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HOMMEFLEUR, le site pour les hommes qui aiment les femmes, au point de vouloir leur ressembler !
Carolyne

Carolyne

(publié: 14-01-2012 18:44:03 )

Erreur de jeunesse…

Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là
Et tu marchais souriante
Épanouie ravie ruisselante
Sous la pluie
Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest
Et je t'ai croisée rue de Siam
Tu souriais…
Jacques Prévert, Paroles, 1946. Je vous invite à continuer la lecture de ce magnifique poème.

1988, non, il ne pleuvait pas ce soir-là.

Je remonte la rue Jean-Jaurès. Le vent qui souffle dans mon dos plaque ma longue jupe et fait virevolter les pans de mon trenchcoat. Les reflets que me renvoient les vitrines me rassurent. Je me trouve jolie. Mais l’angoisse réapparaît dès que je croise les rares passants, probablement étudiants en goguette. Je sens les regards, les anticipe, les redoute.

Je me suis préparée soigneusement dans la petite maison de campagne que je loue dans les environs. Le feu de cheminée diffuse une douce chaleur. Je suis épatée par mes jambes, nouvellement rasées, et enfile avec une volupté réelle un collant de nylon noir transparent. Dans le miroir je vois une jeune femme à mon goût déjà élégante, dont le chemisier cintré et les escarpins soulignent les formes. Cependant, une autre forme moins féminine dissimule mal mon émotion…Il est temps de cacher tout ça et de parfaire ma silhouette. C’est un vrai délice de me glisser dans la longue jupe que j’ai achetée la semaine passée au Leclerc de Saint Brieuc. La fermeture éclair ajuste la taille haute de ce long fourreau rouge. D’une main je corrige le bas du chemiser et fait mes premiers pas. Plénitude est le mot qui désigne alors le mieux ma sensation. La jupe entrave mes pas malgré la longue fente du dos. C’est tout mon corps qui vibre aux caresses des matières en mouvement. Je rends grâce à cette forme de camisole qui certes limite mes mouvements, mais surtout modèle ma démarche et provoque un joli balancement de hanches. Pas de doute, il faut que je sorte, même si je travaille demain, et que j’aille affronter le monde.

Demi-tour, je dois tenir le sac à main que je porte en bandoulière. Mon ami le vent semble redoubler d’impertinence maintenant qu’il me fait face. Entre le sac, les cheveux en bataille, et le trench, j’ai de quoi bien m’occuper en abordant la place de la liberté. Seule ma jupe résiste bravement, n’offrant que peu de prise aux assauts. Je me sens très féminine.

Alors que je contourne la mairie par la gauche, un homme apparaît et m’interpelle « vous avez l’heure s’il vous plaît ? » battements de cœur ; je ne réponds pas, ne le regarde pas et accélère autant que ma jupe l’autorise. Toujours cette peur d’être démasquée…

Je descends les escaliers qui mènent à la rue de Siam. Plus calme, je ressens à nouveau cette délicieuse sensation de déhanchement. Je prends la rue Algésiras et me retrouve abritée du vent. J’ai garé ma voiture un peu plus loin. Je suis satisfaite de mon aventure de passante du soir, avec ses poussées d’adrénaline et surtout la belle image de femme offerte aux caprices du vent.

Je sens des pas derrière moi, mais un coup d’œil rapide contredit la sensation, il n’y a pas que des pas, mais un homme qui me suit. Aucun doute, il est très proche peut-être à deux mètres, peut-être moins…C’est le type de tout à l’heure ! Son pas est réglé sur le mien. Que faire, j’accélère, lui aussi. Me réfugier dans la pizzéria où les employés font le ménage…Le Tudor Inn lui aussi ferme ses portes. Je n’ose pas. Je me concentre… rejoindre ma voiture…elle est tout près… coquetterie mal placée, je pense à garder une démarche féminine. Je rejoins ma voiture sur le petit parking, j’entends un « bonsoir », réponds à l’identique et vois l’homme s’éloigner.

Je saisis ma clé dans la poche de mon imper et ouvre la portière de ma super cinq. Je n’ai pas le temps de réagir. D’un mouvement brusque, l’homme me fait basculer dans la voiture. Je me retrouve plaquée, le dos sur les deux sièges avant. Panique…L’homme est sur moi. J’ai peur. D’un couteau, qu’il me tue. Je suis terrorisée. Je ne crie pas. Je me débats. Ma jupe empêche tout mouvement des jambes, mais avec les mains j’essaie de le pousser. Il tente d’immobiliser mes bras en saisissant mes poignets. Je résiste. Je ne saurai dire après combien de temps, il s’arrête et me dit : « tu as plus de force que moi » Il fixe mon visage et dans la lumière évanescente d’un lampadaire qui parvient dans l’habitacle, je soutiens son regard. Je cesse de me débattre. Puis, Il palpe mes seins. Les collants qui remplissent les bonnets de mon soutien- gorge ne font alors plus illusion. Je lui dis : « je suis un mec ».

L’effet est immédiat. Je ne sais plus comment, nous nous retrouvons assis, lui sur le siège conducteur, moi sur le siège passager. Il est visiblement abattu, déconcerté. Je lui dis qu’on doit faire comme s’il ne s’était rien passé, qu’il doit rentrer chez lui. Je sors des paroles réconfortantes, car j’ai toujours peur, je veux qu’il s’en aille. Je ne me rappelle plus s’il a dit autre chose avant de partir.

Je ne me rappelle pas de son visage, mais on aurait dit un type normal ; il devait avoir une trentaine d’années ; il portait un blouson clair barré d’une bande plus sombre ou l’inverse.

Je me rappelle de mon état en rentrant chez moi. Bizarre, excitée d’avoir été prise pour une fille, interloquée qu’une telle chose m’arrive, ni plus ni moins qu’une tentative de viol.

La morale de cette histoire vraie :
Il est idiot de se balader seule en fille à deux heures du mat. C’est évidemment valable pour les femmes.

Il vaut mieux répondre en général lorsque l’on est interpellée, et surtout ne pas hésiter à demander de l’aide quitte à être « démasquée » plutôt qu’agressée.
Ce que je me dis depuis :
J’ai sans doute évité ce soir-là qu’une femme soit agressée. Mais a-t-il récidivé ?

Je regrette de ne pas avoir porté plainte. Je n’y avais même pas pensé. Aujourd’hui en tout cas j’irais signaler ce type au commissariat le plus proche.
Brest :

Je tiens à préciser que j’adore cette ville, que j’ai toujours plaisir à y retourner et qu’elle s’est bien reconstruite depuis que Jacques Prévert concluait Brest, dont il ne reste rien.
On y croisera toujours des Barbara, ou des miss Laury, épanouies, ravies, ruisselantes.

Carolyne


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