récit mille fois plus stupide qu'elle ne l'avait craint... Pourquoi tous ces pervers n'étaient-ils pas dans les hôpitaux psychiatriques ? Sans faire signe de rien, l'autre poursuivait:
"Je n'ai pas pu résister, que voulez-vous... Il faut dire que je m'étais tenu tranquille pendant des années, après le scandale qui m'avait valu d'être renvoyé de l'Université: dans l'ivresse de disposer d'une petite chambre d'étudiant, et après la longue période où j'avais dû cacher, dans les recoins les plus inaccessibles de la maison de mes parents, des affaires de filles "récupérées" un peu partout. J'y avais placé tous mes trésors en vêtements, bijoux chaussures... Je n'avais pu tout faire rentrer dans les petites armoires réglementaires et, ce qui me laissait l'avantage de caresser ces richesses du regard, j'étais dans l'obligation de laisser mes chemisiers sur les dossiers des chaises, des robes et des jupes sur les portes des armoires, des produits de maquillage sur la tablette du lavabo, et pas mal de lingerie sur le dessus de mon lit... Bref, il y en avait partout !"

La journaliste restait le visage fermé et le regard absent. Dire que ce malade avait été, cinquante ans plus tôt et sous le nom de scène d'Anna Bernard, la coqueluche de toutes les capitales du monde ! C'était à n'y pas croire, le mauvais goût des gens... Mais lui continuait son histoire, sans se troubler, comme s'il avait été le héros d'un exploit:
"La dénonciation intervint environ quinze jours après la Rentrée: une femme de ménage dont j'ignorais qu'elle allait intervenir chez moi... Munie du passe qu'exigeait son office, elle resta bouche bée devant ce qui s'offrait à sa vue, et dont elle déduisit promptement que je partageais ma chambrette, de manière on ne pouvait plus illicite, avec une étudiante...
On ne badinait pas avec les moeurs, en ce temps là !

Convoqué devant divers organismes de discipline, je fus pressé de donner le nom de ma partenaire de péché, ce qui m'était évidemment impossible... Et le fait est que, au lieu de me cantonner dans l'attitude fière de l'homme qui refuse de compromettre sa compagne (dût-elle ne point exister), attitude qui m'aurait valu, outre un blâme, un brevet d'héroïsme et une auréole de séducteur, je craquai sous les menaces scandalisées des pontifes locaux, et j'avouai que tout ce linge était le mien. Tandis que mon histoire faisait le tour du campus, je fus mis à la porte avec un dégoût bien senti. Toute la résidence semblait s'être donnée rendez-vous pour me voir déménager, avec mes dix valises pleines, et je quittai les lieux en fendant péniblement la foule hostile, sous les insultes des garçons et les ricanements des filles."

-"Mais quel est le rapport avec le... le métier que vous avez exercé ensuite ?", interrompit la journaliste, impatientée.
-"Vous allez voir: Vous comprendrez que j'aie mis du temps à me remettre de cette avanie, même si mon identité secrète était restée intacte au fond de moi: ayant pu reprendre mes études, difficilement et par correspondance, j'avais préféré me concentrer sur celles-ci plutôt que de la laisser s'exprimer à nouveau. Et précisément, une fois mes diplômes d'informatique obtenus, mon esprit et mon âme, comme libérés de la prison où je les avais maintenus huit ans, s'étaient aussitôt remis à vagabonder allègrement du côté de leurs anciens démons... qui avaient triomphé, et définitivement, cette fois, au moment précis où j'avais levé les yeux sur le fameux tailleur dont je vous ai parlé au début. Ah, qu'il était beau... gris clair; très bien coupé, un petit liseré noir... Je le revois encore... Je revois la vendeuse le plier avec soin dans son carton, alors que ma seule hâte était de l'en sortir ! Une fois celui-ci dans la voiture, je me laissai complètement emporter par mon enthousiasme et ma vieille passion: je consacrai le reste de la journée à faire les boutiques... Le plus long fut de reconstituer mon stock de produits de maquillage, qui avait fort souffert des outrages du temps et était inutilisable. Et puis j'avais envie de choses neuves, comme pour un nouveau départ... Je ne croyais pas si bien dire !

Le soir venu, je m'étais soigneusement apprêtée, pour retrouver mon apparence d'autrefois... constatant, hélas, et avec un peu d'amertume, que je n'étais plus dans le miroir cette adolescente androgyne au teint doux que j'avais cachée à mes parents, chaque nuit qu'elle naissait: il me fallait désormais compter sur les fards et non plus sur la jeunesse... Mais quand je plaçai la perruque acquise dans l'après-midi avec force subterfuges chez un coiffeur qui en avait vu d'autres, je me consolai en voyant que je faisais quand même une jeune femme très acceptable. M'étant regardée dans la grande glace du salon, où je n'étais jamais apparue encore, et dans lequel je me contemplai avec délices, portant enfin mon tailleur et mes bijoux assortis, je pris instinctivement la résolution bizzarre de ne plus jamais me laisser maltraiter par la bêtise des conventions sociales.

C'était comme si j'étais devenue une autre; et c'est absolument sûre de moi que je quittai l'appartement, sans avoir le moins du monde prémédité ma sortie, pour aller faire un tour en voiture. Je n'avais pas de destination précise: j'aurais pu aller au cinéma, mais la perspective de rester deux heures dans le noir, chose que j'aurais pu tout aussi bien faire en homme, ne me séduisait guère... Aller au restaurant ne m'attirait pas non plus, étant trop excitée par mon courage tout neuf pour pouvoir rien avaler. Je m'aperçus que j'ignorais tout des endroits nocturnes où les gens "normaux" prennent plaisir à sortir et à se retrouver. A trente ans passés, c'était bien tard, et j'en fus brusquement profondément dépitée. En fait, pensai-je, je n'avais même pas d'amis avec qui partager quoi que ce fût. Dans la circulation, personne ne faisait attention à moi, même aux feux rouges: les hommes pressés de rentrer chez eux n'avaient d'yeux que pour les signaux. J'aurais tout aussi bien pu rentrer chez moi! Je décidai de quitter la ville et m'engageai sur les routes de campagne. Il était déjà tard, et j'y étais seule, mes phares éclairant les bas-côtés comme des fantasmagories changeantes, avec les longues herbes ou des nuées d'insectes pris dans leur lumière. Mais soudain, mes phares s'éteignirent, et le ronronnement du moteur s'arrêta.

(à suivre)


Responsable du site : Lucie Sobek


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