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Sylvine

Sylvine

(publié: 09-02-2008, 14:52 )

La Communion du Rouquet
par Sylvine

Vous devez probablement vous souvenir de ces fameuses " communions solennelles " qui marquaient nos préadolescences jusqu’à la fin des années soixante-dix…

Côté religion, c’était, disait le curé, quelque chose de super important, une sorte de rituel qui nous faisait passer en quelque sorte du statut protégé de l’enfance à celui de l’âge adulte.

Défilés d’aubes blanches, cœurs de la paroisse dont c’était le point d’orgue de la saison, église dépoussiérée et odeurs doucereuses d’encens, sans parler de ces hosties que l’on avalait en se retenant de rire avec peine, tout cela faisait de cette cérémonie un des évènements majeurs du village.

Nous étions neuf cette année là, quatre filles et six garçons. Déjà, je me distinguais par ma petite taille, ma bouille ronde et surtout par mon incroyable tignasse rousse accompagnée évidement par une pluie de tâches de rousseur sur tout le corps.

J’étais donc le rouquin du village, le gamin dont on se moque, celui qui pue, celui qui porte malheur. Mes sœurs y avaient échappé avec leurs longs cheveux blonds, Odile avait un an de plus et Claire un an de moins. J’étais donc le vilain petit canard roux coincé entre les deux Grâces blondes.

Mais ce jour là, je me fichais bien de tout ça, ce qui m’intéressait au plus haut point dans cette communion, c’était le banquet familial avec mes cousins et cousines et surtout les cadeaux qui allaient avec !

Parmi mes oncles et tantes présents, il y avait ceux que j’aimais, ceux que je n’aimais pas et ceux susceptibles de m’offrir de beaux cadeaux. Et on les trouvait à parts égales dans les deux premières catégories… il me fallait être diplomate !
Mon parrain, le frère aîné de papa, un homme riche et puissant m’a offert la traditionnelle montre en or.

Son frère, celui que je n’aimais pas trop, un superbe portefeuille en cuir, vide évidement. Le troisième frère de papa s’est chargé de l’appareil photo. Il était content de lui, pas moi : c’était un Kodak 126… moi qui rêvait de reflex 24x36 japonais ! Pour le même prix, j’aurais encore préféré un Zénit russe… m’enfin.

Mais le cadeau que j’attendais, c’était celui de tante Angèle. Depuis quelques mois, des bruits insistants circulaient : on y parlait de mobylette ! Il faut dire qu’elle avait quelques moyens, la tante Angèle ! Au cours de conversations surprises, j’avais appris qu’elle avait " avait fait la vie à Paris "… on parlait qu’elle était propriétaire de plusieurs hôtels, " de passe " précisait papa avec un sourire entendu alors que maman, sa sœur cadette, partait vers la cuisine s’occuper de quelque chose.

Elle était riche mais aussi très gentille, je l’aimais beaucoup, bien qu’il était évident que c’était d’elle que je tenais mes foutus cheveux roux.

Une mobylette, pensez donc ! Le cadeau de ma vie, celui qui allait enfin me propulser en tête de la bande, moi le " rouquet " (contraction de rouquin et de roquet) méprisé par à peu près tout le monde. Oh, c’est vrai, j’avais bien quelques amis, - plutôt des filles - et un ou deux garçons rejetés comme moi.
Tante Angèle avait bien dû le deviner et en m'offrant une mobylette, elle allait me mettre le pied à l’étrier pour la vraie vie !

Bien sûr, j’avais remarqué qu’aucune mobylette n’était cachée à la cave ni au garage, encore moins au grenier. En plus, je me disais que tante n’avait pu la mettre dans le coffre de sa DS 23 à Injection Electronique… non, ce qu’elle allait me remettre en main propre, c’est le coupon d’assurances ou le bon de garantie et papa irait avec moi la chercher chez le concessionnaire Motobécane, monsieur Giudini. Ca devait être ça. Ca ne pouvait qu’être que ça.

Donc, je m’attendais à une enveloppe, mais, ce qu’elle m’a remis en m’embrassant, c’est un paquet enveloppé dans du joli papier vert. Il devait faire trente centimètres au carré et seulement trois d’épaisseur, à la fois trop grand pour un bon de garantie, trop petit pour une mobylette.
Vous pensez bien que j’ai totalement détruit le papier pour découvrir en dessous… un grand écrin en velours vert en forme de cœur.

J’étais tellement dans la surprise un peu déçue que je n’ai pas remarqué le vent de panique silencieuse qui soufflait autour de la table.

Je l’ai ouvert, il contenait de magnifiques bijoux. C’était, je le savais, et tout le monde ici aussi, la fameuse Parure d’Emeraude de Tante Angèle.

Papa tournait nerveusement sa cuillère dans sa tasse, maman est allée en cuisine faire quelque chose, mes oncles, leurs épouses et enfants ne comprenaient rien à rien et mes sœurs ont violemment claqué la porte de leurs chambres respectives.

Je connaissais l’histoire : tante Angèle l’avait reçue d’un riche américain ou brésilien je ne sais plus et avait dit " qu’elle l’offrirait à une de ses nièces " le moment venu.
Odile l’avait ratée l’an dernier pour sa communion et Claire l’espérait l’an prochain pour la sienne.
Et c’était moi… qui pourtant n'est pas une nièce.
" Mais, tante… je suis heureux, mais ça doit être une erreur ! "
" Pas du tout… " Elle a sorti les boucles et les a approchées de mes oreilles. " Vois-tu, ce sont tout à fait tes yeux verts, ma chérie… "

Les larmes me sont venues aux yeux. " Tante, ce n’est pas possible, je suis un… " Elle m’a interrompu et m’a regardé droit dans les yeux : " tu es ce que tu es et tu les porteras un jour, et formidablement bien, j’en suis certaine. "
Alors, je me suis posé la question : comment tante Angèle avait-elle su ce que je souffrais à cacher à tous ceux que j’aimais ?
Et là, devant mes parents, oncles et tantes, cousins et cousines, je n’ai pu retenir les vagues de bonheurs qui me submergeaient.

Voilà comment j’ai dû renoncer à la superbe Mobylette " orange " SP 50 que j’attendais. Il a fallu attendre plusieurs années et mon premier salaire de vacances pour acquérir mon Vélosolex.
Je n’ai jamais regretté, car il était bien plus pratique avec les jupes droites.


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