1 Abandon 1 liane 01-05-2007, 11:56 Le printemps serait magnifique. Les jours déjà passés l'annonçaient à renfort de soleil et d'oiseaux. Je portais des dessous féminins sur ma peau rasée et mes ongles luisaient d'un vernis chaque jour différent dans mes souliers. Je marchais dans les rues, le sourcil aminci, dévorée d'un désir qui semblait impossible. Des regards s'arrêtaient sur mon visage puis s'éloignaient sans jamais coïncider. Serge de T continuait de me hanter, je me rappelais le moindre de ses mots, chacun de ses gestes. J'hésitais pourtant à le rejoindre, n'ayant pas répondu au dernier de ses désirs, n'ayant pas tout quitté pour ne dépendre plus que de lui.

Néanmoins, je rôdais plus ou moins alentour, la seine allait grise quand je grimpais sous un soleil de plomb du côté de l'Arc de Triomphe, suivant la lente traîne des carrosseries prenant de chaque côté de l'avenue Charles de Gaulle. En effet, je doutais de sa réaction si je revenais à lui et, craignant une rebuffade, bifurquais pour m'enfoncer dans les allées sablonneuses du Bois de Boulogne. J'y rejoignais l'un des lacs et m'asseyant sur un banc, toujours le même, espérais une rencontre, la redoutais.
Ainsi, je demeurais assis au soleil, frémissant dès qu'une ombre s'interposait, angoissée, déjà offerte.
Quand il pleuvait, je me déchaussais et allais, pieds nus, dans les allées, jouissant du contact doux du sable, vite frustrée de ne partager de semblables sensations, seule au point de parfois me branler aux écorces sans plaisir.

Un matin enfin, ciel encore foncé et frais mais s'éclairant à mesure de rose et mauve, je téléphonai chez lui, en vain : son numéro n'était plus attribué. J'avais tellement espéré en appelant (et je le comprenais vraiment à ce vide à mon oreille) que je crus ma fin proche, devoir me supprimer. Après un long moment (le soleil maintenant à l'oblique des fenêtres) je décidai d'aller chez lui. L'excitation avec laquelle je me préparai me confirma que je me mentais depuis notre dernière rencontre au terme de laquelle j'avais souhaité rompre. Je descendis à la station de taxis la plus proche, in différente aux regards curieux ou ironiques.

Je sonnai à la grille près de m'évanouir, obligée d'admettre ma jouissance à la soie sur ma peau, obligée de reconnaître que je ne mènerais jamais une vie ordinaire. Sa voix résonna et ce fut un autre choc. Je parlai, bredouillai plutôt mon nom.Il ouvrit. Dans l'ascenseur, j'imaginai son étreinte, ma soif et faim satisfaites. Il se tenait sur le palier, aquilin, faussement froid; inchangé.

"Je ne pensais plus vous voir Liane. Vous me surprenez. Je devrais refuser de vous recevoir mais vous m'avez manqué, il dit.
- Vous aussi, vous m'avez manq.. L'aveu m'échappa et j'en rougis.
- Vous êtes toujours plus chienne, vous avez dû en faire des ravages ! Mais entrez ! Vous allez me raconter.»
Il referma la porte sur moi, me précéda dans le salon

Je retrouvais les lieux, consciente enfin de ma décision. Déjà, je savais que je lui céderais; pire, je ne souhaitais que cela. Et ce malgré le malaise qui s'ensuivrait, le malaise et le malheur qui en découlerait. Et j'y reviendrais encore.

Nos yeux s'accrochèrent et dans les siens je vis qu'il pensait comme moi. Autrefois, j’avais eu honte de me travestir et j’avais voulu en finir en me supprimant. Aujourd'hui, j'acquiesçais à ce plaisir et désirais plaire. Il proposa que nous buvions à nos retrouvailles. Je bus à son verre, soufflée du baiser qui succéda.
" Je voudrais..., je dis
- Bien sûr Liane. Vous vous rappelez l'endroit ?
- Oui, je tremblai.
- Parfait. Alors, je vous attends. "