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« », une petite histoire imaginée par alcina

Dure est la condition féminine 7 alcina 03-01-2009, 7:38 Agnès

Du moins les six premiers mois. Peu à peu le tempérament de Fred reprenait le dessus, il était toujours gentil, rigolo, plein de vie. Il me sautait toujours avec enthousiasme, mais je voyais bien ses regards se porter ailleurs. A mon insu, je devenais jalouse. Un processus d’une rare banalité s’engageait. Ma jalousie le rendait hystérique. Soit il m’engueulait, soit il se tirait. Un matin il revint en puant l’alcool, et il me colla un coup de poing. Je m’enfuis chez Maman. Ces violences verbales à la limite de l’agression durèrent quelques mois. Je lui fis une scène, il devint fou de rage. Il me gifla, je tombai en arrière et je me retournai un doigt. Tout de suite, il regretta sa brutalité. Mais il commençait à me faire peur. Il s’était ainsi passé un an et demi. Je passai mon bac pendant que lui se traînait en première année de droit. A l’époque après l’écrit du bac, tout le monde passait un oral. Juste avant moi, une rousse préparait fébrilement un texte anglais auquel elle ne comprenait rien, elle me passa discrètement le texte. Je parlais affreusement mal, mais à l’écrit je me débrouillai bien. Je lui traduisis en vitesse. Elle le lut à l’examinateur avec un excellent accent. Elle répondit astucieusement à ses questions en lui faisant du charme. Elle dut s’en tirer avec une excellente note. Je passai à mon tour. Au bas de l’escalier Agnès, la fille que j’avais secourue, se précipita sur moi, m’embrassa, en me remerciant avec effusion. J’étais submergée. Elle m’embarqua dans le premier bistrot.
- Je te devrai mon bac !
Je fis un geste modeste.
- Si, si, tu dois avoir un succès fou !
Nouvel air modeste.
- Mais non pas avec les garçons ! en classe. Enfin, si avec les garçons tu dois aussi avoir du succès. Tu vois, moi dès que j’ouvre la bouche, je dis une connerie. Tu as préparé ton bac où ? A sainte-Gudule ? Tu n’as pas dû rigoler ! Oh mais dis-donc t’es mariée ! Tu as une alliance ! Tu as quel âge ?
- Dix sept ans. Tu fais plus.

A cet âge rappelons-nous que c’est un compliment. Comme elle s’aperçut que nous habitions toutes les deux dans le sixième. Nous revîmes à pied le long des quais. Agnès était délicieuse. Tout le temps en mouvement, elle s’exprimait de façon imagée. Moi qui aimais Proust, elle me semblait avoir capté ce que Proust appelait l’esprit Mortemart, un charme de l’expression une légèreté que seuls quelques élus ont entrevus. C’est dans le fond ce qui a plongé Proust dans Saint-Simon. On devine cet esprit sans le savoir jamais de science certaine. Elle paraissait tout capter sans vraiment rien savoir. Une gaîté légère vous effleurant à traits rapides la portait vers vous et peut-être pour vous abandonner l’instant d’après. J’appris bientôt qu’elle faisait cet effet à tous, hommes et femmes. Je montai chez elle. Elle vivait dans un petit studio que lui laissait ses parents. J’étais envoûtée. Elle me raccompagna ensuite chez moi. Elle monta s’assit un moment Fred rentra. Elle lui jeta un regard noir. Car, à mon air embarrassé, elle soupçonnait que l’attelle que j’avais au doigt, je la lui devais. J’avais éludé ses questions, rougi, etc. En y réfléchissant c’était mieux comme ça, car s’il lui avait plu, je serais retombée au rôle de rabatteur. Ce n’était pas mon affaire. Trois jours plus tard, Fred fut cause de l’enchaînement qui allait s’engager. A deux heures du matin, il revint saoul comme un Polonais à la maison avec deux pouffiasses qu’il entendit me présenter. Je passai un peignoir, sur ma chemise de nuit, pris ma clef, chaussai en vitesse des escarpins. Une fois dans la rue, je me dirigeai naturellement chez Agnès. Elle m’ouvrit, ravie de me voir. Quand elle vit mon visage décomposé, elle me prit dans ses bras. Je mis à pleurer doucement. Elle retira mon peignoir, prit ma main et me conduisit dans son lit. Je me blottis contre elle. Elle était chaude. Et je ne sais ce qui me prit, j’éprouvai soudain un désir violent, une force que je n’avais jamais ressentie en moi. Je lui fis l’amour, mais non plus comme une femme ; comme un homme. Elle fut suffoquée. Au matin, je recommençai. Elle hurlait de plaisir. Moi aussi.
Quand nous apaisâmes, je ne savais que dire. Ce fut elle qui parla.
- Quel plaisir tu m’as donné ; je n’ai jamais ressenti ça avec personne. Tu es un amant magnifique.

Elle ne jugea pas utile de me poser de question. Avec elle, nulle pesanteur. Comme j’étais en chemise de nuit, il fallait que je m’habille pour retourner à la maison. Elle me passa un corsage et une jupe.

J’allais assez souvent chez elle. Je ne comprenais pas ce qui m’arrivait. Je n’avais envie avec elle que d’être un homme normal. Evidemment, c’était un peu tard. Agnès se moquait complètement de la question de savoir si j’étais un homme ou une femme. Alors que moi j’étais obsédée par ça. Un jour je réussis à contenir mes cheveux sous une casquette et j’empruntai des vêtements de Fred. J’allais voir Agnès. Elle éclata de rire. Non, mon pauvre chéri, je te préfère en femme. En mec, tu es ridicule. Bien que je lui fisse l’amour comme un homme qu’elle me parlât souvent comme à un homme, elle préférait que je m’habillasse naturellement, c’est-à-dire de façon très féminine. Je ne cherchais dès lors plus à cacher ma poitrine, elle m’encourageait à porter en été des robes très décolletées. Très souvent je ne mettais pas de soutien gorge. Elle me coiffait volontiers et me faisait des coiffures au contraire qui me donnaient encore l’air plus féminin. Elle aussi aimait être très féminine.

Au restaurant dans le parc Montsouris. Je portais une robe noire avec les épaules nues, la jupe s’épanouissait dans une immense corolle autour de moi. J’avais une rose dans les cheveux, mes plus jolis bijoux. Elle était ravissante dans une robe bleu éthérée, avec ses cheveux ébouriffés. Elle me dit :
- Tu sais Anne, hier tu m’as baisée de façon plus virile encore que jamais.

Elle n’avait pas fait attention au garçon qui avait failli défaillir. Il espionnait ensuite pour voir si elle me parlait au masculin. Ce soir-là tout le temps. Mais pas tous les soirs. Parfois elle me traitait comme une autre femme. Elle passait insensiblement d’un genre à l’autre. Moi, je m’étais, malgré nos relations, réhabituée à ne pas sortir du genre féminin, ni dans l’habillement, ni dans l’expression.

Avec le temps, nous vivions complètement ensemble, je décidai de louer un autre appartement plus grand et à proximité du sien. Nous nous y installâmes, je demandai le divorce. Fred ne s’y opposa pas. A dix-huit ans, j’avais déjà été mariée et divorcée. Je faisais d’excellents débuts de star hollywoodienne.

Maman avait très bien accueilli Agnès, même si elle éprouvait quelque mal à me suivre. Pour ses parents à elle en revanche, il ne fut jamais question de moi.

Je m’interrogeais. Plus le temps passait plus je me sentais une femme. Et pourtant, j’éprouvais des désirs d’homme. Agnès ne s’intéressait pas à ces classifications, elle prenait les choses comme elles venaient. Elle convenait que, socialement, je devais choisir. Mais, me disait-elle, c’était fait, j’étais une femme. Pour mon identité, ou érotiquement, il suffisait de me laisser aller aux expériences. Peu importaient alors les normes.

Nous avions dû choisir notre orientation universitaire. Elle avait réussi le concours d’entrée aux Beaux Arts, moi à Sciences Po. Nous nous installâmes ensemble rue des Beaux Arts, presque en face de son école et pas très loin de la rue Saint-Guillaume (à l’époque toute la scolarité s’effectuait rue Saint-Guillaume). Maman nous avait loué un appartement suffisamment grand pour que nous puissions travailler séparément.

Peu à peu j’étais tentée de jouer les maris, de prendre les décisions communes, d’affecter un ton protecteur. Un soir, je voulus lui prendre d’autorité une facture qu’elle avait dans les mains. Elle la mit derrière son dos. J’essayai de la prendre, elle courut, je la poursuivis.
- Agnès, j’en ai assez, obéis !
- T’obéir ? Et pourquoi ?
- Parce que c’est comme ça !
- Essaie-donc !
- Tu l’auras voulu !

Elle était devant le lit. Je la poussai elle tomba sur le lit. Je me jetai sur elle. J’étais handicapée par une robe très ample. Elle était en jean. Mais je réussis à me mettre sur elle, j’aurais voulu arriver à être à cheval sur elle mais ma jupe était coincée sous elle. Elle se retourna je tombais de côté sur le lit. Nous luttâmes pour reprendre le dessus. Elle était plus vigoureuse que je ne l’aurais cru. A force de tendre les bras pour la repousser. J’avais mal aux épaules. Puis je cédai. Elle se mit à califourchon sur moi m’immobilisant m’allongea les bras au-dessus de la tête en me tenant les poignets. Je haletais et je ne pouvais plus bouger. Je la voyais à peine mes cheveux me recouvraient les yeux. Elle se pencha sur moi et m’embrassa.
- Tu vois, chez nous ce n’est pas le mari qui est le plus fort. Il va falloir que tu deviennes un mari soumis, sinon gare…
Elle me lâcha se leva, remit de l’ordre dans ma robe qui était remontée à la ceinture. Une fois encore j’étais ramenée à la réalité. J’avais filé un bas.
Je recherchai un nouveau bas et en le fixant, je lui fis observer :
- Je n’étais pas en tenue, sinon tu aurais vu…
- Quand tu voudras mon petit Monsieur…

En fait, je me gardais bien de réessayer, j’avais bien vu qu’elle était plus forte que moi. Et puis, je ne cherchais pas à la dominer, j’avais eu quelques pulsions. Essayer de m’affirmer de différentes façons comme le faisaient les hommes ne me réussissait pas. Agnès n’avait pas pris plus que moi ces tentatives au sérieux. Nous passions pour lesbiennes. Ce que nous étions d’une certaine façon. Et cela nous était égal. Nos styles vestimentaires divergeaient, en partie en raison de notre immersion dans des milieux étudiants radicalement opposés et qui ne sympathisaient nullement. Sans changer vraiment, mon style vestimentaire bon genre tendait plutôt à se figer. Elle avait pris celui des Beaux-Arts. Nous rencontrions plus son milieu que le mien. Le fait que je ne sois jamais en pantalon, alors que toutes les filles des Beaux Arts ne quittaient pas leur jean, me classait, sans pour autant me couper des amis d’Agnès. Les garçons étaient familiers et tapaient volontiers sur les fesses des filles, y compris les miennes. Ils buvaient bien, puis disparaissaient dans des charrettes épuisantes. Agnès et moi, nous travaillions plus régulièrement. Elle gardait à mes yeux tout son charme. La vigueur de mes entreprises sur le plan sexuel s’était atténuée. Mais parfois nous retrouvions l’extase de la première fois. Apparemment, elle aimait aussi ma féminité. Elle aimait frotter ses seins contre les miens. Elle s’occupait beaucoup de moi. Aucune de nous ne souhaitait par exemple que l’autre change de style (coiffure, vêtements, maquillage). Elle portait des cheveux courts ébouriffés, ne se maquillait jamais, ne mettait que des bijoux épurés et discrets. Elle adorait la soie, les chemisiers en soie particulièrement. Quand il faisait beau, elle mettait volontiers des robes aériennes.

Mon divorce avec Fred traînait. Car il n’était toujours pas majeur. Il voulait attendre de l’être. Je n’y faisais pas obstacle. Nos relations étaient redevenues amicales. Il venait souvent dîner chez nous. Il adorait Agnès, et elle l’aimait bien. Je n’avais aucune crainte que l’un ou l’autre me trahisse. Fred était inconséquent, volage, imprévisible mais loyal en amitié. Agnès aussi était fair.

Un soir, comme je revenais de Sciences po avec pas mal de bouquins, les examens approchaient, je me mis à table pour diner en vitesse. Agnès, pour une fois, ne semblait nullement pressée. Je n’avais pas le temps. Je me levai pour aller travailler. Elle se leva courut et me barra le passage. Je fis un signe d’impuissance :
- Ecoute sois gentille, laisse moi passer.
- Non.
- Ca va, je sais que tu es la plus forte. N’en abuse pas.
- Je veux t’embrasser.
Elle le fit. Puis elle me prit par la main, m’amena à un canapé, me prit les deux mains et les posa à plat sur ma jupe puis les recouvrit avec les siennes. Elle se mit à rire :
- Ma chérie, tu vas être Papa.
Je retirai vivement mes mains, les mis sur mon visage et me mis à pleurer. Après m’être à peu près ressaisie, je le relevai la tête. Elle écarta mes cheveux. Elle me regardait inquiète :
- Tu n’es pas contente.
- Si, si, la surprise, l’émotion…

C’est vrai, j’étais contente. Cela changeait tout, mais cela obérait l’avenir. Je n’avais pas besoin de demander à Agnès ce qu’elle pensait. Elle exultait. Cela aussi me faisait voir l’évènement avec plus de faveur. Il n’est pas difficile d’imaginer toutes les questions qui m’assaillaient. A dix-huit ans, divorcée et avec un enfant ! Sans parler du reste…

Nous fîmes des projets toute la soirée. Je téléphonai à Maman pour venir la voir avec Agnès.

Maman n’eut pas de doute. Elle fut folle de joie. Elle décida même de chercher un appartement qui ne fût pas trop loin du nôtre.

Les examens passèrent. La grossesse avança. Puis vint le jour de l’accouchement. Tout fut facile, elle accoucha à Port-Royal d’un petit garçon.

Je ne m’étais pas du tout intéressée à la layette. Agnès et Maman s’étaient occupées de tout. J’avais décidé d’aller vers l’ENA et je travaillais ardemment. Agnès avait quasiment laissé tomber les Beaux-Arts.

Quand le bébé revint à la maison, Agnès et Maman se consultèrent pour savoir comment l’habiller. Je m’approchai. Dans la chambre j’ouvris un placard et quelques tiroirs. Il y avait autant de rose que de bleu. Je m’étonnai. Du ton le plus naturel, Agnès dit :
- Nous ne savions pas si ce serait un garçon ou une fille, alors on tout acheté en double. Et puis on s’est dit : comme ça il aura le choix.
- Le choix ?
- Tu ne voudrais pas qu’il soit comme toi ? Moi, ça me plairait.
- Mais enfin, on ne va pas habiller en filles tous les garçons qui naissent !
- C’est bien ce qu’on a fait avec toi ? Tu t’en plains ? Moi pas.

Effectivement, je ne voyais aucun argument. Je n’avais pas levé le doigt à ma naissance pour demander si je pouvais être une fille. Maman avait décidé pour moi. M’en trouvais-je bien aujourd’hui ? C’est ce que je ne savais pas. Vraiment je ne voudrais plus être un homme. Je ne l’avais jamais voulu. De là à considérer que tout garçon gagnait tout à être élevé en fille ! Cela choquait le plus élémentaire bon sens. Cela revenait en plus à jouer dans la vie à l’alpiniste qui choisirait la voie la plus difficile dans les conditions les plus rudes. Encore ne le faisait-il que par goût de la performance. Chaque fois qu’il se promenait dans la rue, il ne choisissait pas le chemin le plus long, etc. tandis que notre fils… Brusquement, je fis un rapprochement : pourquoi il s’appelait-il Dominique ? J’eus un doute.

Quelques jours plus tard, le soupçon était levé. Le certificat d’état civil portait : sexe masculin. Je finissais par douter de tout. L’idée que Maman fût perverse m’était, par exemple, venue. Alors que c’était la femme la plus équilibrée qui fût.


Responsable du site : Lucie Sobek


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