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HOMMEFLEUR, le site pour les hommes qui aiment les femmes, au point de vouloir leur ressembler !

« », une petite histoire imaginée par micheleanne

1 C'est grave Docteur ? jeanne tvq@femmes.net 29-10-2004, 14:58 Par Michèle-Anne Roncières
(Extraits du Journal de Michèle-Anne Roncières)

Extrait Numéro 1
Lundi, Midi

J'imagine qu'il est arrivé à plus d'une de se coucher en priant le ciel de lui accorder la grâce de se réveiller le lendemain dans un corps de femme ? Eh bien, moi aussi. Trente ans durant. Chaque soir. Et jusque là ça n'avait jamais marché.

Il faut bien dire que ma requête n'était peut-être pas formulée de façon très catholique... Question de caractère, sans doute... Ca donnait quelque chose du genre:

-"Dieu, espèce de sale ordure, quand vas-Tu enfin reconnaitre Tes erreurs et réparer Tes conneries ? Si demain matin je ne suis pas une femme, je me mets à croire en Toi juste pour te maudire, Toi et toute Ta clique, jusqu'à la Dix mille neuf cent cinquantième génération !" (J'ajoutais une génération par soir)

Et le matin suivant, je le maudissais consciencieusement, bien entendu. Dieu, faut le comprendre: d'abord, il est comme tout le monde, il n'aime pas qu'on lui montre qu'il s'est trompé. Et bien qu'il se soit pas mal adouci entre l'Ancien et le Nouveau testament, il est quand même encore relativement pointilleux sur les formules de politesse.

Or, hier soir, comme j'étais déjà dans mon lit, à demi-endormie, éperdue de fatigue (j'avais passé la journée à tripatouiller mon image dans Virtual Look) et en proie à une grande lassitude morale (tous mes essais ne me faisaient pas ressembler à mieux qu'un docker fardé de frais), je me contentai de marmonner:

"Seigneur, faites que je sois enfin une femme s'il vous plaît..."

Celle qui a été bien surprise, ce matin, c'est mon épouse. C'est elle qui m'a réveillée. En hurlant:

-"AAAAAHHHH ! Qui êtes-vous ? Qu'est-ce que vous faites là ?"

Sur le moment, bien sûr, je n'ai pas compris. J'ai bredouillé des "Ben enfin chérie, c'est moi, qu'est-ce qui te prend ?" dont le son me paraissait quand même un peu bizzarre, jusqu'à ce que je vois mon reflet dans la glace de l'armoire à côté du lit.

Vous voyez la fille qui fait la pub pour Virtual Look, celle qu'on voit sur la couverture ? Oui, la belle blonde... Ben c'était moi. C'est tout Dieu ça: il n'a jamais fait dans la dentelle; où il pousse joyeusement tout le monde à la débauche, ou il te patafiole tout le monde en statues de sel l'instant d'après. Ou il te crée un Paradis, ou il fait des millions de morts. Un jour Yéti, le lendemain Top-model. Pas de demi-mesures ! Comment ça je lui ressemble un peu ? Normal puisque je suis à son image ! Bon, tout ça pour vous dire que l'image de Dieu que j'avais dans ma glace ce matin, elle était drôlement chouette.

J'ai sauté du lit pour aller voir ça de plus près. Evidemment, je me suis cassée la figure, parce que j'avais toujours les réflexes musculaires de mon ancien corps; seulement, comme j'avais cent, voire cent cinquante kilogs en moins, à vue de nez, j'ai fait un bond trop violent, trop large, et j'ai failli aller m'esquinter mon portrait tout neuf dans le mur d'en face... Avouez que ç'aurait été dommage... Enfin, je n'ai rien abîmé, c'est l'essentiel. Bon, alors une fois que j'ai été devant la glace, j'avoue que j'ai été conquise. Même dans ce sordide pyjama à rayures qui évoquait le bagne et mon enfer quotidien (un cadeau de ma femme), et qui flottait parce qu' on aurait pu y mettre trois ou quatre filles comme moi, il n'y a pas à dire, j'avais de l'allure. J'ai pas osé regarder tout de suite ma poitrine à l'intérieur de la veste parce qu'il y avait comme une présence hostile dans la chambre; je me suis contentée de mettre les mains dessus (fines, les mains !), et je ne peux pas vous dire ce que ça m'a fait.

J'ai encore regardé ma nouvelle silhouette et j'ai murmuré un:

-"Mmmmmmouais... pas mal..."

Juste pour pas que Dieu s'imagine que je lui pardonnais si facilement d'avoir aussi longtemps gâché ma vie par son entêtement diabolique. Mais en réalité, j'étais drôlement contente et j'aurais pu passer des heures devant cette glace (En fait j'étais devant celle du milieu, par habitude, parce qu'elle est plus grande et que pour voir mon corps de mec il me fallait les deux minces sur les côtés, en plus; mais là, j'aurais aussi bien pu tenir dans la moitié d'une des petites). En fait, j'ai du décoller de devant parce que ma femme tentait de me pousser violemment hors de la chambre avec le manche de son balai et que ça aurait pu faire de vilain bleus sur mon corps délicat..

-"Mais arrête, voyons", lui ai-je dit, "C'est moi !"

Je ne dis pas qu'elle a été facile à convaincre, ça non. Ca a duré toute la matinée. Il a fallu que je lui débite dans le détail tous les souvenirs que nous sommes censées avoir en commun depuis notre mariage (moi qui n'avais songé qu'à les oublier jusque là!), depuis l'histoire de ma cousine qui avait oublié ses papiers alors qu'elle devait me servir de témoin, jusqu'aux trente secondes que, la veille, j'avais laissé cuire les nouilles en trop. Mais elle a bien été obligée de se rendre à l'évidence et de constater que si la nuit portait conseil, elle m'avait aussi transformée en femme.

-"Et tu vas rester comme ça longtemps ?", a t'elle demandé d'un ton rogue (le seul qu'elle ait, d'ailleurs).

-"Mais... je ne sais pas chérie...", ai-je répondu avec sincérité en espérant évidemment que le changement fût au moins définitif.

-"En tout cas, tu vas me faire le plaisir de filer chez le médecin dès cet après-midi !"

-"Oui-Chérie-bien-Chérie-c'est-une-bonne-idée-Chérie-comme-tu-voudras-Chérie", ai-je fait, comme d'habitude en pareil cas.

-"Et pour ce qui est des enfants, c'est toi qui leur expliqueras; moi je ne veux rien avoir à faire avec tout ca !"

-"Oui-Chérie-bien-Chérie-c'est-une-bonne-idée-Chérie-comme-tu-voudras-Chérie" ( bis)

Et elle est descendue passer l'aspirateur, de rage, au rez de chaussée. Je crois que tout y est passé: la poussière, la moquette, et même le parquet qu'il y avait dessous. il a dû lui en falloir, des sacs, pour contenir tout ça ! Qu'elle ne compte pas sur moi pour refaire un parquet, en attendant... Il y a des travaux de bête de somme dont je suis désormais incapable ! Et toc !

Extrait Numéro 2
Lundi Soir

Ouf, quelle journée...

Avec les enfants, tout s'est bien passé. Je leur ai dit que j'étais ma soeur, et que j'étais venue vivre avec nous pendant que mon frère, c'est à dire moi-même, s'absentait (ou m'absentais) temporairement [Bien que je sois toujours là, en fait, sous une autre forme, mais je le précise au cas où vous n'auriez pas lu l'Extrait N°1 de mon journal; c'est juste pour simplifier les choses... comment ça, je les embrouille ?]. Naturellement ma femme a bien précisé que je ne serais pas là très longtemps... Elle peut toujours rêver...

Les enfants ont ouvert des yeux ronds devant cette tante Michèle-Anne dont ils n'avaient jamais entendu parler ("Où as-tu été pêcher ce prénom ridicule ?" a demandé ma femme), mais j'ai vu tout de suite que je leur plaisais beaucoup.

-"Qu'est-ce que tu fais comme métier ?" a demandé ma fille.

-"Heu... Je suis mannequin", ai-je répondu. Et après tout c'est bien ce que fais mon "sosie", non ?

"Mannequin, rien que ça !" a encore ricané ma femme: "avec tes cuisses bouffies de graisse, tes rides séniles et ta couperose déliquescente ! Tu rêves ma pauvre fille !"

On peut trouver ma femme exagérément difficile... En fait ce n'était rien que de la bonne vieille mauvaise foi, devant laquelle j'ai préféré ne rien répondre: vous connaissez comment sont les femmes... Spécialement quand leurs épouses sont mieux qu'elles...

-"T'es belle, Madame !" a protesté mon fils de trois ans dans un sourire que je lui ai volontiers rendu.

Du coup ma femme est repartie en bas mettre un peu d'ordre: je l'ai entendue démolir les meubles à coup de hache, un peu comme dans "Shining".

Comme je ne pouvais pas rester en pyjama à rayures, il s'est posé la question des fringues: pas question de mettre celles de ma femme, qui n' a jamais eu aucun goût. Et puis, le moins qu'on puisse dire est que, en plus de faire des tailles différentes, nous n'avons pas la même conformation: mettons que je suis désormais à ma femme ce que le myosotis est à l'éléphant (Je ne parle ici que du physique, bien entendu... pour le reste la différence est encore plus grande).

Je n'avais pas le choix; j'ai mis à jour ma "planque" et en ai extrait cette fameuse robe "des grandes occasions" que nous avons toutes: la noire, longue, Taille 28, que nous espérons pouvoir mettre un jour après un régime d'enfer et que nous avons d'ailleurs achetée exprès pour nous motiver. Elle m'allait à la perfection (Je ne dis pas "comme un gant", parce que ça serait un peu facile et que ça détonnerait dans ce récit extrêmement sérieux). Je me suis un peu maquillée (comme une blonde, ça me change !), j'ai mis quelques bijoux d'une grande sobriété et je suis allée dans le hall pour sortir.

Ma femme était là. Elle est devenue verte.

-"Quest-ce que c'est que cette tenue ? Tu ne vas quand même pas sortir comme ça ?"

-"Ben quoi ? Je pouvais quand même pas mettre tes sacs à patate: je flotte dedans !", que je lui ai fait. Et toc !

-"D'où tu sors cette robe ? Tu vas quand même pas me dire que tes vêtements se sont transformés aussi, non ? Et ce maquillage ? Tu as beau me prendre pour une conne, y a des limites à ma connerie!"

-"Oui-Chérie-bien-Chérie-c'est-une-bonne-idée-Chérie-comme-tu-voudras-Chérie" (ter), ai-je fait, très embarrassée et à la recherche de l'explication miracle. "Eh bien vois-tu,", ai-je menti effrontément,"les produits de maquillage, je les ai pris chez notre fille, qui récupère les échantillons que tu jettes depuis que l'esthéticienne t'a dit que les teintes qui conviendraient à ton genre de beauté n'avaient pas encore été inventées et qu'il y avait peu de chance qu'elles le soient un jour vu qu'il n'y a pas de laboratoires de recherche cosmétique dans les zoos, tu te souviens ?"

-"ET LA ROBE ?", hurla cette afreuse entêtée.

-"Ah, la robe... j'avoue, c'est moi qui l'ai achetée en grande surface, je voulais me déguiser en Morticia Adams pour Halloween, mais curieusement je n'avais pas pu entrer dedans, alors j'ai renoncé. Mais tu vois maintenant elle me va, alors c'était pas de l'argent gaspillé finalement et tu devrais être contente, toi qui es tellement radin, non ?"

Là-dessus je suis sortie.

C'est drôle comme le monde extérieur m'a paru changé ! C'est sans doute parce que je ne le regardais pas avec les mêmes yeux... Il faut dire aussi que tout le monde me regardait car je n'avais pas pensé à mettre des lunettes noires pour passer inaperçue; mais dans un certain sens, porter des lunettes de soleil en Novembre ça n'est pas très commode, alors ce n'était pas plus mal.

Le regard des autres a évolué, lui aussi. Je n'ai pas besoin de vous décrire celui des hommes, je pense que vous l'imaginez sans difficulté (Au début ça surprend, et même ça gêne un peu, mais on s'y fait très vite): ce n'est pas qu'ils me reconnaissaient spécialement, mais en tout cas ils faisaient tout pour me donner l'impression d'être un lièvre le jour de l'ouverture de la chasse; quant à celui des femmes il était de deux sortes: soit du type soupçonneux (genre "Qu'est-ce qu'elle vient faire ici, celle-là ?"), soit du type étonné (genre "tiens je ne savais pas qu'elle était d'ici, celle-là"), mais rien de bien chaleureux, en somme.

Il n'y a décidément qu'avec les enfants qu'on peut avoir un contact sympathique: ils me souriaient au passage, comme ce petit garçon et cette petite fille que j'ai croisés avec leur mère. Je l'ai même entendue dire à sa maman qu'elle "voulait être comme la dame quand elle serait grande". Et son frère a renchéri: "Moi aussi ! Moi aussi ! Moi aussi !". Evidemment, sa mère lui a dit de ne pas dire de bêtise et lui a filé une gifle. J'avais envie de lui dire "Mais laissez Madame, j'étais comme lui quand j'étais petite !" Est-ce qu'elle aurait osé me donner une gifle, à moi ?

Un adulte que j'ai bien fait rêver, par contre, c'est le curé de l'église (Je mets "rêver" plutôt que "saliver" ou même "baver", parce que, bien que ça soit plus conforme à la vérité, ça fait moins beau)! J'étais entrée pour mettre un cierge: même si je ne connais pas les usages, il me semble que ça se fait dans ces cas-là. Mais moi, les églises je n'y suis jamais entrée que pour donner des concerts à l'intérieur, alors j'étais un peu perdue.

A force d'errer dans les transepts, je suis tombée sur le curé, qui avait un enfant de coeur sur les genoux et qui a aussitôt couru vers moi dès qu'il a pu remonter son pantalon.

-"Ma petite fille", a t'il commencé en tirant une langue à la Tex Avery, "que puis-je faire pour le salut de votre âme, arf arf arf ?"

Un peu embarrassée, j'ai bredouillé:

-"Heu... c'est à propos d'un miracle..."

-"Oui, je suis au courant, ma fille, " a t'il fait avec un petit ricanement pervers; "Je me proposais justement de vous le montrer... Si nous allions dans ce confessional ? Vous avez sûrement énormément de pêchés à commettre... je veux dire, à confesser ?"

Naïve et ignorante des pratiques de l'Eglise, je l'ai suivi dans l'espèce d'armoire qui s'adossait au mur. Ca m'a bien paru un peu bizzarre, étant donné ce que j'avais vu dans de vieux films, qu'on entre du même côté et qu'on se retrouve si serrés à l'intérieur. Mais c'est quand le vieux sagouin a mis une hostie sèche dans le distributeur de préservatifs que j'ai compris ! Je l'ai giflé sur les deux joues (bien qu'il ne m'en ait tendu qu'une), j'ai claqué la porte et je suis partie: c'est quand même pas parce que je suis blonde qu'il faut me prendre pour une idiote !

Extrait Numéro 2 (Suite)
Toujours Lundi Soir

Alors après, j'ai filé chez le médecin; pas du tout dans l'intention de ma femme de suivre le traitement miracle qui me ferait redevenir comme avant, bien entendu ! Mais pour m'informer au mieux sur mon nouvel état.

Le médecin, ça ne l'a pas trop surpris, mon histoire. Pensez, il voit de tout, dans son métier, même des hommes qui s'habillent en femme, alors... Il m'a fait mettre nue, avec le regard concupiscent d'un mathématicien qui découvrirait une nouvelle courbe hyperbolique de degré inconnu, et m'a examinée sous toutes les coutures.

Au bout d'un moment, il a posé son sthétoscope, rassemblé les extrêmités de ses doigts, pris un air pénétré puis a lâché ce diagnostic:

-"OuiOuiOuiOuiOuiOui...."

Silence.

-"Alors, Docteur ?", ai-je demandé, vaguement inquiète.

-"Bien entendu, je ne suis pas spécialisé en gynécologie... mais je crois pourtant pouvoir affirmer que vous êtes une femme !", a t'il affirmé avec toute l'autorité que confèrent sept années d'études en Faculté sanctionnées par un diplôme d'Etat. "Enfin, vous en avez tout l'air...", a-t'il ajouté en professionnel prudent.

-"Et... c'est grave ?", ai-je encore demandé, intimidée par les circonstances; "Enfin, je veux dire: je suppose que je dois changer des tas de choses dans mes habitudes, que mon métabolisme basal n'est plus le même, ce genre de choses, non ?"

Les hommes de science n'aiment pas que le profane utilise leur propre vocabulaire: le médecin fronça les sourcils, leva un doigt doctoral et me fit une courte leçon:

-"Ecoutez moi bien: Il y a à peu près autant de rapport entre le fonctionnement d'un corps d'homme et celui d'un corps de femme qu'il peut y en avoir entre un tracteur agricole et une automobile de luxe. Maintenant, s'agissant de vous en particulier, il est évident que vous êtes plus près de la Maserati que de la Bmw; Est-ce que je me fais bien comprendre ?"

J'avalai ma salive, repensant au steack frites (Carburant Diesel) que j'avais englouti au repas de Midi:

-"Tout à fait Docteur... Que dois-je faire alors ?"

Il ne me répondit que perdu dans ses pensées:

-"Pour être tout à fait franc avec vous, l'entretien d'un corps pareil me semble absolument hors de portée d'un novice... Pensez que rien qu'un simple steak-frites, par exemple, pourrait l'endommager gravement ! (Je faillis m'évanouir en entendant cela) Mais vous n'iriez pas faire une telle bêtise, n'est-ce pas ?"

-"Oh non Docteur..." protestai-je d'une voix mal assurée, sans d'ailleurs qu'il m'entendît.

-"Je vais vous donner une recommandation pour un confrère spécialiste, qui s'occupe d'une agence de mannequins; Il vous prescrira des sports adéquats, un mode et une hygiène de vie dont vous n'avez sans doute pas la moindre idée..."

Le médecin prit un bloc de papier et commença à rédiger sa lettre. Au bout de quelques minutes, je risquai une nouvelle question:

-"Mais Docteur... je voudrais savoir... Comment cela a t'il pu se produire ?"

Il reposa son stylo en souriant, signe que soit je venais de lui poser une question facile, soit que je le ui permettais d'exposer son idée favorite:

-"Oh, quant à cela, c'est très simple, vraiment: Voyons un peu... vous aimez manger du veau n'est-ce pas ?"

-"Oui, ai-je fait, interloquée;" Pourquoi ?"

-"Et du poulet, aussi, n'est-ce pas ?"

-"Oui, en effet; pourquoi ?"

-"Et du canard de temps en temps ?"

-"Oui, ca va de soi; pourquoi ?

-"Ainsi que du boeuf, naturellement ?"

-"Oui, bien sûr; pourquoi ?"

-"Et du poisson ?"

-"Oui, de même; pourquoi ?"

-"Avec un peu de Maîs ?"

-"Oui, sans doute; pourquoi ?"

-"Vous buvez du Perrier ?"

-"Oui, ça m'arrive; Pourquoi ?"

-"Et du Coca-Cola ?"

-"Oui, je l'admets; Mais pourquoi ?"

-"Eh bien alors c'est normal: rendez-vous compte qu'au cours de votre vie, vous avez mangé du poulet aux hormones, du veau aux hormones, du canard frelaté, de la vache folle, du poisson au styrène, des céréales génétiquement modifiées; vous avez bu du Perrier au Benzène et du Coca-Cola contaminé... Chère Mademoiselle, vous êtes le premier cas de mutation génétique spontanée chez l'Homme... Ou l'inverse... Enfin, bref cela n'a rien de bien surprenant et je m'y attendais depuis longtemps ! Accepteriez-vous de m'accompagner à l'Institut des Sciences pour la communication que je vais y faire (Inutile de vous rhabiller, ces messieurs en ont vu d'autres) ?"

-"Encore une précision auparavant, Docteur, s'il vous plaît: Est-ce que je vais rester comme ça, ou bien vais-je redevenir comme avant ?"

-"Eh bien, dans l'absolu... si ça a pu se produire une fois... je ne vois pas pourquoi ça ne se produirait pas à nouveau dans l'autre sens... D'ailleurs ça me donne une idée: peut-être pourriez-vous redevenir vous même... à condition de ne manger que des aliments parfaitement sains, si ça peut encore se trouver... Je vais vous faire une ordonnance pour chez Fauchon, à Paris, à côté de la Madeleine, vous connaissez ? Quand on fournit de la trompe d'éléphant, on doit pouvoir se procurer des légumes sans phosphates ! Ca ne va pas être donné, évidemment, et je ne pense pas que la Sécurité sociale vous les rembourse dans l'immédiat..."

Cela ne faisait guère mon affaire, de toutes façons; je le laissai pourtant remplir son ordonnance, sans avoir aucune intention de la suivre, et me fit préciser le point qui me tenait à coeur:

-"Voulez-vous dire, Docteur, que si je continuais à manger ces aliments frelatés qui ont fait mon ordinaire jusqu'à présent, je garderais à coup sûr mon apparence actuelle ?"

-"Ah oui, je le crains... C'est fini, mon petit, vous pouvez vous rhabiller... Et voyez comme c'est drôle: c'est vous qui me devez 130 Francs... Ah j'oubliais: pour ce soir, un petit pois cuit à l'eau... et demain, pour déjeuner, contentez vous de humer deux tartines, l'une de beurre et l'autre à la confiture (allégée, de préférence).

N'inspirez pas trop profondément si vous ne voulez pas jeûner pendant huit jours ensuite pour compenser... Et voici votre lettre de recommandation..."

-"Merci Docteur...", ai-je balbutié, éperdue de reconnaissance.

Extrait Numéro 3
Mardi Soir

En me couchant, hier soir, j'avais un peu peur de me réveiller dans ma vieille peau d'homme, mais non, ce matin les grognements féroces de mon épouse m'ont tout de suite rassurée avant même que j'ouvre les yeux. Quand je les ai ouverts, j'ai remarqué que les murs avaient été défoncés à coup de marteau-piqueur, ce qui m'avait échappé quand je m'étais glissée dans le lit à la faveur de l'obscurité (Je ne voulais pas que ma femme remarque trop vite la ravissante chemise de nuit que je me suis achetée en revenant de chez le médecin, alors qu'elle se taille des pyjamas rustiques dans les vieilles toiles cirées de la table de la salle à manger... Ca la gratte un peu parce que d'habitude elle se trompe de côté en assemblant les pièces...).

Je suis allée chez le spécialiste recommandé par le médecin; Mon Dieu que c'est dur de suivre ses prescriptions ! En gros, il faut courir dix kilomètres pour cinq grammes de légume consommé (oui, je ne mets pas de "s", et en plus la cuisson est exclusivement à la vapeur), boire 50 litres d'eau minérale par jour... Les distractions sont autorisées, à condition qu'il s'agisse uniquement de gymnastique rythmique ou de saut à la corde et qu'elle occupent les deux tiers du temps disponible. Bref, tout le temps que je passais à table, je l'emploie désormais à sautiller sur place. Et malgré tout ça, je n'arrive pas à tenir mes objectifs: sur la balance électronique à effet tunnel de l'Institut de Nutrition Moléculaire où je dois me rendre deux fois par jour, j'ai vu ce soir que j'avais pris un millionième de gramme.... de quoi me faire virer de l'agence...

Ah oui... parce que évidemment j'ai dû changer de boulot; ce n'est pas que ma mutation génétique ait réellement posé un problème: à vrai dire le patron s'est changé en âne il y a quinze jours, sans que ça surprenne personne... Mais plus question d'être Ingénieur Système avec un physique comme le mien, j'aurais dû le deviner; les hommes ça va encore (bien que, subitement, les postes de travail de tous ces messieurs se soient simultanément détraqués, comme ils me l'ont tous signalé aussitôt pour que je passe d'urgence)... Mais les femmes... et spécialement les vieilles petites chefes enboudinées dans leurs tailleurs hiérarchiques réglementaires qui puent un mélange de cigarette et de Saint-Laurent... J'ai vite compris que je ne pourrai pas supporter leur autorité mesquine et leurs observations ridicules ! Une demi-journée dans ces conditions m'a largement suffi et j'ai donné ma démission.

Heureusement, l'Agence de mannequins dont s'occupe mon tourmenteur médical m'a tout de suite engagée. Ca n'est pas tout rose non plus: faire des photos, on ne dirait pas, mais c'est un vrai métier... Il faut se connaître sous tous les angles, deviner ce que veut le photographe... et je débute, moi, qui n'ai pas l'exhibition dans la peau comme les autres filles ! Mais enfin, étant donné qu'on me paye d'ores et déjà au taux horaire de 750 000 Francs Hors Taxes par centimètre carré de fesse uniforme (c'est à dire corrigée des variations saisonnières de bronzage), je n'ai pas trop à me plaindre: c'est même mieux qu'un footballeur !

Bien entendu, et pour les raisons que l'on devine, je ne suis pas allée chercher ma nourriture dans les épiceries de luxe qu'on m'a recommandées; les aliments douteux dont j'ai absolument besoin pour persévérer dans la voie qui est, à ma grande satisfaction, devenue la mienne, on les trouve dans les grandes surfaces, à la disposition de ceux qui n'ont pas l'argent nécessaire pour se prémunir de ceux qui spéculent sur leur santé.

Enfin, on les y trouvait jusqu'à présent, car devant la violence de la réaction du public face aux derniers scandales alimentaires, le gouvernement vient de prendre une série de mesures déterminantes que j'ai découvertes avec inquiètude dans la presse de ce matin. Penser que, dès demain, pour toute vache folle découverte dans une étable on rasera entièrement la ferme après avoir abattu tout le troupeau, et même les exploitants ! En théorie, les aliments devraient donc redevenir progressivement plus sains... et ce serait bien là le danger, que cela me fasse remuter doucement vers mon état antérieur. En pratique, toutefois, je pense pouvoir miser sur la cupidité de la nature humaine, qui trouvera toujours plus avantageux de gagner cent francs sur un trafic que cinquante dans un commerce honnête, quitte à corrompre de la marchandise dans ce seul but. Mais sait-on jamais ?

Quoi qu'il en soit j'ai pris mes précautions: j'ai passé la fin de l'après-midi et la soirée à m'assurer de la constance de mes approvisionnement futurs. Certes, au début, je m'y suis prise assez maladroitement: demander tout de go aux commerçants, ou aux chefs de rayons des grandes surfaces, si leurs stocks sont douteux ne mène qu'à des protestations indignées ! On m'a prouvé à chaque fois, label, étiquetage et certificats à l'appui, que viandes, légumes et fromages étaient toujours de la plus haute, de la plus noble, de la plus pure origine... Mais quand on montre qu'on est prêt à payer généreusement pour tout produit légèrement suspect, voire rigoureusement inconsommable, alors les choses changent, et la loi de l'offre et de la demande rejoue à plein: J'ai donc pu conclure certains arrangements qui vont m'ôter tout souci pour un bon moment: je suis assurée d'une profusion de saumon au mercure, de poulet à l'huile de vidange, de lapin au plomb, de bovin fou, de vin au sulfure de cuivre, etc, etc... Je vais essayer d'en gaver ma femme, des fois que ça lui donnerait bon caractère !

Extrait Numéro 4
Six mois après.

Je n'ai pas eu une minute à moi pour mettre ce journal à jour... Il s'en est passé, des choses, depuis les dernières lignes que j'ai écrites !

Comme je n'avais pas assez de place dans mon congélateur pour toutes les saloperies que je devais ingérer en vue de garder intact mon nouveau matériel génétique, j'ai eu l'idée d'en extraire les principes actifs pour en faire des pilules... ca m'a coûté bien des efforts, à moi qui n'ai jamais été très brillante en chimie, mais ça en valait la peine... parce qu'ensuite, comme le récit de mon aventure est arrivé peu à peu aux oreilles de toutes les copines, elles m'en ont réclamé à qui mieux mieux.

A l'usage, c'est bien plus efficace que les hormones: à la concentration que j'utilise, la transformation est complète en deux jours ! Je travaille actuellement sur une version qui ne mettrait qu'une nuit à agir... on la prendrait le soir... J'appellerai ça "la pilule du lendemain"

Les copines ont un peu bavardé... avec Internet tout prend des proportions folles: j'ai dû monter une véritable usine, et je produis (de justesse) 500 millions de pilules par jour à destination du monde entier. Je ne sais pas si cela a un rapport mais c'est curieux, il me semble voir de moins en moins d'hommes dans les rues, bien qu'il y ait toujours autant de monde. Ah, une précision amusante, enfin: sur les femmes génétiques, ça me marche pas du tout: il semble que mon produit provoque des réactions incontrôlées du phénotype. Et à propos, ne cherchez plus Claudia Schiffer, elle défile désormais au zoo de Berlin, dans la section des chimpanzés. Mais on dit qu'elle va bientôt revenir sur le devant le la scène et reprendre une carrière internationale: Si elle est bien sage, elle pourra tourner un remake de Tarzan, dans le rôle de Cheetah.

La seule femme génétique qui ne se soit pas muée en guenon, à ma connaissance, c'est ma femme; Mais j'ai toujours su qu'au fond ce n'était qu'un vieux chameau !


Responsable du site : Lucie Sobek


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