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« Détournement de carrière », une petite histoire imaginée par chantaltrav

1 Détournement de carrière chantaltrav jeanne@femmes.net 28-07-2006, 12:29 « Tout le monde en place, Christophe c’est à toi ! »

Que n’ai-je au plus profond de moi-même rêvé d’entendre ce « Tout le monde en place ». J’y suis enfin ! Ici Christophe joue le rôle de mon fils retrouvé 15 ans après sa naissance lors de l’enterrement de sa grand-mère, ma mère, qui l’a élevé alors que j’ignorais tous de son existence. C’est mon premier film en tant qu’acteur principal.

Cette histoire, du moins son « pitch » comme on dit maintenant, est très librement inspirée d’un film américain à succès. Pour une fois que le remake et l’adaptation se font chez nous et pas là-bas.

Pour arriver où j’en suis, j’ai du passer par de nombreuses périodes d’intermittences, des prestations déplorables comme celle consistant à faire le guignol pour un annuaire téléphonique, je ne compte plus les restaurants où j’ai travaillé comme serveur.

Même après que j’ai décroché ce rôle, j’ai eu des périodes de doute, cela ne resterait-il qu’un feu de paille ? J’ai du subir un apprentissage rude, parfois douloureux puis au fil des jours et semaines, tout cela s’est transformé en plaisir puis en mode de vie.

Pour incarner mon rôle, j’ai pris exemple sur Vincent Perez dans « Ceux qui m’aiment prendront le train » de Patrice Chéreau. Sa performance m’avait alors subjugué par son réalisme, sa capacité à se transcender et à faire croire à la réalité de son personnage.

Je me dois d’ajouter que rien non plus ne serait arrivé si je n’avais pas dès le premier jour, celui du casting, rencontré ma muse, mon modèle, celle avec qui je partage maintenant tout, Christelle.



« Recherchons acteur, la trentaine, prêt à se transformer pour le remake d’un film américain »

Voilà la bien énigmatique annonce trouvé dans le Journal du Casting. Je ne compte plus le nombre d’annonces de ce type qui aboutissent à des studios X, je le sais d’expérience ayant parfois participé en tant que figurant à ce type de production. Notre métier est si difficile que nous sommes ainsi parfois obligés de composer, c’est le cas de le dire, avec bien des propositions que nous refuserions si nous en avions les moyens.

Croyez-moi, ces productions n’ont rien d’aussi excitantes que le résultat que vous pouvez voir le samedi soir sur votre télévision. Certes les filles sont souvent jolies, habillées, ou plutôt déshabillées, de tenues sexy qui vous émeuvent devant votre écran, mais à vivre dans ces troupes, vous en arrivez très vite à ne plus éprouver le moindre désir. En bref, je vous déconseille ces expériences, même si vous vous pensez exhibitionnistes avéré.

Mais, je m’égare.

Seul donc le journal qui publiait cette mystérieuse annonce me faisait penser au caractère sérieux de l’annonce. La rédaction vérifie tout, aussi comme je le fais souvent, j’ai essayé d’en savoir un peu plus auprès d’elle. Il m’a été répondu que la production avait explicitement demandé de ne rien révéler afin justement de ne pas déterminer à l’avance telle ou telle catégorie d’acteur.

J’ai donc, comme d’habitude envoyé un résumé de carrière avec quelques photos me montrant sur scène ou dans des petits rôles sur des films ayant eu un relatif succès.

C’est avec surprise que je reçus un appel deux jours plus tard. Je devais me rendre dans une société de production à Boulogne.

Un peu traqueur, je décidai de flâner et de regarder le vitrines. Comme souvent, je m’attardai sur les devantures des magasins d’habillement ou de chaussures, admirant les tenues proposées, me rêvant les portant alors que mes moyens ne me les permettaient vraiment pas.

Dans la salle où l’on me fit attendre, il n’y avait personne, ni aucun document à consulter. Je ne sus donc rien avant d’être reçu très rapidement par Jérôme, le directeur de casting, et François, le réalisateur.

« Bonjour, vous vous appelez donc Jean-Luc Lampers, vous avez un nom de scène ?
- Non, j’utilise mon vrai nom.
- Entendu. Je vais vous présenter le film, car notre recherche ne repose vraiment sur la carrière de l’acteur que nous choisirons mais sur sa capacité à nous convaincre qu’il est celui qui assumeras cette composition au mieux.
- Je vous écoute.
- C’est l’histoire de Max, un homme de votre âge environ qui a rompu tout contact avec sa famille, un jour il apprend par hasard que sa mère vient de décéder. Enfin décidé à affronter le regard des autres, il se rend aux obsèques, incognito, et là il découvre un jeune garçon de 18 ans dont il apprend qu’il s’agit de son fils. Le propos du film est donc la découverte entre ces deux personnages, Max, le réprouvé rejeté par sa famille et Christophe le jeune garçon qui va apprendre à connaître ce dernier avant de découvrir qu’il s’agit de son père.
- Excusez-moi, mais je ne vois pas en quoi ce scénario requiert autant de mystère.
- Parce que nous avons laissé de côté l’aspect le plus important de l’histoire.
- Ah ?
- Oui. Ce film est une adaptation de Trans-America et un hommage au film de Patrice Chereau « Ceux qui m’aiment prendront le train »., vous connaissez ?
- Le Chéreau, bien sur, l’autre non. C’est un road movie ?
- En quelque sorte oui puisque le personnage central traverse presque toute l’Amérique pour affronter son destin.
- Son destin ?
- Oui »

Les question se bousculaient dans ma tête mais j’en avais aussi assez de leur petit jeu. Ils savaient qu’ils étaient « les plus forts », je fis donc l’ouverture qu’ils attendaient :

« C’est à dire ?
- Vous avez bien vu que nous n’avons rien dit, ce n’est pas par jeu mais tout simplement pour voir si vous paraissez en adéquation avec cette histoire.
- Je vous écoute alors.
- En fait, on apprend au début du film que Max a quitté son village parce que sa mère a découvert son penchant pour la féminité. Elle l’a découvert un jour habillé avec ses propres vêtements. Au lieu d’essayer de comprendre, elle l’a chassé. Quelques semaines plus tard, elle recevait un courrier d’un jeune fille lui apprenant qu’elle avait accouché d’un petit garçon mais que très malade elle l’avait confié à des sœurs qui étaient chargés de le remettre à sa grand-mère après son décès. Emue aux larmes mais sans nouvelles de Max, la grand-mère entreprends donc les démarches d’adoption de son petit-fils qui grandit à ses côtés sans jamais savoir qui est son père.

J’étais abasourdi, je pensais aux vitrines que j’avais admirées en arrivant. Le hasard m’avait enfin mis en face de mes rêves les plus fous. J’attendis la suite comme sur un nuage.

« Il s’agit vraiment d’une transcription de ce film américain. La différence notable étant que dans celui-ci le rôle du père est jouée par une actrice alors que nous avons décidé de revoir l’histoire avec le postulat inverse. Dans l’histoire américaine, le père qui est sur le point de se faire opérer pour un changement de sexe se rend donc en femme à la cérémonie. Il est joué par une femme Felicity Lott ; La différence notable pour nous est que nous avons décidé de rendre à l’histoire sa vérité. Puisque la femme qui se rend à l’enterrement est en réalité encore un homme, c’est donc un homme qui jouera le rôle. Vous si vous nous convainquez..
- Mais, comment voulez-vous que ?
- Ne vous en faites donc pas, vous allez apprendre à vous comporter comme une femme. Pour l’instant nous ne vous demandons pas d’être une femme convaincante mais de nous convaincre que vous allez le devenir.
- ? ?
- Si vous souhaitez continuer avec nous Jean-Luc, nous allons vous demander de vous habiller et de revenir devant nous en femme. C’est le seul moyen que nous avons de nous assurer que vous êtes dans le personnage. Notre maquilleuse Christelle va vous aider à vous transformer et si nous vous retenons, c’est elle et un professeur de maintien qui vous apprendront les secrets de la féminité.

Un scud me serait tombé que je n’aurais pas été plus assommé. C’était presque mon histoire qu’ils venaient de le raconter. Bien sur, je n’avais pas d’enfants, mais j’avais quitté la maison à 20 ans quand ma mère m’avait découvert en tailleur et escarpins en train de lire un journal féminin. Elle avait refusé de comprendre, j’avais été prié de partir non sans avoir brûler devant elle tout ce que je lui avais emprunté. Il était hors de question qu’elle reporte un jour ce que j’avais souillé.

Jamais, faute de moyen financier, je n’avais pu depuis me transformer à nouveau, me contentant d’acheter de temps en temps des collants et encore, toujours en supermarché.

Je connaissais bien sur les deux films dont il m’avait parlé. Aucune comparaison n’était possible avec le film américain, Felicity Lott étant une femme ne pouvait qu’incarner un être féminin – on voyait bien là la fausse liberté du cinéma américain, puisque jamais dans leurs films un transsexuel n’est incarné par un homme ou un véritable transsexuel mais toujours par des femmes. Par contre, rivaliser avec Vincent Perez dans « Ceux qui m’aiment prendront le train » ou le magnifique Robinson Stévenin de « Mauvais Genres » allait être une véritable épreuve, leurs compositions étant saisissantes.

Si ce casting marchait, j’allais peut-être pouvoir vivre au grand jour ma passion secrète, du moins le temps du film. J’en étais là de mes réflexions quand Christelle entra dans la pièce. Elle était superbe, grande, en tailleur à veste écossaise rouge et jupe noire sur des escarpins vertigineux. Ses jambes gainées de noir brillaient de mille feux sous la lumière, elle représentait mon rêve de femme.

Je la suivis sans plus me poser de question, j’étais sous le charme, pas amoureux encore mais très attiré par elle.

Elle s’adressa à moi de sa belle voix un peu grave :

« Aujourd’hui nous n’allons pas faire de toi une femme, il s’agit juste de t’habiller élégamment, de t’appliquer un maquillage minimal et de te faire marcher un peu puis tu iras revoir François et Jérôme, tu est prêt ?
- Oui.
- S’ils te prennent, nous devrons par contre faire beaucoup plus ensemble, non seulement tu devras savoir t’habiller et te comporter comme une femme, mais tu devras apprendre à le faire seul car dans le scénario il y a certaines scènes où tu te transformes devant la caméra. Il va de soi que nous sommes au cinéma, alors je serai là à tes côtés pour te préparer à ces scènes, mais tu devras au moins avoir des gestes féminins et être sur de toi. On y va ?

Je rêvais de cet instant depuis si longtemps, je m’attendais bien sur à ce qu’elle me propose une transformation complète, à devenir femme des pieds à la tête. Or j’étais acteur, pas plus mais pas moins, aussi Christelle m’annonça-t-elle qu’elle allait me faire un maquillage très simple et me donner l’apparence extérieure d’un femme.

« Déshabille-toi que je puisse commencer » me demanda-t-elle en me tendant un peignoir en éponge.

Emporté par mon élan, j’enlevai mes vêtements et commençai à enlever mon slip.

« Que fais-tu ?
- Ben, je me déshabille.
- Je vois bien, mais je ne t’ai pas demandé de tout enlever, tu peux prendre une apparence féminine et garder tes sous-vêtements d’homme.
- Mais …
- Ah, je vois, dit-elle en riant. Non, non, tu ne porteras pas de sous-vêtement féminins, ce n’est pas l’objet du jour »

Je devais faire une tête dépitée, car elle ajouta « Du moins pour aujourd’hui,, on verra plus tard ».

Elle me fit un maquillage très léger à base de fond de teint et de rouge à lèvres puis me mis une perruque. En me voyant dans la glace, j’eus un véritable choc. Je ne pensais pas qu’avec si peu je pourrais être aussi méconnaissable. Elle me tendit ensuite une paire de collants et une robe noire simple avec des manches à mi bras.

« Je vois que tu es épilé.
- Comme la plupart des acteurs tu sais.
- Oui, je sais. Cela va faciliter ta féminisation parce que tu vas pouvoir enfiler des collants fins.
- Euh, je fais comment pour les mettre ?
- Tu veux que je t’aide ?
- Si tu veux, cela m’évitera peut-être des les abîmer.

J’étais bien sur aux anges quand elle commença à dérouler le nylon sur mes jambes, tellement aux anges qu’elle s’en aperçut en terminant par mon bassin.

« Dis-donc ! Qu’est-ce que ce serait si tu avais porté une culotte de femme ! débrouille-toi pour que cela disparaisse, je ne veux rien savoir, il n’est pas question que tu réagisses ainsi à chaque fois que tu te transformes, autant arrêter tout de suite ! »

Ces paroles eurent un effet immédiat, je retrouvai mon état naturel. Elle me demanda de bien fixer mon sexe entre mes cuisses afin qu’il ne se voit pas sous la robe. Elle m’enfila celle-ci ou plutôt je me glissai dedans puis elle remonta la fermeture éclair dans le dos.

« Aux chaussures maintenant ! Tu chausses quelle pointure ?
- 41
- Parfait, on aura tout le choix possible puisque toutes les chaussures pour femme se font jusqu’au 41. Ca iras ? » me demanda-t-elle en me montrant des escarpins à talons assez fin avec une bride à la cheville et de hauteur raisonnable. Elle me les mit aux pieds, j’éprouvai une sensation de bonheur physique telle que je n’en avais jamais connu. Non seulement, j’étais femme mais en plus devant une superbe fille qui m’avait transformé.

Dans la rue, je passais mon temps à observer les femmes marcher, à admirer leurs talons hauts en les enviant. Je n’avais plus besoin de les envier. Si j’étais bon tout à l’heure, je pourrais en faire autant pendant les tournages.

« Tu vas marcher maintenant. Rappelle-toi ce qu’a dit François tout à l’heure, tu dois les convaincre que tu peux devenir femme »

Jamais je n’aurais cru que marcher avec des talons était si difficile. Lorsque je regardais les femmes dans la rue, je m’imaginais que tout cela était naturel.

« Il faut que tu marches naturellement. Ne te pose pas la question de ce que tu as aux pieds. Vous les hommes, vous avez tendance avec des talons à mettre les genoux en avant comme pour compenser quelque chose.
- Comment sais-tu cela ?
- Je suis maquilleuse et habilleuse je te rappelle, tu n’es pas le premier qui mets des escarpins au cinéma.

Sa remarque m’intrigua quand même.

Au bout d’un certain temps, ma démarche lui a semblé correcte.

« On va y aller, me dit-elle en me prenant la main. Ne t’en fais pas, tu ne passes pas un examen, sois naturel avec eux. Pour le reste, le maintien, les gestes, la voix, tout est prévu, nous aurons trois mois pour te préparer, ça va marcher, je compte sur toi. »

Je ne relevai pas l’ambiguïté de ses propos mais en fus quand même étonné.

Christelle me laissa rentre seul dans le bureau de François. Il ne savait pas que c’était moi, nous comptions sur l’effet de surprise.

Je rentrai dans la pièce.
« Madame ?
- C’est moi.
- Incroyable, fantastique, c’est toi, j’avais raison, je savais que nous tenions notre acteur ! Bravo ! Tu as le rôle !

J’étais fou, plutôt je me sentais folle de joie ! Nous discutâmes de pas mal de détails sur mon contrat. Le cachet était le plus gros que je n’avais jamais touché, de plus j’étais associé au pourcentage, ce qui permettait à Jérôme notre producteur de diminuer mon cachet malgré tout mais m’assurais de substantiels revenus si le film marchait.

Bien campé sur mes escarpins, je revins vers Christelle.
« Alors ?
- Je l’ai !
- Quel bonheur dit-elle en se jetant dans mes bras avec tendresse.

Je ne voulais pas qu’elle parte, j’avais l’impression que j’étais femme dans ses bras.
« Allez, on va te déshabiller.
- Non !
- Pardon,
- Non, je n’ai pas envie. J’aimerais tellement resté ainsi.
- Je m’en doutais, ce n’est pas la première fois que tu te transformes, je me trompe.
- Si, enfin non, je ne l’ai fait qu’une seule fois à vingt ans, Ma mère m’a découvert et m’a mis à la porte. Depuis, si tu savais comme j’ai rêvé de cet après-midi !
- Il faut que je te dise la vérité. Tu es incroyable ainsi, avec un peu d’apprentissage tu seras belle, vraiment.
- …
- Tu as envie de vivre en femme ?
- Vivre, je ne sais pas, profiter des moments à venir oui !
- Je peux t’aider si tu veux.
- Tu m’as dit tout à l’heure qu’il y avait tout un programme de prévu.
- Officiellement oui, mais on peut y ajouter un programme privé non ? Allez déshabille-toi et reviens me voir après, de toute façon il faut que je te donne tous les détails de ce qui t’attends.

Quand je repassai dans son bureau, François me proposa ensuite de changer mon prénom au profit d’un prénom neutre, Dominique par exemple. Cela accentuerait l’ambiguïté non seulement du personnage mais aussi de l’acteur. Acteur ?. Actrice ?

« Tu sais ce que l’on pourrait faire si tu es d’accord ?
- Quoi ?
- Tu pourrais faire toute la promo du film en femme, comme cela les spectateurs et critique ne sauront la vérité qu’à la fin de la projection où nous pourrions montrer tes deux visages.
- Pourquoi pas.
- -On verra le moment venu, mais cela pourrait être amusant. Je te laisse voir toutes les phases de ton entraînement avec Christelle. Je te laisse le scénario et les dialogues et on se retrouve dans deux mois. Tu seras évidemment prévenu pour tous les détails matériels à temps. A bientôt Dominique et merci pour ta performance.

Je me gardai bien de lui dire que j’avais fermement l’intention d’essayer de vivre en femme bien au delà, un peu comme Vincent Mac Doom, et de jouer sur cette ambivalence dans la suite de ma carrière si c’était possible. Même si je devais jouer des rôles d’homme.




« Voilà le programme officiel alors ! Tu dois donc apprendre à devenir femme. Cela va passer par les stades suivant, tu devras d’abord marcher sans souci sur n’importe quelle hauteur de talons, aussi tu vas travailler avec une spécialiste qui va t’apprendre à te tenir. Je te préviens tout de suite, elle va sûrement te demander de marcher toute la journée avec des chaussures féminines, y compris dans la rue et ce avec des hauteurs de plus en plus importantes au fil du temps. Moi, je dois t’apprendre à te maquiller et t’habiller. Bien sur, tu auras un maquillage professionnel, mais dans le film tu devras aussi te maquiller devant la caméra. Il faut que le spectateur pense que tu es une femme, jusqu’au où tu te révèles à ton fils. Tu apprendras en même temps à faire des gestes et avoir des réflexes féminins et enfin à parler avec une voix la plus féminine possible.
- Vaste programme, mais dois-je te dire excitant
- Tout cela va se dérouler soit dans mon studio professionnel, chez moi en fait, soit chez Madame Dussart qui sera ta prof de maintien. Autant te prévenir tout de suite, elle exigera de toit, non seulement que tu portes tes chaussures mais dans quelques temps, elle te demandera de venir habillée en femme, tu devras donc sortir ainsi. Par contre, ce que tu vas apprécier, c’est que pour que tu rentres mieux dans le personnage, quand tu sers habillé en femme, tu le seras complètement, y compris ta lingerie.

Je rougis.

« Ca, tu n’as rien contre, coquin va ! Bon maintenant, le programme privé, si tu veux, je t’aide un peu plus et te propose de passer un maximum de moments en femme avec moi.
- Pourquoi me proposes-tu cela ?
- Tu veux vraiment savoir ? J’en ai envie.

Je vais pour la prendre dans mes bras et la serrer contre moi, elle se dégage doucement « S’il te plait, il ne faut pas ».

« Tu veux commencer, ce soir ? Je suis disponible si tu veux. Je t’emmène à mon studio, je n’ai aucune autre cliente jusqu’à la fin du tournage, Jérôme m’a engagé pour m’occuper exclusivement de toi »

Un peu échaudé par sa réaction de tout à l’heure, je reste un peu à distance malgré l’envie que j’ai de la prendre dans mes bras, de lui tenir la main pendant le trajet en voiture. Je regarde ses jambes finement gainées de noir qui dépassent de sa jupe pendant qu’elle conduit, je rêve de les caresser, de sentir le nylon de ses bas crisser sous mes doigts puis je regarde les miennes et les imagine ainsi. J’ai du mal à cacher l’excitation qui m’envahit.

Arrivé à son appartement, Christelle me propose d’enfiler à nouveau les escarpins de tout à l’heure avec un collant afin que cela ne fasse pas trop d’épaisseur dans la chaussure.

« Et puis, cette fois, tu as le droit à une gâterie » et elle me montre une superbe culotte en dentelles.

« Dépêche-toi de te rhabiller ensuite, je vais t’emmener marcher, comme prévu »

En enfilant la culotte puis le collant, je ne peux retenir mon excitation. Je prends mon temps espérant que Christelle reviendra avant que j’ai remis mon pantalon comme elle me l’a demandé. Je finis d’enfiler mon collant quand elle rentre dans la pièce et alors ne peux rien lui cacher de mon état.

« Excuse-moi, lui dis-je, mais je ne peux pas me calmer
- une culotte suffit pour ça ! me dit-elle en riant d’un rire un peu forcé
- Non, pas une culotte toute seule, mais une culotte de femme portée devant une femme telle que toi.

Tout en lui parlant, j’essaie de prendre sa main et de toucher son visage.

« Non, il ne faut pas
- Pourquoi, tu as quelqu’un ?
- Non.
- Tu ne veux pas mélanger plaisir, vie privée et travail ?
- Non, ce n’est pas ça.
- Pourquoi alors ?
- Je ne peux pas te répondre.
- Mais pourquoi ? Que se passe-t-il ? Je ne te plais pas ? Tu ne veux pas de moi ?
- Non, au contraire. Si tu savais comme tu me plais, comme tu m’as donné envie cet après-midi.
- Alors ?
- C’est que …

Christelle éclate en sanglots. Je m’approche et la prends vraiment dans mes bras. Elle pose sa tête sur mon épaule.

« C’est toi qui ne voudra pas de moi.
- Mais si ! depuis cet après-midi, moi aussi j’ai envie de toi, envie d’aller loin à tes côtés.
- Je ne peux pas ! ! ! !
- Mais pourquoi Christelle, dis-le moi, enfin ! la suppliai-je
- Non, je ne peux pas.
- Christelle lui dis-je en la serrant très fort dans mes bras
- Je, je …
- Oui ?
- Je suis …
- Oui ?
- Comme toi …
- Comme moi ?
- Oui, tu m’as bien entendue, comme toi. Je vis depuis des années en femme et j’attends mon opération de transformation complète qui est prévue l’an prochain. Oh, Jean-Luc, ne me laisse pas. Cela fait si longtemps que je t’attends.
- Moi aussi Christelle.

Je l’écarte de moi, la regarde et ne vois qu’une femme. Je lui prends le menton et l’embrasse tendrement, j’embrasse une femme. Je la caresse et caresse une femme.

Lentement, j’entreprends de la déshabiller.

« Tu es sur ?
- Chut.

Elle est là devant moi, son tailleur repose à ses pieds. Je dois avoir l’air ridicule dans mon collant tendu par le désir, Christelle ne me voit pas ainsi. Elle me caresse et cela me tend encore plus. Nous nous faisons respectivement l’amour, c’est merveilleux. Jamais je n’aurai cru le faire ainsi, jamais je n’aurais imaginé accepter l’hommage qu’elle me fait. Nous y prenons un plaisir profond tous les deux.

« Tu es ma femme, Christelle, tu le seras quoi qu’il t’arrive à l’avenir, je te veux à mes côtés, tu es celle que j’attendais.
- Toi aussi, tu veux bien être mon homme ?
- Oui.
- Je ferai de toi une femme plus vrai que nature, nous serons seuls à garder ton secret.
- Je ne pourrai jamais être plus femme que toi.
- Mais si, il y en a plein dans la rue.
- Il n’y a aucune comme toi ma belle.


Je passai les semaines suivantes sur un nuage, malgré les efforts consentis pour le tournage. Nous décidâmes rapidement de mon aménagement chez elle. Dès que nous avions du temps, nous courrions les boutiques pour me constituer une garde-robe complète de femme. J’appris ainsi à assembler les couleurs comme une femme, à porter les vêtements avec naturel.

Cela me permit de prendre conscience qu’il était parfois plus facile de porter un jean et un tee-shirt qu’un tailleur, un soutien-gorge, des bas et des talons aiguilles, que le rasage était une corvée (que j’ai supprimé depuis grâce à l’épilation au laser), mais que le maquillage pouvait l’être aussi. Bref que vivre en femme pouvait être un fantasme, mais n’était pas toujours une sinécure, que j’aimais être femme mais que, contrairement à Christelle qui se sentait femme depuis toujours, je restais aussi un homme. Ce n’était pas pour lui déplaire non plus, elle avait besoin de cet équilibre à ses côtés, comme moi j’avais besoin d’elle, comme moi j’avais besoin de ma femme à mes côtés.

L’apprentissage fut donc parfois difficile et je m’obligeai à suivre les recommandations de Madame Dussart, je pris sur moi pour marcher toute la journée en chaussures avec des talons sous mes pantalons. Malgré Christelle, je ne me sentais pas encore prêt à affronter la foule en femme. Je me contentai de le faire à la maison, jusqu’au jour où je lui demandai de m’accompagner dans la rue. Il fallait de toute façon que je franchisse cette barrière, Madame Dussart me l’avait demandé.

Elle fut très contente de me voir ainsi arriver un matin chez elle. Tout au long de ces semaines, ce fut elle qui me donna les clés pour me sentir femme. Mais jamais je n’aurais réussi sans l’aide de Christelle.

Il ne me fallut pas longtemps pour faire mes premiers pas dans les rues, d’abord accompagnée de Christelle, puis, au fur et à mesure de la progression de mes leçons, seule.

C’est ainsi qu’arriva le premier jour du tournage. Nous nous présentâmes ensemble. Le vigile à l’entrée laissa rentrer Christelle que tout le monde connaissait mais ne voulut pas me laisser passer.

« Vous êtes ?
- Dominique Lampers
- Ne vous moquez pas de moi, j’ai sa photo ici.

Christelle devant moi était aux anges, elle faisait des efforts pour ne pas rire.

« Appelez donc François, le réalisateur, il me connaît lui.
- Vous n’avez rien à faire ici ! Vous n’êtes pas sur mes listes !

C’est ce moment que choisi François pour passer à nos côtés.

« Que se passe-t-il encore, ah bonjour ma beauté, dit-il à Christelle, alors où est Dominique ? Nous l’attendons pour que tu t’occupes de lui ! Ca commence bien, il est déjà en retard.
- Ici, dis-je
- Quoi ?
- Si François, dit Christelle, je te présente Dominique
- Impossible, mais c’est une femme !
- Et alors, ce n’est pas un rôle de femme que je dois jouer ?
- Magnifique, tourne-toi. Ce n’est pas vrai, vous me jouez un mauvais tour, c’est une de tes amies Christelle ?
- Non, c’est lui,. Je peux te l’assurer, il est devant toi.
- Alors là, bravo à tous les deux.

Il surprit alors notre complicité.

« Vous êtes ? »

Et sans nous concerter, nous hochâmes la tête ensemble. Nous éclatâmes de rire tous les trois.

« Bravo ! Chapeau tous les deux ! Tu vis comme ça, Dominique ?
- Parfois, en tout cas, j’ai décidé de vivre ainsi au moins jusqu’à la sortie du film, pour que les journalistes qui pourraient traîner ne se doutent de rien comme tu me l’a proposé l’autre jour.

L’illusion fut aussi au rendez-vous avec le reste de l’équipe.

Le tournage fut assez éprouvant. Vivre en femme est un plaisir quand rien ne vous y oblige. Dans mon cas, il m’est arrivé parfois d’éprouver un certaine nostalgie de ma vie d’avant. Je compris à ce moment là que j’avais besoin de ma double personnalité, que Dominique ne serait jamais épanouie si Jean-Luc ne surgissait pas dans sa vie et inversement.

C’est pourquoi nous décidâmes que j’assisterai à la première en homme et que la surprise serait révélée lors de la présentation du film après la projection. L’accueil fut triomphal, les applaudissements fusèrent à la fin de la projection, puis François nous présenta tous sur scène.

« Et maintenant, laissez-moi vous présenter notre acteur principal, ou plutôt je devrais-je dire, notre actrice principale : Dominique Lampers ».

La salle se figea quelques secondes, j’eus soudain très peur des huées, puis un tonnerre d’applaudissements nous parvint, j’avais gagné mon pari, j’étais enfin un acteur reconnu. Afin de m’assurer de l’acceptation des autres, je décidai de me transformer à nouveau pour la réception. J’y apparu en longue robe fourreau noire fendu à mi-cuisse, talons aiguille et bas noirs. Les félicitations jaillirent de toute part. Je savais que je pourrai désormais vivre ma vie d’homme et de femme au grand jour.

Les scénarios s’entassèrent bien vite sur ma table. Je n’attendis pas trop longtemps pour les tournages suivants mais choisis avec soin le type de film que je tournais. Je me refusai à incarner en permanence LE travesti de service, je voulais être reconnu en tant qu’acteur et actrice, pari osé mais je ne pouvais pas imaginer ma vie et ma carrière autrement si je voulais être pleinement moi-même en privé et en public.

Je tournai donc les mémoires du Chevalier d’Eon, celle de l’Abbé de Choiseul, ces deux films en costumes m’ont permis d’asseoir ce personnage double, soit homme soit femme selon le rôles. J’ai enchaîné ensuite un film avec un rôle d’homme puis un film avec un rôle de femme. J’ai toujours refusé les rôles de travestis ou de transsexuels, ce qui m’a à ce jour plutôt réussi.



« Tout le monde en place, Dominique, c’est à toi ! »

Jean-Paul s’approche de moi.

« Tu es superbe ma belle, le final va être splendide
- Mais Christelle ? Pourquoi n’est-elle pas arrivée ? Elle aurait pourtant du me maquiller
- Je ne l’ai pas vu, elle ne va pas tarder je pense,
- En attendant, le défilé se termine, jamais elle ne m’a fait ce coup là

Cela fait deux heures que je cours dans les coulisses du défilé de Jean-Paul Gaultier. J’ai présenté deux modèles homme, dont une de ses fameuses jupes, un modèle femme et je suis prête à passer pour le dernier modèle, une mariée sévillane.

Christelle devait être à mes côtés pour s’occuper de moi. Je sais bien qu’elle n’arrête pas de courir depuis que ses instituts de beauté rencontre un succès grandissant, mais en principe, elle ne réserve son temps personnel qu’à une clientèle triée sur le volet, dont moi bien sur.

Cela fait maintenant un an qu’elle est devenue une femme. Son opération a bouleversé notre vie, elle déborde de féminité, me faisant paraître, à mes yeux du moins tel un vilain petit canard. Elle m’a permis de retrouvé un équilibre, depuis je vis de moins en moins en femme, du moins dans la vie courante.

Pour la première fois depuis deux ans, je participe à un défilé de mode avec un challenge fixé par Jean-Paul : incarner avec autant de naturel que d’aisance les deux faces de la mode, ses deux clientèles, montrer au monde que finalement elle s’adresse aux hommes comme aux femmes, que rien hormis des conventions ne nous empêche de paraître l’un ou l’autre tout en étant soi-même.

Ma première apparition féminine a déclenché des murmures dans l’assistance puis une salve d’applaudissements. Jean-Paul vient de me confier que de nombreux hommes lui ont, par téléphone pendant le défilé, passé commande de tenue jusqu’à présent réservées aux femmes.

Si mon histoire, avec l’aide que quelques personnalités, pouvait aider la société à dépasser ses clivages hérités de la révolution. Après tout, les hommes portaient des habits très féminins au grand siècle. Il est vrai que seule les femme y portaient des robes longues et des jupons, mais tous portaient des dentelles et des bas.

Je n’ai toujours pas vu Christelle que Jean-Paul me pousse (« C’est à toi, vas-y et attends-moi au bout du podium et alors retournes-toi »). Je suis censée clore le défilé avec lui comme toutes les mariées et voilà qu’il me laisse partir seule. Il faut que j’assure comme si de rien n’était alors qu’il ne m’a pas facilité la tâche. Je porte une jupe noire en dentelles ultra courte qui ne cache rien de mes jarretelles et de mes bas noirs. Le haut en fine résille ne cache rien lui de mon soutien gorge dont la dentelle est identique à celle de la jupe. Sur la tête, je porte une coiffe sévillane et une mantille, je suis perchée sur des escarpins faramineux et une longue traîne en voile est accrochée de ma taille. Cet ensemble pourrait se contenter d’être sexy coquin, grâce à Jean-Paul c’est devenu de la haute couture.

J’avance au milieu des vivas, quand les applaudissements soudain redoublent comme si quelque chose se passait dans mon dos. Je suis les consignes du maestro, vais jusqu’à l’extrémité du podium puis me retourne.

Jean-Paul avance avec à son bras une mariée portant une tenue exacte réplique de la mienne mais en blanc. Christelle rayonne de mille feux, elle n’a jamais été aussi sexy, elle est merveilleusement belle. Il prend ma main, la met dans celle de Christelle et nous glisse à l’oreille « vos robes de mariées sont mon cadeau de mariage, soyez heureuses ! ».


Responsable du site : Lucie Sobek


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