barcarena9@gmail.com
inforbart@gmail.com
malucao2017@outlook.com.br
isacczim@ig.com.br



Je me connecte  Hop !
J'ai perdu le mot de passe  Hop !
S'inscrire comme membre du site  Hop !

HOMMEFLEUR, le site pour les hommes qui aiment les femmes, au point de vouloir leur ressembler !

« La COLONELLE / chapitre 13 / LE RECASAGE », une petite histoire imaginée par marietherese

1 La COLONELLE / chapitre 13 / LE RECASAGE marie therese marietheresekoest@yahoo.fr 22-05-2007, 6:08

Six mois avant la fin du service militaire d'Anne, la colonelle avait une conversation très sérieuse avec celle-ci. Elle voulait lui parler de son avenir. Il était temps d'arrêter les bains de boue et les tisanes, et d'entamer un autre traitement destiné à tout remodifier, à tout remettre dans l'état initial. La colonelle décrivait à Anne d'un ton apitoyé ce qui allait lui arriver.

La jolie et élégante Anne allait disparaître un peu chaque jour. Ses traits allaient se marquer. Ses mains, ses jambes, ses bras et ses attaches allaient se fortifier. Ses manières allaient se modifier. Elle allait se mettre à invectiver son entourage, manifester son impatience, parler haut, interrompre ceux qui parlaient, crier sans raison et taper sur la table à l'occasion. Sa grâce, son élégance, son sens du raffinement et de la beauté qui se manifestaient actuellement dans son habillement et sa façon de se déplacer ou de rester immobile, allait faire place à de la désinvolture qui friserait même parfois la vulgarité. Le doux murmure de sa voix douce, le son de sa voix cristalline, si propice aux grands airs d'opéra qu'elle chante si bien aujourd'hui, allaient se transformer en une voix rauque et basse, propice aux exclamations, aux plaisanteries douteuses et au rire gras.
Et puis, surtout, tout ce que les précieuses boues et les tisanes avaient si bien mis en ordre, allaient retrouver leur désordre initial.

Bientôt, elle ne pourrait plus rentrer dans ses vêtements, même en forçant sur les lacets des corsets. Elle devrait mettre des vêtements qui convenaient mieux à la stature plus massive de Cécile, qui serait bientôt la sienne. Dans quelques mois, elle n'aurait plus ni le goût ni l'envie de porter ce genre de vêtements là, mais voudrait porter des vêtements de garçons. Elle devrait bientôt s'entraîner à porter le curieux uniforme de soldat artilleur qui lui irait si mal.

La colonelle évoquait ensuite, d'une voix serrée par l'émotion, les cheveux d'Anne. Les caressant du dos de sa main, elle en vantait la douceur, la finesse, la blondeur, le bouclage, la longueur, l'allure lumineuse et merveilleuse qu'ils donnaient au fin visage d'Anne. Ces cheveux, sans soins appropriés, allaient devenir gras, noirs et épais, et surtout il faudrait les couper. Quel désastre ! Elle décrivait avec émotion la scène où Cécile, après un pareil carnage, était restée de longues heures immobile, debout, le balai à la main, à côté du tas de cheveux, sans pouvoir le balayer.

Ecoutant cette navrante description, cet effrayant retour à la vie précédente, cet angoissant voyage, ces dramatiques retransformations, cette perte d'une partie si importante de sa personnalité nouvelle, Anne, tremblante d'émotion, chavirait des yeux, posait une main tremblante sur la main de sa tante et l'autre sur son cœur, et balbutiait :
"Oh non ! Oh non ma tante! N'y a t il pas moyen d'empêcher tout cela, ne puis-je rester telle que je suis maintenant, telle que je suis vraiment ? "
La colonelle écoutait ces supplications avec un sourire tendre et réconfortant. Elle prenait les mains d'Anne en lui disant :
"Ma chérie, n'aie pas peur, si tel est ton désir, bien sûr, je vais empêcher l'arrivée de cette cascade de malheurs."
La prenant affectueusement dans ses bras, elle lui murmurait à l'oreille :
"Ta tante va s'occuper de ton bonheur."
Elle lui expliquait alors, qu'en bonne tante prévoyante, elle avait pris des dispositions pour qu'Anne puisse rester Anne.

Bien sûr, elle devait d'abord mourir. La colonelle tenait, en disant cela, ses mains aux doigts écartés juste au-dessus de ses genoux, en signe d'apaisement. Anne devait en effet ne pas s'effrayer car il ne s'agissait que de faire mourir administrativement le jeune homme entré au service militaire.

Anne étant sans famille proche, cela se passait habituellement sans problème. La colonelle n'avait qu'à remplir le formulaire adéquat et le soldat serait déclaré officiellement mort lors d'un exercice. Une explosion de poudre aurait volatilisé le corps, dont il ne restait que des débris d'uniforme qui seraient enterrés avec les honneurs militaires. Si la famille se montrait tatillonne, si elle posait des questions, la colonelle la faisait taire en décernant une médaille à titre posthume, accompagnée d'une petite rente et du restant de la solde non perçue.
Si d'autres papiers étaient nécessaires, la colonelle en faisait son affaire. Elle connaissait assez de personnages haut placés dans l'administration militaire, qui n'avaient rien à lui refuser.
Elle faisait alors à Anne diverses propositions concernant sa vie future, sa vie de femme.

Le mariage était envisageable, mais délicat à réaliser. Il offrait l'avantage de la sécurité. La colonelle préférait un mariage avec un militaire. Elle connaissait bien ce milieu et pouvait y faire jouer ses relations. Elle s'était arrangée pour que le colonel soit désigné comme président de la commission qui autorisait, après examen approfondi de leur provenance et ressources, les demoiselles candidates au mariage, à épouser un officier. La partie délicate de la proposition était que le militaire voudrait peut être obtenir d'Anne des choses qu'elle serait bien en peine de lui donner, du moins sous la forme habituelle.
Il fallait alors biaiser et trouver une échappatoire.

La situation de maîtresse avait lui aussi des côtés intéressants et d'autres qui l'étaient moins. La colonelle avait dans ses relations quelques militaires de haut rang, qui appréciaient la compagnie de jolies jeunes femmes, qui avaient les moyens financiers appropriés à l'entretien d'une maîtresse de haut niveau, et dont le nom et les aveux se trouvaient dans le carnet noir de la colonelle. La proposition était attrayante pour Anne qui aimait les belles toilettes, les appartements donnant sur le parc, les bijoux de prix, les promenades en calèche, les sorties à l'opéra, les séjours dans les villes d'eau ou à la côte, les hôtels de grand luxe. La colonelle laissait entrevoir aussi que certains devoirs répétitifs et lassants auxquels les femmes mariées étaient tenues de participer, se transformaient pour les maîtresses en petites folies bien amusantes et agréables, pleines de découvertes nouvelles.

L'ennui c'était la sécurité d'emploi. Si le monsieur venait à se lasser ou à disparaître, tout était perdu, tout était à recommencer. Il convenait de gérer habilement la succession. Il était prudent d'établir une liste d'attente et de garder un contact amical avec les prétendants inscrits sur la liste afin de les maintenir dans un climat d'espérance.

Se faire engager par Julie était bien tentant, surtout si Anne avait des dispositions pour la danse, le chant ou les plaisirs subtils et variés de la réparation d'uniformes.

L'idée de passer ses journées dans cet endroit magique, où elle pourrait à loisir frôler les étoffes les plus fines, caresser des peaux à peine recouvertes, voir des corps quelconques embellis et magnifiés par de savants accessoires, l'idée de travailler pour Eugénie, de pouvoir lui parler sans dire de mots, et plus tard grâce au soutien financier de la colonelle, reprendre à son compte son magasin de lingerie, plaisait aussi beaucoup à Anne.

La colonelle proposait aussi des situations plus calmes. Elle connaissait plusieurs officiers dont une tante, une sœur, ou une proche parente cherchait à engager une dame de compagnie. Les Annes de la colonelle étaient reconnues comme des dames de compagnie d'excellent niveau et étaient recherchées. Il était aisé de choisir parmi ces personnes celle dont la situation financière, la qualité de la résidence principale et l'agrément des résidences secondaires convenait le mieux au tempérament d'Anne.
Avec tact et bon sens, la colonelle faisait remarquer à Anne qu'elle pouvait très bien combiner les avantages et aspects pratiques de la situation de dame de compagnie de la parente d'un officier avec celle de maîtresse de ce même officier.

Peu d'Annes faisaient le choix de retourner vers leur ancienne vie. La plupart d'entre elles préféraient choisir une des propositions de leur tante.

La colonelle était une femme intelligente. Elle savait qu'elle ne savait pas tout. En fin de parcours, juste avant le recasage, elle avait une longue conversation avec sa nièce. Elle voulait savoir ce qu'elle pensait de son séjour dans son unité, ce qui lui avait plu, là où les efforts avaient étés trop importants, là où elle avait ressenti de la gène, les situations où elle avait eu de la peine, là où elle estimait que la colonelle devait améliorer les choses.

Après cette conversation, la colonelle prenait son grand livre bleu.

Elle choisissait une nouvelle double page. De sa belle écriture, elle écrivait "Anne" en haut de la page de gauche. Elle indiquait les dates de début et de fin de notre service dans son unité. Etant devenues des jeunes femmes accomplies, nous pouvions, notre tour venu, compléter le grand livre bleu d'Anne, le grand livre de la petite fille qui gambadait dans les prés, le livre de celle qui n'était jamais devenue une jeune femme. Nous pouvions lui laisser quelques-uns de nos petits trésors que la colonelle allait y fixer.


Responsable du site : Lucie Sobek


Avis de lecteurs - note moyenne : 0
Merci de donner une petite note sur ce texte :
j'ai aimé...

1 Pas du tout
2 Un peu
3 Beaucoup
4 Passionnément
5 A la folie
Accès via la version smartphone - Contacter le webmestre