barcarena9@gmail.com
inforbart@gmail.com
malucao2017@outlook.com.br
isacczim@ig.com.br



Je me connecte  Hop !
J'ai perdu le mot de passe  Hop !
S'inscrire comme membre du site  Hop !

HOMMEFLEUR, le site pour les hommes qui aiment les femmes, au point de vouloir leur ressembler !

« SON ET LUMIERE », une petite histoire imaginée par marietherese

1 SON ET LUMIERE marie therese marietheresekoest@yahoo.fr 30-01-2006, 9:46

J’ai beaucoup travaillé cette année, j’ai eu de la chance aussi. Je suis passé en première session. J’avais presque trois mois de vacances devant moi et je comptais bien en profiter.
J’ai téléphoné à ma tante pour lui annoncer la bonne nouvelle.

Ma tante habite le pays de la Loire, dans la région des châteaux. Je ne la voyais pas souvent, mais nous nous aimions bien. Elle avait un caractère très agréable. Elle était bien plus douce que ma mère. Elle était veuve et n’avait pas eu d’enfants. Elle avait reporté son affection sur ses neveux.
Elle m’avait proposé de venir passer l’été chez elle. Cela lui ferait de la compagnie.
Elle habitait une sympathique petite maison dans un village tranquille. Elle travaillait dans un écomusée qui mettait en valeur les anciens métiers du pays de la Loire.

Elle n’avait pas beaucoup d’argent, moi non plus. Nous avions convenu qu’il me faudrait travailler pendant mes vacances chez elle afin de subvenir à mes besoins. Elle avait déjà prospecté à mon intention les travaux de vacances proposés aux étudiants. Bien avant le début de mes examens elle m’avait annoncé qu’elle avait trouvé quelque chose d’intéressant. Elle ne m’avait pas précisé de quoi il s’agissait. Elle m’avait simplement dit que je ne devrais pas me lever tôt, ce qui m'arrangeait bien, et que je devais laisser pousser mes cheveux, ce qui m'arrangeait aussi.
Elle fut très heureuse d’apprendre mon succès à mes examens et ma venue chez elle.

J‘ai fait le voyage en train, et puis en autocar.
Lorsque l’autocar s’est arrêté, sur la place du village, elle est sortie de son musée. Elle m’a aperçu et m’a fait un signe joyeux de la main.
Elle a vu mes cheveux qui m’arrivaient un peu en dessous des épaules et m’a dit que cela m'allait bien.
Elle m’a emmené dans son musée. Il y faisait tranquille. Elle s’assit à son bureau, près de l’entrée. Elle me fit asseoir à côté d’elle.
Nous avons bavardé. Après un temps, elle a désigné une des splendides affiches épinglées au mur. Il vantait le spectacle de « SON ET LUMIERE » donné chaque soir au château voisin.
"C’est là que tu vas aller t’amuser chaque soir de cet été, monsieur le mousquetaire." Me dit-elle.
Elle me remit une lettre de recommandation pour monsieur Charles, le responsable du spectacle. Elle l'avait déjà rencontré lors de diverses réunions de concertation touristique tenues dans la région.
En me tendant la lettre, elle a eu un fin sourire intérieur, et ses yeux ont glissé vers le côté. D'un geste lent, elle a fait glisser une mèche de cheveux derrière son oreille.
Elle avait déjà parlé de moi à monsieur Charles. Elle lui avait encore téléphoné la veille et il avait proposé de me voir le lendemain en début d'après midi.

Le lendemain je me suis rendu à A. en autobus. Le château imposant dominait la ville.

J'ai trouvé facilement monsieur Charles, il était partout. Je m'attendais un peu à rencontrer un responsable de spectacle nerveux et agité. Monsieur Charles était tout le contraire. C'était son regard qui frappait en premier. Il avait un regard positif, observateur et qui communiquait un enthousiasme calme, agréable et plein de chaleur.

J'appris assez vite que monsieur Charles aidait à résoudre les différents problèmes qui se posaient chaque jour. Il était un catalyseur. Il se promenait de son pas précis et élégant dans tout le château. Il se rendait toujours quelque part, mais on pouvait l'arrêter à tout moment pour lui demander quelque chose. Souvent il avait une réponse rapide et claire. Si ce n'était pas le cas, il avait l'art de vous regarder intensément, de vous scruter amicalement et d'attendre une suggestion. Dès que vous osiez lui en proposer une, il plissait les yeux et d'un signe de tête donnait son opinion. Très souvent il approuvait les idées proposées. La solution devenait une chose convenue, scellée, et les deux parties allaient se battre pour la mettre en œuvre.
Il avait l'art de montrer sa satisfaction sous des formes diverses. Ses sourires et ses "Bien!", prononcés de sa voix grave et chaude, étaient recherchés et appréciés.
Monsieur Charles se dépensait calmement, sans compter son temps. Mais il détestait perdre ce temps en parlottes inutiles.

Je lui dis en deux mots qui j'étais, ce que je voulais faire. Il m'observait en plissant les yeux.
Je lui dis qui m'envoyait vers lui et lui tendis la lettre.
Il l'a prise des deux mains, en marquant un petit temps d'arrêt, le temps de laisser passer un souvenir derrière ses yeux. Il avait légèrement penché la tête et levé son sourcil gauche.

J'ai aimé de suite le monde du spectacle.

J'ai aimé à m'habiller en mousquetaire. La costumière était une excellente professionnelle. D'un seul coup d'œil, elle m'avait jaugé. Elle m'a fourni tous les éléments de mon costume. C'était formidable de me transformer devant le miroir et de devenir ce personnage légendaire. J'avais bien fait de laisser pousser mes cheveux. Une jeune coiffeuse s'occupa de les mettre en valeur. Elle me dit que ce serait bien plus pratique pour moi. Elle me décrit en riant quelques mésaventures arrivées à des figurants ayant perdu leur perruque au beau milieu d'un combat frénétique.

J'ai aimé les répétitions. Elles étaient joyeuses, on s'y amusait bien.

J'ai aimé les séances d'habillage dans les vestiaires. Deux grandes salles communicantes y étaient consacrées. Nous nous entraidions entre camarades pendant les phases difficiles de l'habillage. Nous devions rester dans notre salle, mais nous étions attirés par l'autre, celle des jeunes femmes. Là l'ambiance était différente, les sons et les couleurs avaient d'autres tonalités. Nous attendions, debout devant la grande porte, ravis par cette vision et ce brouhaha. Parfois, lorsque le temps pressait, quelques jeunes gens étaient admis à pénétrer dans la salle afin d'aider dans l'ajustage de quelque détail les demoiselles s'étant mises en retard. Mes manières douces, mon absence de brutalité ou de vulgarité me faisaient souvent désigner pour ces tâches délicates.

J'ai aimé l'ambiance un peu tendue, juste avant le spectacle.

J'ai aimé participer au spectacle. Je n'avais qu'un petit rôle, mais il me plaisait bien. J'étais un petit rouage d'une grande machine.

J'ai aimé, entre deux apparitions sur scène, me faufiler derrière les gradins et voir la scène telle que les spectateurs la voyaient.

J'ai aimé, à d'autres de ces moments, rester en coulisse et observer de près le jeu des acteurs.

J'ai aimé voir de près la scène du roi qui caresse et embrasse une courtisane, derrière la reine, qui semble ne se douter de rien. De loin cela fait illusion, mais de près je voyais Marianne qui ne se laissait pas faire. Elle faisait le geste d’attirer le roi contre elle, mais en fait plaçait ses coudes et ses bras devant sa poitrine et maintenait fermement le roi à bonne distance. Le roi tendait le cou et parvenait juste à effleurer ses lèvres. Il tentait de s'agripper là où il le pouvait, mais sans succès. Ses tentatives, vues de loin, passaient pour les caresses d'un amant habité par une passion violente. Leurs mouvements désordonnés faisaient penser à la foule que des baisers enflammés étaient échangés.

J'ai aimé le final. Tous les acteurs étaient alors en scène. Le présentateur, aidé par les effets de lumière les mettait en valeur à tour de rôle. On rejouait alors des extraits des scènes importantes. Les mousquetaires esquissaient un dernier combat spectaculaire et puis saluaient avec ensemble la foule admirative. Ils faisaient un "cercle", c'est à dire qu'ils formaient un cercle, s'élançaient avec ensemble vers l'intérieur de celui-ci, retombaient en faisant claquer leur lourde bottes sur le plancher en bois, et l'instant d'après faisaient cliqueter en les entremêlant toutes leurs épées.

J'ai aimé sortir du château juste après les spectateurs. Nous allions en groupe nous montrer aux badauds. Il y avait beaucoup de monde sur la place, dans les rues piétonnes. Les spectateurs, ravis par le magnifique spectacle que nous leur avions proposé, s'attardaient autour du château. Notre passage dans la foule, nos grands mouvements, notre langage particulier, nos scènes de combat nous valaient un franc succès. Notre groupe de mousquetaires attirait les regards des jeunes filles et des dames. J'aimais ce genre de compliment mais je me rendais bien compte que j'en recevais uniquement car je faisais partie du groupe. Lorsque j'étais isolé pour une raison quelconque, l'enthousiasme de ces demoiselles faiblissait rapidement.

La rencontre de deux groupes était très amusante pour nous mais également pour les badauds. S'il s'agissait d'un autre groupe de jeunes gens, nous mimions des scènes de combat, afin de les mettre hors d'état de rechercher la tendre compagnie des douces demoiselles. Si le combat était trop inégal, nous pouvions conclure une alliance temporaire afin de mieux combattre un autre groupe plus puissant. Les demoiselles prenaient, au grand plaisir des badauds, des mines effarouchées et encourageaient les combattants en leur faisant des promesses solennelles de fidélité éternelle. L'issue de ces combats était parfois marquée par un évanouissement. Le clou du spectacle était alors la réanimation d'une frêle jeune fille à l'aide de baisers enflammés. Ses compagnes l'installaient allongée sur un muret ou sur une table de café. Les compagnons entouraient le prince charmant et sauveur, scandaient ses efforts et les commentaient avec verve pour le plus grand plaisir des badauds. Il fallait parfois en ranimer plusieurs afin de satisfaire le public exigeant.
Marianne s'arrangeait toujours pour se dérober à cette coutume. Ses compagnes la taquinaient à ce sujet, lui faisant des plaisanteries au sujet du roi et de ses baisers fougueux.
Moi je n'étais jamais désigné pour jouer le rôle du prince charmant, et cela m'arrangeait plutôt bien.

Monsieur Charles approuvait ces jeux, car ils impliquaient les spectateurs et faisaient de la publicité pour le spectacle. Parfois même il nous accompagnait. Il déambulait dans la foule et y glanait des impressions ou des commentaires de spectateurs. Les mousquetaires lui rendaient alors hommage à leur façon: nous l'entourions et faisions alors un "cercle" autour de lui. L'entrechoquement de nos épées au-dessus de sa tête le ravissait.

Parmi la foule, j'aimais à regarder Marianne. Je la trouvais très jolie. Elle avait un physique de bohémienne. Elle avait parfois un comportement un peu brusque. Elle n'était pas toujours très féminine, mais j'aimais la regarder. Lorsque l'un ou l'autre risquait une plaisanterie au sujet de son comportement avec le roi, elle ne se laissait pas faire. Elle répondait d'une façon cinglante. Son regard métallique refroidissait les plus hardis.

J'ai aimé me rendre dans les vestiaires pendant la représentation. A tout hasard je préparais un prétexte et le rendais vraisemblable par un détail de mon costume à rectifier. Souvent il n'y avait personne. J'en profitais alors pour me tromper de vestiaire.
Au début je me contentais de regarder.
Et puis j'ai touché, j'ai caressé ces splendides étoffes, ces merveilleux accessoires, ces troublants sous-vêtements.
Parfois j'allais plus loin encore.

Un soir, Marianne m'a vu tenant une jolie robe devant moi. Je me balançais doucement. Mes yeux étaient fixés sur le grand miroir. Ma grande excitation avait affaibli mes sens et je ne l'ai pas entendue entrer. Ce n'est que lorsqu'elle s'est placée à côté de moi, lorsque je l'ai vue elle aussi dans le miroir, que je ne me suis rendu compte de sa présence.
J'ai cru que tout était perdu. J'ai cru qu'elle allait tout raconter aux autres. J'ai cru que j'allais perdre mon rôle dans le spectacle, qui me plaisait tant.
J'ai jeté la robe sur le dossier d'une chaise et j'ai quitté précipitamment la pièce.

Un reste de lucidité, l'envie de participer une dernière fois à la fête, m'a fait jouer la fin de mon rôle une dernière fois. Le spectacle terminé, j'ai voulu descendre sur la place une dernière fois. Je m'attendais à tout moment à être pris à partie, à être montré du doigt, à entendre un vaste éclat de rire tonitruant et cruel. J'attendais cela et je m'y préparais avec courage. J'avais décidé de m'enfuir dès que les moqueries commenceraient. J'avais décidé de partir sans esprit de retour. Tant pis, je chercherais un autre travail de vacances.

Rien ne venait. J'ai même croisé l'une ou l'autre fois Marianne au détour d'une sarabande ou au hasard d'un mouvement de la foule des badauds. Elle n'a pas crié, elle ne m'a pas montré du doigt, elle ne m'a pas lancé à la volée une épithète que je redoutais. Elle aurait pu le faire mais elle ne le faisait pas. Elle semblait presque indifférente à ma présence. Elle ne me remarquait pas plus que d'habitude.

C'est à la fin de la soirée, juste au moment où nous prenions congé des derniers badauds, juste au moment où nous allions remonter vers notre château, que cela s'est passé. Presque comme par inadvertance, comme si elle voulait me dire une chose anodine, elle posa sa main sur mon avant-bras. De loin sa main semblait simplement posée, un peu comme si elle voulait simplement attirer mon attention. En fait elle serrait fermement mon avant-bras et me faisait comprendre que ce qu'elle allait me dire était important. Elle m'a lancé un regard métallique, a compris que j'étais fasciné, et que je ferais tout ce qu'elle allait me commander.
" Ma chérie, demain soir tu ne rentreras pas chez ta tante. Trouve un prétexte!"

Je n'ai pas dormi cette nuit là. J'ai cru désobéir, j'ai pensé m'éloigner et oublier tout cela. Mais chaque fois que je commençais à m'y décider, je revoyais le regard de ma bohémienne, je sentais l'éclat métallique de celui-ci, je sentais la pression de sa main sur mon avant-bras et mes belles résolutions volaient en éclats. Je voyais alors sur son visage apparaître un sourire étrange et je me sentais envahir par un trouble délicieux.

J'ai prévenu ma tante que nous allions fêter dignement un anniversaire après la représentation, et qu'elle ne devait pas m'attendre.
.
Après le spectacle, nous sommes sortis comme d'habitude.
Marianne ne me suivait pas, ne restait pas près de moi, mais de temps en temps, au travers de la foule qui s'amusait, je sentais son regard posé sur moi. Elle menait le jeu, je le savais, j'y consentais et j'aimais cela.
Elle n'était pas pressée. Nous sommes montés les derniers vers le château.
Nous avons monté lentement le large escalier. Nos vitesses étaient les mêmes, mais nos rythmes étaient différents. Je montais à contrecœur, sachant que quelque chose de grave allait m'arriver. Elle montait avec plaisir, sachant ce qu'elle allait m'imposer.
Arrivés dans le grand vestiaire des filles, elle m'a dirigé vers une partie où je n'étais pas encore venu, celle des douches.
Elle m'a dit sèchement : "Déshabille-toi !"
Je lui ai lancé un regard interrogatif.
Elle a accompagné son regard métallique d'un rapide froncement de sourcil.
Je me suis exécuté.
Entre-temps, elle avait préparé un petit appareil muni d'un ressort tordu dans tous les sens. Elle le mit en marche et l'approcha de mon avant-bras. J'entendis un petit bruit de tondeuse et vis disparaître mes poils. Elle me le tendit. Je devais le passer aux endroits qu'elle m'indiquait.
Elle contrôlait par après la douceur de ma peau.
D'un mouvement sec de la tête, elle me signifia qu'il était temps de me doucher.
Tandis que je me séchais, elle s'est éloignée et est revenue bientôt, les bras chargés de vêtements et d'accessoires.
Elle me regardait froidement, elle gardait ses distances.
Elle commença par me faire enfiler un sous-vêtement fort serrant. Il était difficile à enfiler. Elle m'indiqua de loin où tirer et comment le manœuvrer. Il était à la fois souple et ferme. Il faisait disparaître mes protubérances et m'imposait des courbes nouvelles.

Elle se rapprocha et continua mon habillage. Elle me tendait les pièces de mon habillement. Lorsque je n'en sortais pas tout seul assez rapidement, elle avait un soupir d'énervement et venait m'aider. Ses gestes étaient alors rapides et précis. Au fur et à mesure de l'avancement, elle se rapprochait davantage. Pour attirer mon attention sur un détail ou me donner une indication, elle me touchait parfois. Ce toucher était léger. Le début de son geste était ferme comme si elle voulait me forcer. Lorsque sa main arrivait près de moi, le geste s'adoucissait comme si je la fascinais. Il s'achevait en une douce caresse.
J'avais vu auparavant Marianne se maquiller. Elle le faisait rapidement, sans plaisir apparent, ajoutant simplement quelques touches de couleur à son beau visage.
Pour moi ce fut différent. Elle me maquillait en prenant son temps. Elle déposait sur mon visage les produits en choisissant longuement leur teinte. Elle en déposait une petite quantité et puis l'étalait par petites touches qui étaient autant de douces caresses.
Elle faisait glisser les crayons, elle déposait délicatement les poudres fines.

Elle s'interrompait parfois, se rapprochait et m'observait. Je sentais la pression, l'autorité qu'elle exerçait sur moi s'alléger. J'avais l'impression qu'elle était sur le point de succomber, mais je ne voyais pas bien à quoi. Je ne discernais pas la force, la puissance qui contrebalançait son énergique détermination habituelle. Au dernier instant, chaque fois elle se reprenait, se redressait brusquement et, presque avec un soupir, reprenait son ouvrage.

Elle s'est occupée ensuite de mes cheveux. Elle m'a fait un joli chignon laissant sur le côté deux longues mèches qu'elle a longuement bouclées grâce à un fer à friser. Elle a inséré dans ma coiffure toute une série de perles enfilées qui ajoutaient encore un peu de douceur, de rondeur féminine. Leur éclat s'harmonisait et complétait celui de mon regard adouci par le maquillage.
Je jetais des coups d'œil par moments dans les miroirs devant moi.
Tout à ma joie je regardais, me tournais, frôlais et caressais les étoffes, les rubans et les dentelles qui me couvraient.
Ces visions et ces contacts rapides éveillaient en moi un émoi nouveau et qui pourtant ne m'était pas inconnu. J'avais la curieuse impression d'être dans une situation, que je n'avais jamais vécue, mais qui m'était pourtant familière.

Ma sœur, ma sœur jumelle, celle dont on ne parlait jamais à la maison, celle que j'avais devinée, celle dont j'avais trouvé la trace dans de vieux papiers, celle qui avait vécu ses premiers jours avec moi, celle qui était partie beaucoup trop tôt, celle qui était dans mon cœur pour toujours, ma sœur était là devant moi.
Elle était là, telle qu'elle aurait pu être.
D'un regard, d'un sourire, elle me remerciait. Elle faisait glisser ses yeux, retenant son sourire en pinçant sa lèvre inférieure.

Lorsque je fus enfin habillé, Marianne se recula de quelques pas et examina le résultat.
Je voyais le plaisir de ma sœur, je sentais le mien aussi. Elle était éblouie d'être enfin là, elle était éblouie d'exister enfin. J'étais ébloui de la voir enfin.

Elle tendit la main vers ce reflet qui était elle, où elle existait enfin un peu. Elle voyait dans le miroir ce geste qui faisait mouvoir son corps et balancer sa robe. L'émotion fit retomber son bras qui glissa le long de la robe et caressa les étoffes et les dentelles. Elle dut fermer les yeux.
Reprenant son calme elle recommença ce petit jeu auquel elle avait pris goût.
Elle apprenait à bouger et à ne plus défaillir en se voyant bouger.
Elle faisait jouer ses mains et ses doigts gracieux dans la lumière.
Elle faisait glisser ses mains tout autour de sa taille. Elle caressait du bout de ses doigts les courbes de son visage et faisait caresser le dos de ses mains par ses cheveux et par les perles.
Elle aimait à vérifier sa coiffure du bout des doigts.
Elle apprenait à se regarder droit dans les yeux et à me sourire. Elle me transmettait ainsi sa joie.

Le roi est entré majestueusement dans le vestiaire.
La courtisane s'est tournée vers lui, impressionnée. D'instinct elle a baissé les yeux et a exécuté une charmante révérence.
Le roi a examiné la courtisane. Il s'est approché. Elle lui a plu. Il lui a souri, elle est restée figée, n'osant pas lui répondre.
Le roi a tendu sa main, doigts vers le haut. Sa main était ouverte, en un geste d'appel.
Lentement, elle a levé son bras. Elle a tendu sa main, doigts vers le bas, en un geste d'acceptation.
Il a levé un peu sa main. Elle a baissé un peu la sienne. Les bouts de leurs doigts se sont réunis.
Il a reculé légèrement, tendant le bras. La légère tension au bout de ses doigts lui servant de guide, elle a avancé.
Il a guidé la courtisane à travers les couloirs et les escaliers.
Ils sont arrivés sur la scène.

Tout seuls, sans projecteurs, sous la faible lumière de la lune, ils ont joué la scène du roi et de la courtisane. La courtisane a accepté l'hommage du roi. Le roi, ce soir là, a enfin pu caresser la courtisane. Cette fois-ci de vrais baisers furent échangés. La courtisane a eu cette fois-ci le geste d'attirer le roi contre elle. Elle a aussi eu ce geste charmant d'abandon, plaçant ses bras autour du cou du roi, lui caressant les cheveux, tout en soupirant pour bien lui montrer le plaisir qu'elle prenait à la chose, le plaisir que le roi lui donnait.
Le roi, par son ardeur, par ses assauts répétés, par ses yeux ravis, lui montrait son plaisir, le plaisir qu'elle lui offrait.

Chaque année, nous passons nos vacances en Loire.
Nous logeons dans la grande et vieille maison de monsieur Charles, au pied du château.
Il y habite avec ma tante. Il a trouvé le temps de se laisser apprivoiser par elle.
Marianne et moi allons voir tous les soirs le spectacle "SON ET LUMIERE". Nous nous plaçons tout en haut des gradins.
Pendant la scène du roi et de la courtisane, nous ne regardons pas ce qui se passe sur les tréteaux, ni autour de nous. Nous la revivons à nous deux.

Après le spectacle nous restons encore longtemps sur la place. Nous nous promenons dans la foule, parmi les badauds. Nous aimons cette atmosphère plaisante et détendue.

Nous aimons regarder les spectaculaires combats de mousquetaires. Marianne se serre alors tout contre moi. Lorsqu'une des jeunes comédiennes s'évanouit, Marianne a un geste que j'aime beaucoup. Elle glisse son bras sous le mien. Chaque fois que je sens sa main se frayer un passage, lorsqu'elle fait glisser sa main entre mon corps et mon bras, lorsque je sens cette pression si ferme qui se transforme en une caresse si douce, un trouble ancien, et toujours présent, m'envahit.

Marie Thérèse KOEST


Responsable du site : Lucie Sobek


Avis de lecteurs - note moyenne : 0
Merci de donner une petite note sur ce texte :
j'ai aimé...

1 Pas du tout
2 Un peu
3 Beaucoup
4 Passionnément
5 A la folie
Accès via la version smartphone - Contacter le webmestre