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« », une petite histoire imaginée par marietherese2

1 Sonia jeanne jeanne.claude@femme.net 14-10-2004, 6:57 "MADELEINE" partie 10 de 12

"Sonia"

Je trouvais le temps long, j'avais envie d'être ailleurs. Ce n'était pas que le travail soit difficile, mais j'avais mieux à faire, j'avais à penser.

Cela faisait maintenant quelques années que j'étais vendeur dans ce grand magasin, au rayon des casseroles. Je connaissais bien mon métier, mes articles et mes clients. Cela ne me demandait pas un trop gros effort, heureusement. Mes clients étaient en majorité des clientes. Généralement je trouvais que c'était un des petits avantages de mon métier. J'aimais leur parler, les regarder, les observer, détailler leurs tenues, leurs attitudes, leurs mimiques. J'aimais les voir m'écouter, les conseiller, être près d'elles. J'aimais observer leur féminité.
Parfois, en certaines périodes, comme c'était le cas aujourd'hui, je trouvais que c'était un inconvénient. Je n'aimais plus ce contact rapproché trop beau, trop chaud, trop brûlant.
Par périodes, il fallait que je sois seul, que je puisse me laisser aller, que je laisse aller mon imagination, que j'aille dans mon pays de fantaisie.

Dans ces cas là, lorsque c'était ma période, le soir, aussitôt rentré chez moi, je prenais une bonne douche et puis je jouais avec mes petits jouets, avec mes petits trésors soyeux. Je me regardais de tous côtés, sous tous les angles et je me trouvais belle. Cela me calmait. J'en avais bien besoin, car j'étais fort nerveux, surtout en début de période.
J'avais l'habitude et je faisais un effort sur moi-même lorsque j'étais au travail. Je faisais attention à ne pas brusquer les clientes et à ne pas attirer sur moi l'attention du chef de rayon au regard inquisiteur.

J'appelais une journée pareille une journée de longue attente. J'avais l'habitude d'attendre. J'attendais souvent. Je passais beaucoup de temps à attendre. Souvent des rêveries agréables peuplaient ces attentes. Je rêvais de mes jouets, de mes trésors, de mes regards et de mes caresses. Parfois mes rêves allaient plus loin encore.
C'est en allant chercher une casserole à la réserve que je suis tombé sur Sonia. Tombé est bien le terme exact, car nous nous sommes retrouvés par terre, au croisement de deux couloirs.

Sonia était employée à la comptabilité depuis deux ans environ. Je la rencontrais parfois par hasard dans un couloir ou à la cafétéria du personnel. C'était le genre de jeune femme qui passait insignifiante dans la foule. Elle n'était pas belle, pas jolie non plus, même pas agréable à regarder. Elle n'attirait pas les regards des hommes. Elle ne faisait d'ailleurs aucun effort visible pour changer cet état des choses. Ses cheveux étaient courts et très mal coiffés. Les montures de ses lunettes avaient été choisies uniquement à cause de leur aspect pratique. Ses tenues étaient pratiques et confortables. Ce n'étaient pas des tenues dans le genre de celles que j'aimais détailler. Elle était timide et effacée. On ne voyait pas souvent ses yeux. Elle avait tort, car là il y avait quelque chose d'intéressant à voir.

Un jour, nous nous sommes croisés dans un couloir. J'étais avec trois collègues. Elle nous a lancé un regard furtif. Elle lançait son regard comme le fait le pêcheur qui lance son filet en bord de mer, sans savoir s'il y a du poisson, sans savoir s'il a une chance de ramener quelque chose. L'espace d'un instant j'ai croisé son regard. L'instant suivant, elle nous avait croisés et était derrière nous. Je savais à partir de cet instant qu'il y avait beaucoup de force et de douceur, bien cachés en elle. Je jetai un bref coup d'œil vers mes collègues. Ils continuaient à marcher comme si de rien n'était. Il n'y avait que moi qui savais, il n'y avait que moi dans le filet.

Je me suis redressé sur mes genoux. Je l'ai regardée. Elle a eu un sourire d'excuse. Pour la première fois je lui ai adressé la parole, pour lui demander si ça allait. Pour la première fois ma main a touché la sienne. Je l'ai aidée à se remettre debout. Après quelques paroles banales nous avons continué nos routes, encore différentes.
Le lendemain j'ai été porter moi-même une demande de crédit à la comptabilité. J'ai vu Sonia. Je lui ai proposé de boire un verre ensembles. Elle a fait mine d'hésiter, mais ses yeux m'avaient déjà dit oui.

Je l'ai attendue à la sortie du personnel. J'ai choisi un café quelques rues plus loin. Cela nous permettrait d'être un peu plus au calme, un peu éloignés de la foule des collègues qui allaient boire un verre après le boulot. Cela nous permettrait aussi de parler déjà un peu, en marchant. Sonia ne disait rien. Elle me lançait de temps en temps un regard bref que j'interceptais au passage. Ce soir là, elle me confirma qu'elle pouvait me transmettre beaucoup d'émotions par ses regards. Au café, elle ne disait toujours pas grand chose. Elle s'assit en face de moi et me fit comprendre qu'elle voulait m'aider. Elle voyait ma souffrance, mon désarroi, mes interrogations. Elle savait qu'elle pouvait m'être utile. Son regard entrait en moi, plein de douceur et de compréhension. Puis, par pudeur, elle regarda ailleurs, me laissant le temps de décider si j'acceptais de laisser envahir mon monde intérieur, et de le laisser envahir par elle.
Je la regardais.

Son regard revint lentement vers moi. Je vis au coin de sa bouche un léger tremblement. Elle regardait mes mains. J'avançai ma main droite qui était posée sur la table. En la faisant avancer, je dépliai ma main qui était un peu crispée. J'écartai légèrement mes doigts lorsque ma main parvint au milieu de la table, puis je l'arrêtai.
Le petit tremblement s'était arrêté. Maintenant Sonia souriait. Elle avait un sourire discret, mais très chaleureux. Ce sourire était pour moi, c'était le premier cadeau de Sonia. Nous savourions ce moment qui était le moment précédent une grande aventure, tout en en faisant partie.

Lentement, très lentement, elle leva sa main qui tenait son sac à main posé sur ses genoux et la déposa sur la table. Plus lentement encore, elle la fit glisser vers la mienne. Nous regardions tous deux ces deux mains. Nous savions ce qui allait arriver mais nous voulions le voir arriver. Elle déplia elle aussi sa main.
Lorsque les bouts de ses deux doigts touchèrent le bout des deux miens, notre sort était scellé.

Nous sommes restés ensembles toute la soirée. J'avais toujours eu beaucoup de mal à parler avec quelqu'un, surtout lorsque je voulais exprimer un sentiment, une émotion profonde. Ce soir là, je n'ai rien dit à Sonia de mes sentiments, de mes émotions profondes. Elle me regardait, j'y ai pensé, elle a tout compris.
Sonia avait elle aussi des sentiments, des émotions profondes qu'elle ne voulait pas raconter à tout le monde. Je l'ai regardée, elle y a pensé. J'ai compris Sonia.
Nous avions en commun la douceur, la gentillesse et une certaine forme de tendresse à partager.

C'est elle qui est venue se coller à moi. C'est elle qui a passé ses bras autour de mon cou. C'est elle qui m'a serré fort. C'est sa bouche qui a cherché la mienne. C'est moi qui étais heureux, en équilibre, loin de mes questions lancinantes. C'est moi qui sentais, tout contre moi, Sonia heureuse.
C'est Sonia qui me faisait glisser. C'est Sonia qui m'entraînait. Je me laissais glisser. Je me laissais entraîner, et cela me plaisait.

Elle aimait me toucher, me caresser, mais pas partout. Il y avait des parties de mon corps qu'elle préférait, d'autres où elle ne venait jamais. Elle aimait les parties de mon corps où elle se retrouvait, celles qui étaient pareilles au siennes. Elle n'aimait pas les endroits où ma peau était rude, là où les muscles saillaient, là où des poils recouvraient ma peau. En recouvrant mon corps de tissus soyeux, elle agrandit les zones caressables. La surface des zones interdites diminua.
C'est Sonia qui m'a emmené au paradis.

C'était un jeudi matin, mon jour de congé. Elle m'avait fait garer ma voiture en dehors de la ville. Nous sommes allés à pied vers la cathédrale. Elle m'a guidé dans les petites ruelles. Elle s'est arrêtée devant un magasin et m'a fait signe d'entrer. Le nom du magasin était "LE PARADIS DE MIREILLE". La tante de Sonia tenait le magasin. Elle était seule, il n'y avait pas de clientes dans son magasin de lingerie féminine. Je suis resté subjugué à l'entrée du magasin. C'était la première fois de ma vie que j'entrais dans un magasin pareil. Il n'était pas grand, mais il contenait beaucoup d'articles. Si l'on s'y déplaçait, on devait frôler toutes ces jolies choses, ou du moins les jolies boites et emballages les contenant. Je ne parvenais pas à m'avancer vers le comptoir derrière lequel se tenait la tante de Sonia. Les deux femmes avaient entamé une conversation à voix basse. Elles me jetaient de temps à autre un coup d'œil rapide. Je parvenais maintenant à tourner légèrement la tête et à porter mon regard de gauche à droite. Sonia vint vers moi et d'un geste doux et patient enleva ma veste, comme une mère enlève le manteau de son enfant qui ne peut pas encore s'habiller seul. Elle me fit alors tourner sur moi-même tandis que sa tante m'observait. Sonia retourna vers sa tante et rangea ma veste dans le petit comptoir. La tante hocha légèrement la tête plusieurs fois et me sourit avec approbation et chaleur. J'ai senti qu'elle voulait m'encourager. Elle fit le tour de son magasin et prit quelques boites, quelques sachets et les posa sur les bras de Sonia. Celle-ci se dirigea vers la petite porte à l'arrière du magasin, l'ouvrit et me fit signe de la suivre. J'ai eu du mal à me mette en route. Sonia a dû entrouvrir une des boites et en faire sortir un peu de dentelle pour réussir à me faire bouger.
Je l'ai suivie dans le petit escalier étroit.
En haut se trouvait la chambre de la tante de Sonia.

Sonia posa délicatement les boites et les emballages sur le lit et me regarda. Elle me fit signe d'enlever mes vêtements. Elle souleva le couvercle de quelques boites et j'enlevai tous mes vêtements que je jetai en tas dans un coin. Elle me fit prendre une douche dans le cabinet de toilette adjacent et me ramena dans la chambre. Elle souriait et me tenait par la main pour me guider. Elle déballa quelques jouets et trésors soyeux qu'elle étala sur le lit afin de me laisser choisir par lequel commencer. Je les caressai tous du bout de mes doigts et finis par en choisir un. Je l'attachai par-devant et le fit glisser autour de mon torse en retenant ma respiration. J'aimais ce contact de dentelle serrante qui glissait sur ma peau. Je remontai une par une les bretelles. Sonia s'approcha et s'occupa du rembourrage, en me disant quelques mots. Car elle parlait. Bien sûr j'avais déjà entendu sa voix douce et tranquille. D'habitude elle parlait peu, se bornant à l'essentiel. Ici elle venait de me glisser doucement un petit compliment, quelques paroles d'encouragement. Elle regarda dans les boites et me proposa quelques autres pièces complémentaires. Je prenais de l'allure. Je le remarquais au visage de Sonia, au son de sa voix et aussi grâce au miroir de l'armoire. Ce n'était pas encore la silhouette de mes rêveries, de mes fantasmes, mais c'était quelque chose de féminin. C'était déjà un bon pas dans la bonne direction. C'était déjà bien mieux que les pauvres résultats que j'obtenais avec mes petits jouets à moi achetés à la sauvette. Je découvrais combien ils étaient inadaptés et combien ils devaient être aidés par mon imagination pour alimenter mes rêveries. Ceux de la tante de Sonia étaient de la bonne taille. Ils serraient juste ce qu'il fallait pour réduire, déplacer, simuler et mettre en valeur mon corps. Ils avaient de jolies couleurs. De plus ils formaient un ensemble harmonieux.

Il y avait encore quelques domaines ou des améliorations étaient d'évidence nécessaires. Il y avait mon ventre qui, si je ne faisais pas l'effort de retenir ma respiration, montrait un peu trop ses rondeurs anachroniques. Il y avait tous ses poils qui couvraient ma peau et qui contrastaient avec la douceur des étoffes. Et puis il y avait ma tête qui décidément n'allait pas du tout avec le reste.

Sonia déroula son mètre ruban et me mesura à différents endroits. Elle redescendit au magasin. Lorsqu'elle revint, elle apportait mon premier corset. C'était pour elle aussi une première fois. Sa tante venait de lui expliquer la technique et elle m'aida adroitement à l'enfiler. Ce fut toute une affaire mais l'effort en valait la peine. Mes courbes, ma silhouette venaient de s'améliorer brusquement. Elle me fit enfiler un déshabillé soyeux, garni de beaucoup de dentelles et de petits rubans. Légèrement serré à la taille par une charmante ceinture en tissu, simplement nouée, il laissait entrevoir et mettait même encore mieux en valeur ma nouvelle silhouette. D'autre part il couvrait beaucoup de peau nue et donc beaucoup de ces vilains poils. Sonia avait préparé une perruque à mon intention. C'était une perruque toute simple, avec des cheveux artificiels blonds qui m'arrivaient aux épaules. C'était la première fois que je mettais une perruque.. Dans le miroir je voyais Sonia s'affairer autour de ma tête. A un moment elle se retira et je pus m'observer à mon aise. J'ai découvert alors ce plaisir nouveau de tourner la tête et de sentir des caresses dans mon cou et sur mes épaules nues. C'était bien différent de mes petits jeux. Je n'étais plus simplement couvert de quelques vêtements féminins. Ce n'étaient plus quelques pièces de puzzle éparses, c'était maintenant un puzzle complet, en trois dimensions, et animé. Je souriais. Ce sourire là, je ne le connaissais pas, je ne l'avais jamais vu. C'était un sourire de satisfaction, d'acceptation et de douceur. C'était un sourire lumineux. Sonia restait en retrait et me regardait de droite et de gauche. Elle me regardait aussi dans le miroir. Elle se pinçait les lèvres en souriant, satisfaite de son initiative. Elle se pencha vers moi et me demanda :
"Mireille, ça te va ?" J'hésitais un peu et je fis un petit signe interrogatif vers le bas. Elle continua :
"Ne t'en fais pas, ce n'est pas le prénom de ma tante. Ce n'est que le prénom de l'ancienne propriétaire qui a fondé le magasin. Ma tante l'a repris il y a quelques dizaines d 'années. Comme elle trouvait le nom joli et la clientèle fidèle, elle l'a gardé. Tu peux donc t'appeler Mireille, si tu le veux." Je n'hésitai plus, à partir de cet instant je fus Mireille.
Sonia fit monter sa tante. Elle présenta Mireille à Irène.
Irène avait elle aussi un regard intéressant. Elle avait l'art de mettre à l'aise les gens qu'elle côtoyait. Comme sa nièce, elle transmettait beaucoup d'émotion par son regard. Elle aussi avait le sens pratique. Elle nous prépara du thé. C'était mon premier thé au paradis.
Irène avait aussi beaucoup de tact. Elle nous laissa, Sonia et moi. Sonia eut fort à faire, plus que d'habitude.
Avant de remballer mes nouveaux jouets, avant de mettre Mireille en boite, elle prit les mesures de Mireille.
Elle comptait acheter quelques vêtements pour Mireille, qui serviraient la semaine suivante.

Le jeudi suivant, Mireille a fait des progrès. J'ai osé employer la cabine d'essayage au fond du magasin. Irène nous en avait parlé en buvant le thé dans sa chambre. Elle avait fait transformer son arrière boutique lorsqu'elle avait repris le magasin. Elle disposait maintenant d'une deuxième cabine d'essayage grande et confortable, et d'une cuisine. Elle avait astucieusement fait fabriquer des faux plafonds où elle pouvait ranger une grande partie des articles qui n'étaient pas d'usage courant. Elle gardait dans le magasin l'ancienne cabine d'essayage. Cet arrangement était fort commode lorsqu'une cliente ne désirait pas être dérangée.

Sonia et moi pouvions nous tenir à l'aise dans la cabine. J'ai commencé mon habillage toute seule. Sonia m'avait procuré dans la semaine un petit appareil pour que j'enlève un maximum de poils disgracieux. Dans la cabine, elle inspecta le résultat. L'inspection dura longtemps. Je plaçai d'abord ma perruque. Sonia m'en avait préparé une plus belle. J'enfilai le même genre de sous-vêtements que la semaine précédente, mais d'une teinte légèrement différente. Irène m'avait gâtée. Je plaçai moi-même mes bas qui glissaient bien mieux sur mes jambes épilées. J'ai réussi à enfiler le corset et à le mettre à peu près en bonne position. Sonia n'a dû m'aider que pour le serrer convenablement. Elle me mit quelques touches de maquillage, juste comme elle le faisait pour elle-même. Sonia m'avait acheté un pantalon. Il m'avait l'air fort petit. Je l'interrogeai du regard. Elle avait l'air sûre d'elle. J'ai glissé une première jambe dans le pantalon. J'ai aimé ce frôlement, cette sensation combinée de chaud et de froid. J'ai eu plus de mal avec la deuxième jambe. Heureusement, le tissu était assez élastique. Sonia m'a aidée à le mettre bien en place. Il m'allait bien, il me plaisait. Sonia le vit et sourit de contentement. Un joli T shirt amusant et coloré le compléta. Sonia me présenta mes sandales. Le dessus était composé de quelques fines lanières en cuir. Les talons avaient trois centimètres de hauteur. Je les enfilai adroitement. Elles m'allaient très bien. J'étais prête.

Irène vint voir et nous donna son approbation. Après un dernier long coup d'œil dans les miroirs de la cabine, je me risquai dans le magasin. Sonia me précédait. Pendant plusieurs minutes, elle se promena dans le magasin. Elle marchait, se penchait, ramassait un objet imaginaire par terre, le posait délicatement sur le comptoir, se retournait, marchait à nouveau, s'arrêtait et repartait ensuite. Elle s'asseyait un instant et recommençait le même parcours. Je la suivais et faisais tout exactement comme elle. Irène nous observait. Lorsqu'elle fut contente de nous, elle nous tendit deux sacs en plastique portant le nom de son magasin et nous ouvrit la porte. Elle nous salua aimablement comme si nous étions deux clientes.

Je marchais en rue à côté de Sonia. Cette scène que j'avais déjà vécue souvent dans mes rêveries, je la vivais maintenant pour de vrai. Le premier frisson passé, la première crainte oubliée, je me plongeais avec délices dans ce plaisir nouveau. J'aimais voir cet agréable reflet de jeune femme dans les vitrines et les miroirs. Lorsque j'en voyais un, je m'arrêtais, je me tournais, je bougeais. C'était ravissant. Cette jeune femme souriante, au regard malicieux, aux gestes élégants, qui respirait la joie de vivre, correspondait à ce que j'avais cherché, au type de jeune femme que je me poussais auparavant à essayer de draguer, le plus souvent avec très peu de succès. Maintenant je n'essayais pas de draguer. Il ne fallait pas me pousser à faire tout ceci, car cela me plaisait énormément. J'aimais regarder vers le bas et me voir marcher. J'aimais voir balancer ma poitrine. J'aimais laisser mes bras se balancer le long de mon corps et sentir la douce étoffe de mon pantalon caresser le bout de mes doigts. J'aimais m'entendre marcher. J'aimais plier un bras et poser ma main sur mon coude en la faisant d'abord glisser sur ma peau si douce à présent. J'aimais aussi marcher ainsi et sentir dans mon avant bras ces petits chocs si doux provoqués par le balancement de ma poitrine. J'aimais faire tout ceci devant une vitrine et me voir faire tout cela. J'aimais, en regardant une vitrine avec Sonia me frotter à elle en examinant la devanture. J'aimais le contact de la main et du bras de Sonia lorsqu'elle attirait mon attention sur l'un ou l'autre détail.

Nous avons fait ainsi le tour du pâté de maisons et sommes revenues au magasin. C'était fini, c'était déjà fini. Calmement, mais avec émotion nous avons tout rangé. J'étais redevenu ce jeune homme timide, cet étranger souvent triste. Avant de quitter Irène, Sonia a arrangé avec elle notre passage le jeudi suivant.
En rentrant en voiture, Sonia, comme d'habitude, ne disait rien. Moi aussi j'étais silencieux.

Le jeudi suivant Sonia me fit quelques surprises. Elle m'a fait essayer une autre perruque. J'avais maintenant de longs cheveux blonds. Elle m'a fait de jolis ongles. A mes poignets elle m'a passé une montre et des bracelets. La promenade fut bien plus longue. Nous sommes rentrées dans plusieurs magasins. Sonia a acheté quelques articles. Je l'aidais en donnant mon avis. J'étais étonnée moi-même. Auparavant l'achat de vêtements était une corvée nécessaire. Maintenant cela devenait un plaisir. Nous nous promenions dans cette ville que je croyais connaître et j'y découvrais des tas de choses inconnues. En revenant vers le magasin d'Irène, non loin de celui-ci, Sonia me désigna un des magasins. C'était un bouquiniste comme il y en avait plusieurs dans ce quartier. Celui-ci était particulier, disait-elle. Elle me fit entrer. Le magasin, plein de livres en tous genres, me plut au premier coup d'œil. Les couleurs, la lumière, l'agencement du magasin, l'odeur d'encre et de vieux papier, le joyeux désordre apparent, l'impression d'offrande, tout me plaisait. Le bouquiniste était occupé à ranger dans les rayons une grande caisse de livres anciens. Il nous laissa en paix. Après m'avoir laissée m'amuser à feuilleter quelques livres et me promener la tête penchée, de rayon en rayon, Sonia s'approcha du bouquiniste et le salua. Celui-ci la connaissait et la salua cordialement. D'un geste de la main, d'un regard, Sonia me désigna et me présenta à Jean. Celui-ci me sourit, me serra la main. Il m'observa et, au bout de quelques instants, je vis son regard s'intensifier, se fixer, tandis que son sourire s'agrandissait. Il hocha la tête d'un air connaisseur et satisfait. Il me souhaita la bienvenue dans son magasin, me félicita et me proposa de passer dans son arrière boutique. Sonia m'encouragea. Il écarta un lourd rideau de velours et nous fit passer, Sonia et moi, dans une petite pièce que je n'avais pas devinée. Je savais qu'il y avait des photos, des récits, des livres de ce genre là, du genre qui me procurait des sensations, des émotions particulières depuis ma tendre enfance, mais je ne savais pas qu'il y en avait tant.

La semaine suivante j'ai effectué mes premiers achats de vêtements. Je me sentais très joyeuse. J'étais un peu tendue, j'avais un peu l'impression d'accomplir un exploit. Pourtant tout se passa sans anicroches. Revenues au magasin, nous avons fait admirer à Irène mes achats. Elle me complimenta. Cela me toucha. Pendant quelques instants je me suis tue. Car je parlais. Je parlais même beaucoup. J'expliquais à Irène et Sonia mon sentiment de retrouver un équilibre longtemps perdu, et qui était un équilibre différent, moins forcé, plus naturel. Je me sentais comme le promeneur distrait pris dans les sables mouvants, s'y enfonçant au fur et à mesure qu'il tentait d'en sortir, et trouvant tout à coup, alors qu'il se croyait presque perdu, un sol ferme sous ses pieds, en pente douce qui le ramènerait, il le savait, vers la terre ferme.

Le dimanche suivant, nous avons continué à explorer le monde autour de Mireille. Nous sommes, Sonia et moi allées visiter un château. Nous avons joué aux touristes. J'appréciais de me promener dans la foule, de m'y perdre, de me confondre parmi les autres touristes. Je me sentais bien avec des gens autour de moi. Mes rapports avec mon entourage changeaient. Auparavant je fuyais les contacts trop rapprochés, ou au moins je cherchais à passer le plus inaperçu possible, à ne pas attirer l'attention.

Le château était intéressant. Nous avons suivi la visite guidée. Le parc qui entourait le château était superbe. Tous les prétextes étaient bons à Sonia et à moi pour nous toucher, nous frôler. C'était l'appareil photographique que nous voulions nous passer l'une à l'autre ou son maniement que nous devions nous expliquer. C'était le guide touristique où nous recherchions un passage. C'était un détail de la façade que nous voulions nous faire découvrir. J'ai beaucoup aimé cette journée. C'est là, sur un banc où nous nous reposions, que j'ai dit à Sonia que je voulais consulter la doctoresse dont elle m'avait parlé.

Ce fut ce jour là que Mireille alla pour la première fois au restaurant. Ce fut simple et agréable. Cela se passa très simplement, comme une expérience quotidienne, comme une eau qui coule dans la même rivière chaque jour sans se poser de questions inutiles. Ce fut agréable car je réapprenais à manger, à goûter les aliments et à les savourer, comme je savourais tous les instants de la vie de Mireille. Les photos que Sonia avait prises me plurent beaucoup. J'avais l'air d'une jeune femme émerveillée, recevant lors de son anniversaire un très beau cadeau.
Notre sortie suivante fut consacrée à un musée des beaux-arts. C'est Catherine, une copine de Sonia dont le tourisme était un des hobbys, qui le lui avait conseillé pour une raison bien précise, qu'elle n'a pas voulu m'indiquer, voulant m'en laisser la surprise.

J'avais une petite appréhension à l'idée de me trouver dans un bâtiment fermé pendant plusieurs heures d'affilée, à la merci des regards d'autres visiteurs trop rapprochés. Je préférais les grands espaces, les parcs et les cours de châteaux, qui me permettaient de garder mes distances et de me réserver une possibilité de fuite en cas de besoin. Sonia insista et sut me convaincre.

Sonia a eu raison d'insister. Cela s'est très bien passé. Le musée était intéressant. Ses collections étaient de bon niveau. Les autres visiteurs ne nous lancèrent aucun regard inquisiteur, aucun regard fouilleur, aucun regard détailleur. Au contraire, je reçus plusieurs coup d'œil d'un autre genre, d'un genre assez flatteur. J'y pris plaisir.

La surprise, je ne pouvais pas la manquer. Il s'agissait d'une statue en marbre représentant un hermaphrodite couché. J'avais déjà vu en photo quelque chose de ce genre là. En effet, m'expliqua Sonia tenant en main les notes de Catherine, il s'agit de la copie réalisée à Rome, de la statue qui se trouve au LOUVRE. Le moins que l'on puisse dire est que la statue attirait les regards. Sonia et moi n'étions pas seules à la détailler. Sonia voulut me prendre en photo devant la statue. Nous avons dû attendre patiemment notre tour dans la file des photographes amateurs.

Je perdais peu à peu mes préjugés, mes peurs, mes angoisses. Je commençais à croire à ma chance, à croire à la vie. Je commençais à vivre. La visite chez la doctoresse fut l'objet de ma dernière peur irraisonnée. J'avais une dernière fois eu peur sans raison. Cette dame fut charmante. Elle avait l'art d'écouter et d'observer. Elle laissait le patient parler, elle n'imposait rien. Je croyais devoir me justifier, me battre pour arriver à mes fins. Ce ne fut pas le cas. Elle était bien informée de ce genre de situation, de désir. Elle me laissa parler de tas de choses, de tas de morceaux de vie, de ma vie, de ma vie d'avant et de ma vie avec Sonia. Elle m'écoutait, elle ne m'interrompait pas. Parfois elle me posait doucement une question. C'étaient des questions ouvertes, propres à mettre en lumière telle partie de mon récit, à préciser telle tendance, à relancer mes confidences. A la fin, elle me demanda ce que j'aimerais qu'elle fasse pour moi. Je le lui dis, elle me donna raison et le fit.
Sonia fut très contente que je commence mon traitement hormonal. C'est en se pinçant les lèvres, avec une moue malicieuse et un sourire gourmand qu'elle partait en exploration de nouvelles étendues de peau à caresser.
J'avais de plus en plus de joie et de plaisir à vivre les jeudis et les dimanches. Ces jours là je pouvais enfin vivre, vivre sans retenue, sans entrave.

J'avais de plus en plus de mal à vivre mes journées de travail. Je dormais mal, j'étais de mauvaise humeur, je traînais une fatigue constante, mon travail me pesait. Je sentais qu'un choix devrait tôt ou tard être pris concernant mon avenir. Un dimanche soir, en prenant notre thé habituel avec Irène je leur parlai de tout cela, cherchant leur réconfort. Car lorsqu'elles me sentaient un peu moins gaie, un peu triste, c'était un plaisir de se faire consoler par elles. Elles s'approchaient alors de moi, m'entouraient, me cajolaient, me caressaient, me disaient des mots agréables à entendre. Cette fois-ci, il n'en fut rien. Elles me regardaient comme si je venais de dire quelque chose d'usuel, de banal. Je les regardais l'une et l'autre mais leurs visages paraissaient indifférents à ma peine. Ce fut Sonia qui craqua la première. Elle se tourna vers Irène et en ramenant son regard vers moi, je sus ce qui allait m'arriver.

* marie therese le 13/01/2005


Responsable du site : Lucie Sobek


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