barcarena9@gmail.com
inforbart@gmail.com
malucao2017@outlook.com.br
isacczim@ig.com.br



Je me connecte  Hop !
J'ai perdu le mot de passe  Hop !
S'inscrire comme membre du site  Hop !

HOMMEFLEUR, le site pour les hommes qui aiment les femmes, au point de vouloir leur ressembler !

« », une petite histoire imaginée par micheleanne

1 Soif de sable 3 jeanne tvq@femmes.net 29-10-2004, 15:19 par Michèle-Anne Roncières





À Michèle-Anne Roncières,
Enfant hors du monde
M.A.R.



AVERTISSEMENT: HISTOIRE TRES DURE, A NE LIRE QUE SI VOUS AVEZ ABSOLUMENT LE MORAL.



Troisième Partie.

Sitôt de retour à Paris, mon premier mouvement fut de me rendre à l'agence " Lux Tenebrae ", dont le Directeur me reçut avec rien moins que de l'aménité:
- "Mon cher Monsieur, " me dit-il sans me faire asseoir, " Je n'aime pas beaucoup qu'on se paye ma tête... "
- "Comment cela ? " fis-je; "vous ne l'avez pas trouvée ? "
- "Si, justement ! vous m'aviez bien dit que vous ne connaissiez pas cette...(il consulta ses notes) Nicole Vernandier ? "
Je sursautai. Non seulement elle se prénommait vraiment Nicole, mais elle portait le même nom que moi !
- "Mais je vous le jure... C'est une homonymie de pur hasard ! "
- "Et qu'elle habite au 35 Rue Boileau, c'est un hasard également, je suppose ? "
Là, je ne comprenais pas où était le problème, et j'allais le demander, quand le Directeur me tendit froidement le dossier pour me signifier clairement qu'il me mettait à la porte:
- "Ecoutez, Monsieur, si vous vouliez qu'on suive votre femme, dont vous êtes apparemment séparé, vous n'aviez qu'à le dire: nous avons l'habitude, nous aurions été mieux préparés et nous aurions fait un meilleur boulot; parce qu'évidemment , dois-je vous le dire, c'est pas clair comme dossier... Mais faute de la confiance qui doit exister entre nous, je pense qu'il est préférable d'en rester là... ça fera 1000 F, pour clore l'affaire... "

Je ressortis à l'air libre la chemise sous le bras, la tête pleine de questions, attendant d'être de retour chez moi pour examiner les pièces que l'agence avait réunies à mon intention. Il y avait d'abord plusieurs séries de photographies, une par jour de surveillance: la première l'avait surprise devant le cinéma, puis à sa sortie et l'avait suivie jusqu'à son domicile; les autres retraçaient ses sorties extérieures des jours, ou plutôt des nuits, suivantes.

Nicole Vernandier ne menait pas une existence bien tapageuse: le cinéma tous les soirs, puis retour chez elle en flânant le long des boulevards et avenues qui l'y conduisaient... une fois le cycle Garbo achevé, elle n'avait d'ailleurs pas reparu... Ne parlant à personne, ne voyant personne, elle semblait un fantôme errant dans la Cité, apparaissant ça et là et disparaissant aussitôt dans ses propres murs. Jetant un coup d'oeil sur un plan de Paris pour situer le 35 Rue Boileau, je m'aperçus avec surprise qu'il était adossé à mon propre immeuble, et compris mieux alors les insinuations du Directeur de l'Agence: comment croire que je ne connaissais pas une femme qui portait mon propre nom et habitait dans le même pâté de maisons ?

Chose curieuse, si les enquêteurs mentionnaient avoir trouvé au 35 la boîte aux lettres de Nicole Vernandier, ils n'avaient pu identifier son appartement avec précision. Elle ne sortait que la nuit, après 20 heures, et y rentrait dormir, mais ne donnait pas signe de vie dans la journée, pas même pour aller travailler. Enfin, ils avaient noté que sa boîte aux lettres avait été plusieurs fois relevée par un homme, qui était apparu dans le hall avant ses sorties, mais avec lequel elle n'avait jamais été vue: il n'y en avait pas de photographies, l'enquête demandée relevant, d'après la fiche que j'avais en mains du type " Recherches et Identifications ", et non pas des " Investigations sur Vie Privée "... C'était tout. J'étais content de posséder de nouvelles photographies de Nicole, sur lesquelles je m'attardai longuement avant de me coucher, épuisé par la fatigue accumulée lors du stage, et de verser dans des rêves enchanteurs qui relevaient d'un autre monde.

Ce fut le lendemain que, avant de me rendre à mon bureau, j'allai explorer le porche du 35 Rue Boileau. J'espérais un peu rencontrer là Nicole et trouver peut-être quelque occasion de faire connaissance... mais ce ne fut pas le cas: deux ou trois mégères me toisèrent de haut et l'air pincé en me surprenant devant les boîtes aux lettres, à tel point que je fus à deux doigts de détaler. Ce qui me retint, ce fut le nom de Nicole Vernandier que je lus sur l'une d'elles, formé d'élégants caractères tracés à la main. Dire qu'il y avait peut-être dans cette boîte, à portée de la main, tout ce qui faisait la vie de cette femme que je désirais tellement connaître... ses goûts, des lettres de ses amis... je me contentais d'effleurer la boîte de ma main et de murmurer son prénom, tremblant qu'on ne m'entende et qu'on me juge ridicule. Je cherchai dans le hall où devaient la porter ses pas quand elle rentrait le soir... et je tombai machinalement non pas sur la porte principale qui menait aux étages, mais à un accès latéral qui semblait descendre dans les caves; Je ne sais pourquoi, j'y fus irrésistiblement attiré et me retrouvai au sous-sol, dans un dédale de couloirs au sol recouvert de sciure et dont l'uniformité des portes des caves eût constitué un piège pour n'importe qui. Cependant, je m'y promenais sans y penser, comme mû par un infaillible instinct, qui me conduisit à la longue en un endroit qu'il me sembla reconnaître peu à peu jusqu'à être certain qu'il s'agissait... de la partie du sous-sol correspondant à mon propre immeuble ! J'avais suivi sans le savoir le chemin qui faisait communiquer les deux adresses entre elles.

Passant devant ma cave, dans laquelle il me semblait n'être pas descendu depuis des lustres, j'en voulus vérifier l'état et le contenu; mais je ne pus ouvrir la porte: quelqu'un en avait changé la serrure ! Furieux, je me promis de revenir le soir avec un pied de biche et force serrures pour me rétablir dans mes droits: la chose était courante, à ce que l'on disait dans les vieux édifices, où des individus peu scrupuleux s'appropriaient volontiers les dépendances d'autrui, souvent vétustes et mal défendues. Au bureau, j'eus toute la journée l'esprit ailleurs. Cette accumulation de coïncidences semblait former devant moi quelque sombre perspective qui m'intriguait autant qu'elle m'effrayait. Et au moment de défoncer ma propre porte de cave, le soir venu, avec du matériel acheté à la quincaillerie du coin, je fus stupéfait de me surprendre à me demander un moment s'il ne valait décidément pas mieux renoncer à tout, à Nicole, au bonheur espéré, à ma cave, et poursuivre la vie tranquille et ignorante qui avait été la mienne jusqu'à lors. Dans un sursaut, j'abattis violemment la masse sur la serrure, faisant éclater le bois de toute parts. Il ne restait plus qu'à pousser la porte.

On n'avait pas seulement confisqué ma cave: on l'avait aménagée. Quelqu'un y avait installé la lumière et mis en service une dérivation pratiquée sur certains des tuyaux d'eau de l'immeuble. il y avait des meubles: un canapé lit, une table, une chaise, une petite armoire. Je me souvenais très bien de l'aspect des lieux, quand j'avais acheté mon appartement: sales, obscurs, poussièreux, ils avaient été transformés et c'était devenu en somme un endroit très vivable. Je ne vis qu'ensuite l'espèce de grande glace au fond, avec devant une table de maquillage comme on en voit dans les loges d'artistes. Mû par un affreux soupçon, je me précipitai sur l'armoire: elle contenait ce que j'avais deviné: des vêtements de femme dont je reconnus plusieurs: ceux que portait Nicole sur les photographies que j'avais d'elle.

Assommé de surprise, je tombai sur le lit. Qui était cette femme ? Tout cela relevait-il d'une tactique de sa part visant à, sous prétexte que nous portions le même nom, profiter de mon appartement, de mes biens, après m'avoir, peut-être, assassiné ? Qui me disait qu'elle n'avait pas investi mon appartement pendant que j'avais été en province, qu'elle n'en avait pas déjà les clefs ?

Furetant un peu plus, je fus surpris de découvrir, sur d'autres rayonnages, une collections de " têtes " sur lesquelles reposaient quelques perruques de diverses formes et longueurs. Je ne m'y attendais pas, et reculai inconsciemment devant la monstruosité de ces visages lisses de polystyrène blanc.

Dans un coin, j'avisai son sac, que je fouillai avidement; point de papiers d'identité, pas de clefs non plus: rien que divers accessoires de maquillage et des babioles qu'on trouve habituellement dans les affaires des femmes; mais aussi un peu d'argent et, surtout, des rectangles de papier marron que je ne saisis qu'en tremblant: des billets de train aller-retour sur la ligne Paris-Lyon; tous permettaient de quitter Lyon vers 18 heures le soir, d'arriver à Paris à 20, de suivre une séance de cinéma, de dormir ici, de repartir de Paris à 6 heures du matin et d'être à Lyon à 8. La salle des cours était tout près de la gare des Brotteaux. Et je m'étonnais d'être si fatigué...

Le voile se déchira d'un seul coup dans ma tête avec une douleur insupportable.

Je suis resté au moins trois heures sur ce lit sans pouvoir même me lever. Je ne sais pas quelle heure il est dehors. A présent je suis devant la glace. Je sais que je suis habillé en homme, je le vois bien quand je regarde directement mon propre corps; et pourtant, dans le miroir, c'est Nicole que je vois, avec ses cheveux, son maquillage, ses bijoux. je suis en train de devenir fou, c'est sûr. Pourquoi dis-je cela: ne l'étais-je pas avant, au point d'ignorer ma double vie ?

Elle me plaît, Nicole, de plus en plus; elle m'attire, comme la lumière, un papillon. Comment s'appelait cette fille, déjà, que j'ai appelée La Garce pendant des années et des années ? Je trouve qu'elle lui ressemble un peu. Ca me fait drôle et je le lui dis. Elle sourit. Quel sourire délicat que le sien... Ca fait des heures que nous parlons, par signes, car elle ne semble pas comprendre tout ce que je lui dis. Elle fait tous mes gestes pour montrer qu'elle est d'accord. Je ne peux pas supporter de me cogner à ce miroir quand je veux la toucher. Elle est fine, élégante, belle. Tout ce que je suis, moi aussi, à l'intérieur. Comment la rejoindre ? Oh, il y a un moyen: je vois sur la tablette le grand rasoir-sabre de mon grand-père: je me souviens l'avoir apporté là parce qu'il rase de plus grandes surfaces à la fois que nos petits rasoirs modernes... Peut-être que je pourrais tout doucement découper cette image du miroir et, avec d'infinies précautions, la plaquer sur moi, comme une décalcomanie ? Elle se fondrait en moi, ou plutôt c'est moi qui me fondrais en elle, jusqu'à ne plus être que cette image.

Ca me donne une idée: je prends le rasoir; elle aussi, elle le fait, pour me montrer que oui, c'est ça qu'il faut faire. que veut-elle ? Se raser ? Elle n'en a pas besoin, elle ! Mais... ? NON ! J'ai vu l'éclair luisant du tranchant dans la glace... elle m'a... elle l'a fait. Sa veste rouge est faite de mon sang qui coule et diffuse sur ma poitrine.

Je n'ai pas mal. Au contraire. Elle est très douce avec moi maintenant. J'ai fini par tomber sur le sol, mais grâce à mon sacrifice elle a pu sortir de la glace et se penche sur moi. J'ai un peu froid mais elle me réchauffe de son souffle de vie. Ah, Pierre, comme tu avais tort: pas de dunes, pas de soif, pas de solitude.... Comme elle est douce... Nicole.


Responsable du site : Lucie Sobek


Avis de lecteurs - note moyenne : 0
Merci de donner une petite note sur ce texte :
j'ai aimé...

1 Pas du tout
2 Un peu
3 Beaucoup
4 Passionnément
5 A la folie
Accès version smartphone - Contacter le webmestre